Syrie : la guerre des lâches !

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Les Kurdes sont toujours instrumentalisés puis abandonnés par l'Occident

Il y a de ces tragédies qui restent gravées à jamais dans la mémoire. L’une d’elles est en train de se dérouler sous nos yeux, dans l’indifférence générale.


Un peuple sans pays, éparpillé entre la Syrie, l’Irak et la Turquie qui se bat, depuis des décennies, pour son autonomie.


Je vous parle du peuple kurde, plus précisément des Kurdes de Syrie. Ces vaillants combattants à qui la coalition occidentale, constituée à l’initiative des Américains, avait sous-traité sa sale guerre contre l’État islamique.


Ils se sont battus avec un courage inouï, les femmes aussi. Ils ont mis en échec des hordes de djihadistes et protégé la vie des soldats occidentaux qui ne daignaient pas mener de combat au sol.


Le 11 décembre dernier, j’avais dédié ma chronique dans ce Journal à l’une d’elles, Rodja Felat, la « Napoléon » kurde, que j’avais nommée ma Personnalité de l’année 2017. Elle avait commandé 45 000 combattants pour libérer Raqqa, le fief du groupe État islamique.


Retour à la case départ


Avant même que la guerre ne soit terminée, et avant même qu’une solution politique ne soit trouvée pour pacifier la Syrie, des pays de la coalition occidentale commencent déjà à envisager le retrait de leurs troupes, en laissant derrière eux un gâchis monumental.


C’est ainsi que Donald Trump a annoncé, le 29 mars dernier, lors d’un discours dans l’Ohio, à la surprise des responsables du département d’État et de la Défense : « Nous allons quitter la Syrie très bientôt [...] Laissons les autres s’en occuper maintenant. »


En effet, Daech est chassé de Syrie, mais les groupes djihadistes sont loin d’être morts. N’empêche, Donald Trump s’en lave les mains, laissant aux autres le soin de « finir la job », c’est-à-dire massacrer les minorités.


Les « autres » étant son gendarme de service, l’Arabie saoudite, qui mène, grâce à l’arsenal qu’il lui fournit, une guerre sans merci, contre la minorité Houthie, au Yémen. Plus de 10 000 morts, à ce jour.


C’est le même Donald Trump qui a autorisé, en mai 2017, la fourniture d’armes aux braves milices kurdes du YPG (Unités de protection du peuple) pour débarrasser les soldats occidentaux de l’État islamique et libérer Raqqa.


La trahison des alliés


Ce sont précisément ces milices kurdes de la libération, alliées des pays occidentaux, qui sont considérées par la Turquie comme des terroristes parce qu’elles ont le malheur de revendiquer l’autonomie du Kurdistan.


L’armée turque a lancé, depuis trois mois, une offensive sans précédent pour les déloger de leur territoire, sans qu’aucun pays occidental, Canada compris, ne lève le petit doigt.


Dans une lettre interpellant Emmanuel Macron, parue dans Le Monde du 29 mars dernier et signée par des intellectuels et personnalités politiques dont Bernard Kouchner, on rappelle que les Kurdes ont été des « alliés indéfectibles » de l’Occident.


Pendant trois ans, ils « ont mis hors d’état de nuire en Syrie les islamistes de Daech, auteurs des effroyables attentats qui ont frappé la France ».


Ils qualifient l’offensive contre Afrin sur laquelle flotte le drapeau turc d’« invasion injustifiée » et d’opération de « nettoyage ethnique » semblable au génocide des Arméniens.


À quoi aura donc servi la guerre en Syrie si le massacre des Kurdes par la Turquie et ses alliés djihadistes revient à « accepter la reconstitution de réseaux terroristes qui ne manqueront pas de frapper à nouveau la France » ?


Cette lâcheté n’épargne pas le Canada qui a envoyé un contingent de forces spéciales pour appuyer les Kurdes dans leur lutte contre Daech, en Irak, et qui garde un silence honteux sur cette tragédie.