Première partie

Un parti voué à la trahison nationale

Tribune libre

Tous ont en mémoire comment, pendant les neuf années qu’a duré le règne de Jean Charest, comme premier ministre, les libéraux se sont employés à démanteler l’État-nation que nous étions en train de construire. Leur seule façon d’empêcher la consolidation du projet d’émancipation nationale qui est le nôtre fut tout simplement de le contrarier dans les diverses facettes de son élaboration.
Un des dispositifs mis en place, et qui a donné lieu à une commission d’enquête, consistait à entrelacer le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. D’où une nouvelle appellation dans notre vocabulaire : le juge post-it.
Sachant que la séparation des pouvoirs est un élément essentiel de la démocratie représentative, que cette séparation garantit les droits et que, comme nous le rappelle Aristote : « Dans tout État, il est trois parties, dont le législateur, s'il est sage, s'occupera, par-dessus tout, à bien régler les intérêts. Ces trois parties une fois bien organisées, l'État tout entier est nécessairement bien organisé lui-même… », nous voyons bien quel profit ceux et celles qui militent si intensément à la défaite de notre projet pouvait escompter retirer en déconstruisant délibérément un des aspects essentiels de notre infrastructure étatique.
Ce n’est pas pour rien que nous avons pu qualifier ce régime d’être un gouvernement à la solde d’avocats véreux : leur connaissance des lois leur servait à corrompre nos institutions démocratiques.
Dans un État bien organisé, aujourd’hui, deux autres pouvoirs se doivent d’être en séparation nette d’avec le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire : le pouvoir médiatique et le pouvoir monétaire.
On se rappelle que les responsables des journaux de Gesca, filiale de Power Corporation et propriété des Desmarais, ont passé une entente avec la Société Radio-Canada afin d’effectuer une convergence dans l’utilisation du personnel des uns et des autres aux fins de mener des objectifs communs et, on s’en doute, pour promouvoir des aspects idéologiques nettement centrés sur le développement des affaires, l’unité canadienne et la valorisation du Parti libéral.

On se rappelle aussi les visites que des membres éminents du gouvernement Charest ont effectuées à Sagard, le fief des Desmarais, pour démontrer leur vassalité sans compromis à leurs maîtres. On voit, ici, à l’œuvre la convergence du pouvoir exécutif, du pouvoir médiatique et du pouvoir monétaire dans toute sa splendeur et cet entrelacement de tous ces pouvoirs nous a menés vers le pire gouvernement que le Québec ait pu connaître dans son histoire.

Un deuxième dispositif mis en place pour disqualifier nos institutions démocratiques touche à l’essence même des mœurs électorales que nous avions, de peine et misère, réussi à assainir. Ce qui a donné lieu à la Commission d’enquête sur l’octroi des contrats publics dans l’industrie de la construction.

Depuis le début des auditions de cette commission, nous assistons au dévoilement de toute l’ampleur de ce que représente le dévoiement des règles de bonne gouvernance dans l’administration des biens publics, mais aussi nous commençons à comprendre comment un parti peut contrevenir à la loi en garnissant sa caisse électorale par des procédés complètement rétrogrades et dignes d’une république de bananes.
Cet avantage indu, dont ont pu jouir les libéraux, a complètement invalidé notre démocratie. Et ces fraudes électorales sont en phase avec la fraude référendaire de 1995 et la fraude constitutionnelle de 1982. On est toujours en pays de connaissance!

La morale de ces histoires – et elle est imparable –, c’est que le Parti libéral ne peut se faire élire que par des stratagèmes et des magouilles.
Un troisième dispositif mis en place pour démanteler notre État a trait à la réingénierie des processus administratifs. Cette appellation pompeuse consistait essentiellement à transférer au secteur privé des fonctions normalement dévolues au secteur public, notamment en ce qui a trait à la supervision des grands travaux publics. Ce qui a donné lieu à une surenchère quant aux coûts défrayés et à une pléthore d’ajustements à la hausse de l’évaluation des plus bas soumissionnaires.
Ce biais, mis au compte du virage néolibéral des libéraux, a donné lieu à une perte substantielle de la Caisse de dépôt et de placement, à des coûts astronomiques dans le développement de la filière informatique, tout en nous aliénant de nos droits quant aux ressources énergétiques sur Anticosti. Ces trois sphères de notre vie économique spoliée attendent toujours leur commission d’enquête.


