Un début de réponse face au mystère de la désinformation

Une note supplémentaire sur Radio-Cadenas et cie.

Tribune libre

J'aimerais mettre en corps de propos ici une bonne question que Serge Charbonneau posait dans un commentaire sur mon texte intitulé La manipulation Radio-Canadienne de l’information.
En somme, il trouve que le comportement du corps journalistique est un mystère flagrant.
Ici ce n'est pas mon but de montrer une culture personnelle supérieure qui explique ce que d'autres n'ont pas accès, mais de démontrer des mécanismes qui peuvent être accessibles par tous pour expliquer ce phénomène de la déviation éditoriale. Ici c'est d'être ouverts aux principes organisationnels des chaines d'informations et non sur leurs contextes des motivations. Il ne faut pas jouer du Paul Diel pour entrer dans la tête de Michel C. Auger et autres...
Je reprends ici ma tentative de réponse:
'Vous posez les bonne questions de base M. Charbonneau.
Je n’ai pas toute l’historique en tête sur nos médias ici au Canada et des diverses règlementations, mais je peux suggérer une réponse fortement pondérée : une réforme de la FCC effectuée par Ronald Reagan en 1986.
Qu’a-t-il fait ce héros des néoconservateurs ? Il a dérèglementé dans le secteur de l’information télévisuelle la séparation des pouvoirs entre le pupitre d’information (ou l’entité nouvelle) et la direction corporative de cette même chaine.
La raison ? Il voulait soi-disant promouvoir une saine compétition en augmentant la rivalité entre les entités corporatives et en créant des catégories de nouvelles à prix compétitif ! Cela devrait être bon pour le consommateur et la démocratie, non ? Noooon !
En diminuant ou anéantissant la division de la direction nouvelle au profit de celui de l’unité corporative, les dirigeants d’affaire et les comptables sont entrés dans l’élaboration de la nouvelle.
En + ou - 25 ans, pour réduire les coûts de grands médias comme Radio-Canada (la noble de l’époque 1982-1995), TVA, CBS, NBC et autres, on a :
1) coupé les bureaux à l’étranger pour ensuite acheter de la nouvelle standardisée chez les grossistes comme l’AP, La Presse Canadienne et Reuters.
2) resserré les critères de la nouvelle critique pour diminuer les coûts d’expositions juridiques (et par conséquent diminuer ou fermer les comptes capitalisés contre les poursuites) face aux partis qui se sentent lésés par la véracité ou par le choix de libellé de la nouvelle.
3) coupé les frais de production de documentaires et d’enquêtes journalistiques et créant les émissions ou capsules avec des débats entre panellistes (habituellement 3 ’experts’ dont on peut diriger l’orientation du débat : 1 faible et 2 fortes têtes).
4) La division journalistique de l’époque avait l’obligation de suivre les codes de déontologie journalistique. Il en est beaucoup moins le cas aujourd’hui en évidence avec le pupitre proche ou au même étage que les bureaux corporatifs.
5) créé des évènements nouvelles près des préoccupations de chez nous (un chien est mort chez ma tante Alice hier).
6) Avec les besoins de revenus accrus de la part des publicitaires et commanditaires, des focus groups ont donné le ton que la nouvelle doit être plus un fait accompli et qu’une solution est déjà pensée pour l’auditeur. On ne veut pas qu’il se mette à penser lui seul et se lever impulsivement de son divan quand même ! L’annonce de VW, de Toyota ou de Desjardins arrive après cette pause !
Je devine que c’est malheureusement comme ça que l’on fait de la nouvelle télévisuelle aujourd’hui. Chez FOX, CNN ou Radio-Cadenas.
'
Deux excellentes pistes vidéos ont été produites qui montrent avec plus d'éloquence ce que j'explique de façon mécanique plus haut.
1) Le film THE INSIDER inspiré des faits des mésaventures d'un dénonciateur VP du nom de Geoffrey Wigand contre son ancien employeur BROWN & WILLIAMSON et des diverses tergiversations des acteurs de l'émission 60 MINUTES de CBS News dans les 1992-1996. Le revirement éditorial que tente l'éxécutif de CBS corp. sur CBS News dans les derniers jours et les pressions de désinformations qui y sont véhiculées sont saisissantes.
2) L'excellent documentaire THE CORPORATION lancé en 2003 qui fait état de la nature et des diverses déviations et abus de pouvoir des différentes entités corporatives. Il faut sauter vers la section #6 je crois qui s'intitule le monde de l'information. Un excellent exemple sur le CAREFUL COMMUNICATION anglo-saxon y est démontré avec l'affaire FOX NEWS antenne Floride contre deux de ses anciens journalistes de l'émission THE INVESTIGATORS.
Mais ces 2 derniers exemples sont dans un lointain passé où des journalistes ont exercé de l'intégrité journalistique tôt ou tard contre des obstacles. Aujourd'hui, la quasi-totalité des journalistes suivent le programme éditorial des chefs de pupitre et de l’exécutif corporatif. Après tout, eux aussi ont des hypothèques et des vacances alléchantes à payer! Comme tout le monde.
La survie économique semble être l'ultime idéologie de nos jours! Mais ça c'est une toute autres histoire...


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