Les conservateurs du Québec ont gagné leur pari. Leur stratégie en deux temps était simple, mais elle a porté ses fruits. Un congrès avec une main tendue aux Québécois en mai, puis une victoire dans une partielle au Saguenay le mois suivant qui démontre que cette main tendue est bien reçue.
Évidemment il faut faire attention. Les astres étaient bien alignés cette fois-ci puisque le Parti conservateur avait misé sur un candidat localement populaire. Comme entraîneur des Saguenéens, Richard Martel s’était fait connaître autant comme un fier ambassadeur de sa région que comme un vaillant batailleur.
Si Andrew Scheer a gagné cette manche, Justin Trudeau n’a pas perdu grand-chose. Le Parti libéral a presque maintenu son pourcentage de vote de la dernière fois. La différence, c’est qu’en 2015 le libéral avait arraché une victoire avec seulement 31 % d’appui dans le cadre d’une division du vote à quatre partis. Cette fois-ci, le conservateur a mobilisé la masse des électeurs dans une véritable lutte à deux.
Lutte à deux
Voilà sans doute la plus grande victoire d’Andrew Scheer lundi soir. Ramener le Québec dans une lutte à deux dans laquelle il se présente comme le meilleur choix. Une lutte entre libéraux et conservateurs, nous n’avons pas vu ça au Québec depuis 1988. Cela fait 30 ans.
Pourtant le choc rouges contre bleus constitue la bataille de base pour le pouvoir au Canada. Or, depuis l’échec de Meech en 1990, le Québec s’était retiré de la lutte ainsi configurée. Nous avons voté Bloc québécois, puis nous avons voté NPD. Les plus positifs diront que nous avons fait entendre notre mécontentement. Les plus négatifs diront que ces dernières années nous avons boudé.
Lundi soir dans Chicoutimi-Le Fjord, la tendance observée au cours de la dernière année s’est confirmée. Le NPD et le Bloc sont en train de sortir de la course. Il serait injuste de les déclarer morts après une simple partielle, mais force est d’admettre que la pente est abrupte autant pour le NPD que pour le Bloc s’ils veulent revenir en force dans la prochaine année.
Misère
Dans le cas du Bloc, on ne sait même plus si le parti fracassé se présentera devant l’électorat en un ou en deux morceaux. Et qui exercera le leadership inspirant qui serait nécessaire pour rebondir en peu de temps ? Peu de candidats à l’horizon...
Quant au NPD, le chef Jagmeet Singh a suscité de la curiosité à son arrivée. Or aujourd’hui, il est comme sorti du paysage. Il n’est pas dans l’actualité, son parti non plus, et les Québécois ne s’en rendent même plus compte. Pourtant leur congrès avait permis l’adoption de résolutions intéressantes pour le Québec. On dirait que c’est demeuré des mots inertes sur le papier.
Les lieutenants d’Andrew Scheer au Québec ont aussi gagné en crédibilité cette semaine. Lorsqu’ils diront à leurs influents collègues de l’Ouest que telle prise de position est essentielle pour le Québec, ils seront écoutés comme on écoute dans un parti les gens qui ont livré la marchandise.