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6 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    29 avril 2014

    Je voudrais élaborer un peu sur ce que j'ai dit dans mon dernier commentaire, en particulier concernant cette affirmation:
    "Que dire de la protection d’une vie que l’on considère très satisfaisante et d’un statut social que l’on considère enviable et qu’on a pas du tout envie de risquer dans un référendum ?"
    En cela, les Québécois ne sont pas différents des citoyens du reste du monde. En ce 21e siècle, j'ai réalisé que tout le monde était comme ça.
    Par exemple, en 2001, je n'ai pas pris beaucoup de temps à réaliser l'invraisemblance du récit des attentats du 11 septembre 2001 et je me disais que cette histoire "officielle" ne tiendrait pas deux ans.
    Pourtant, la version dite "officielle" tient encore et nous sommes en 2014 et ce malgré les recherches d'experts hautement qualifiés comme les architectes et ingénieurs pour la vérité sur le 11 septembre qui disent que la version officielle est impossible:
    http://www.ae911truth.org/
    Bref, j'ai appris que les humains étaient dans leur grande majorité prêt à accepter n'importe quoi, n'importe quel mensonge, en autant qu'il protégeait, ce faisant, un niveau de vie jugé satisfaisant.
    Du moment qu'une majorité voit un avantage à endosser un mensonge, le mensonge peut subsister indéfiniment.
    Il en est de même lorsqu'un parti politique est soupçonné de manquer d'intégrité. Ce parti va être tout de même réélu si une majorité voit en ce parti un avantage personnel.
    C'est soi avant tout principe.
    Il semble que ce soit de cette façon que les humains fonctionnent... jusqu'à temps qu'il arrive ce qui arriva à l'époque de Noé ou de l'Atlantide, c'est à dire qu'un cataclysme de grande ampleur emporte les restants d'une civilisation en déclin ayant rejeté l'idéalisme pour le chacun pour soi. Et cela risque d'arriver plus rapidement que beaucoup se l'imagine lorsque l'on songe qu'au cours des siècles, il y en a un assez bon nombre, de Nostradamus à Malachie, qui ont prédit la fin des temps pour notre époque.

  • Marcel Bernier Répondre

    28 avril 2014

    @ Pierre Cloutier
    Il est grandement temps, en effet, que la lutte pour l'indépendance se fasse à visière levée et qu'on cesse de cacher notre projet d'émancipation nationale comme une maladie honteuse.
    Il reste que je compte énormément sur les leaders naturels de la société civile pour nous appuyer dans ce cheminement. Et ici, je pense, à titre d'exemple, à Louise Chabot, présidente de la Centrale des syndicats du Québec ou à Mario Beaulieu qui veut briguer la chefferie du Bloc Québécois.
    Un pays, cela construit avec toutes les bonnes volontés.
    J'ai eu l'occasion d'exprimer, à une autre occasion, mon choix actuel quant à celle qui devrait diriger le Parti Québécois, et je trouve que Véronique Hivon est une personne douée d'un charisme, d'une vive intelligence et possède les qualités nécessaires pour mener la barque à bon port.
    Nous avons, face à nous, des adversaires bien articulés et nous nous devons d'évaluer les forces en présence, d'en dénoncer les mensonges, les subterfuges et les trahisons et d'élaborer des stratégies pour les contrer. Je revendique encore et toujours la liberté de penser. Les «crois ou meurs», très peu pour moi!
    Nous sommes en lutte : portons le combat avec les armes que nous possédons.
    Au cas où vous l'auriez oublié, il s'agit, dans un premier temps, de gagner la bataille de l'opinion publique, de convaincre la population québécoise que notre projet est nécessaire à réaliser, car ce sont nos concitoyens et nos concitoyennes qui seront appelés-es à le ratifier un jour ou l'autre par leur sanction.
    Il s'agit, pour chacun de nous, d'affiner notre pensée politique afin d'enrichir le débat qui devra se faire sur la place publique. N'oublions jamais que nous sommes en démocratie.

