Un texte de Simon Hogue

Réponse à «L'éloge du fonctionnaire*» - Dépolitiser la gestion de la cité

Gouverner c'est choisir!

Chronique de Louis Lapointe

Gouverner c'est choisir! Voici un texte de Simon Hogue* publié dans le Devoir de ce matin.
Réponse à «L'éloge du fonctionnaire*» - Dépolitiser la gestion de la cité
Simon Hogue**, doctorant en science politique à l'Université d'Ottawa, 29 novembre 2011, Québec
Je souhaite répondre au texte paru la semaine dernière dans Le Devoir, écrit par François Bérubé. Croire qu'il est possible de diriger un pays avec un regard de gestionnaire est pernicieux. Cela équivaut à dépolitiser la gouverne de l'État, chose pourtant éminemment politique, comme nous le rappelle un retour sur l'étymologie du mot politique, dont les racines grecques polis (cité), politea (gouvernement) et politikos (les affaires du gouvernement) lient sans ombrage la politique à la gestion de la cité.
L'approche gestionnaire dépolitise la politique en prétendant qu'il est possible de gouverner dans l'intérêt général. Au-delà du charme incontestable du concept, sa définition s'avère un véritable casse-tête. Qu'est-ce que l'intérêt général? Une hausse agrégée du produit intérieur brut représente-t-elle toujours un gain pour tous, pour chacun? Un dollar pour quelqu'un sous le seuil de la pauvreté a-t-il la même signification qu'un dollar pour le quintile supérieur?
L'intérêt général nie l'existence de la stratification sociale et postule que tous, sans égard à la diversité de la société, partagent les mêmes intérêts. En réalité, l'intérêt général sert de légitimation à l'imposition des intérêts de la classe dominante. Étonnamment, et malgré tous ses bienfaits, la construction de logements sociaux se retrouve rarement dans la définition de l'intérêt général des gestionnaires visionnaires contrairement aux baisses d'impôt pour les entreprises.
Rester au centre
Gouverner ni à gauche ni à droite, c'est gouverner au centre (ou aux extrêmes). Surtout, ce n'est pas s'élever au-dessus de la mêlée politique. Le discours gestionnaire sacralise, parfois inconsciemment, les intérêts politiques et économiques de ceux qui le défendent et assure que ces intérêts ne seront pas remis en cause. Ce discours évite ainsi à ceux qui en bénéficient de devoir se justifier dans la joute politique, pourtant inévitable lieu de débat et compromis entre les multiples intérêts présents dans la société.
Remettre les rênes de l'État entre les mains de gestionnaires qui appliqueront les dogmes économiques sans les justifier au même titre que les curés répandaient la bonne nouvelle m'inquiète sérieusement. À regarder les pays européens «s'auto-pelure-de-bananiser» en confiant les pouvoirs à des banquiers (ces docteurs Folamour de l'économie honnis il y a deux ans pour avoir entraîné les pays occidentaux dans la plus grande dépression depuis le krach de 1929), je crains pour l'avenir du Québec si nous décidons d'emboîter le pas de l'administration «objective».
La gestion de la cité est on ne peut plus politique. Le nier est en soi une action politique contre laquelle tous ceux, de droite ou de gauche, qui croient au débat démocratique plutôt qu'au diktat technocratique doivent s'opposer.
Simon Hogue, doctorant en science politique à l'Université d'Ottawa
Source:http://www.ledevoir.com/politique/quebec/337129/reponse-a-l-eloge-du-fonctionnaire-depolitiser-la-gestion-de-la-cite

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*CAQ et François Legault - Éloge du gestionnaire
**Lire également à propos de Simon Hogue:
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L’engagement

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Louis Lapointe534 articles

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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