  • Archives de Vigile Répondre

    28 avril 2014

    "Ce que vous écrivez est connu, documenté, on a même une commission d’enquête et malgré cela les Québécois ont voté pour les libéraux. Surréaliste, navrant, décourageant tout ça grâce à l’ignorance d’abord et avant tout."
    @ madame Deschênes,
    Je ne suis pas certain du tout que l'ignorance y soit pour beaucoup dans le résultat des dernières élections.
    Que dire de la protection d'une vie que l'on considère très satisfaisante et d'un statut social que l'on considère enviable et qu'on a pas du tout envie de risquer dans un référendum?
    J'avance même l'hypothèse qu'à la dernière élection, les Québécois ont dit que le temps des projets collectifs était désormais du passé et que l'avenir était au chacun pour soi, à l'individualisme et au "plus fort la poche".
    Voilà, je crois, la véritable raison des résultats que nous a donnés cette élection.
    Je peux citer le journaliste Christian Rioux qui, à la suite des élections, a signé un article intitulé "Le vieux clocher". Dans cet article, monsieur Rioux, de façon très perspicace, écrit ce qui suit:
    "Une mondialisation qui a déclenché à la faveur des techniques nouvelles un vent d’individualisme sans précédent qui ébranle jusqu’aux vieux patriotismes européens. Ce n’est pas dans les publicités d’Apple et les clips de YouTube qu’on apprend les idéaux collectifs surtout quand, depuis vingt ans, on a livré sa jeunesse pieds et poings liés au marché."
    http://www.vigile.net/Le-vieux-clocher
    Alors, si cette mondialisation du Système ébranle jusqu'aux vieux patriotismes européens et impose l'individualisme même dans les vieux pays, on peut imaginer la transformation que la pression du Système impose au Québec, surtout auprès des jeunes générations.
    Cependant, je vais redire ce que j'ai déjà dit dans d'autres commentaires. Une société formée d'individus dépourvus d'identité et d'un minimum de sentiment d'appartenance à une nation et à une ethnie, et ne vivant que le chacun pour soi, ne tient habituellement pas très longtemps.
    Il y a eu de ce genre de société dans l'Antiquité, comme à l'époque de Noé et de l'Atlantide par exemple. Ces sociétés furent emportées par des cataclysmes naturels. Un dénouement semblable pour nos sociétés présentes n'est pas à exclure et est même peut-être plus proche que l'on se l'imagine, à moins d'un revirement drastique de la situation qui pourrait nous épargner un tel dénouement.

  • Marcel Bernier Répondre

    28 avril 2014

    @ Mireille Deschênes
    Vous avez parfaitement raison de souligner le vote irrationnel de certains de nos concitoyens et de nos concitoyennes.
    D'ailleurs, le premier à démontrer qu'il avait des réflexes ancrés dans la peur fut le leader de la formation libérale lui-même : bel exemple pour la génération montante de voir un des nôtres avoir des sueurs froides face à son ombre.
    D'ailleurs, il s'est pointé à Ottawa rencontrer Harper dans le but évident de démontrer à son électorat que la peur se gère en se réfugiant dans les bras tutélaires de la bonne figure paternelle. En fait, il nous a seulement démontré qu'il pouvait être un excellent « shoe shine boy »: un cireur de pompes, en bon français.
    Nos adversaires politiques savaient que Pierre-Karl Péladeau – pour eux le diable en personne –, en étant nommé président du conseil d'administration d'Hydro-Québec, se dirigeait allègrement vers la députation.
    Ils ont choisi de miser sur ce qu'ils considèrent comme l'antidote à l'influence du succès de cet homme d'affaires auprès des Québécoises et des Québécois : l'argument d'autorité. Les deux triades de médecins et d'économistes devraient, dans leur esprit embrumé, pouvoir effectuer le job et ramener le troupeau vers les verts pâturages du statu quo du néolibéralisme.
    La bataille du Québec pour son émancipation nationale continue avec de nouveaux acteurs, et les paramètres de la lutte pour la reconnaissance prend un nouvel essor. Et c'est ce à quoi nous devrions assister dans un futur pas si lointain. Sans peur et sans reproche! Avec, comme arme, la beauté de la « french rule », qui permet à nos orphelins du colonialisme anglais de vivre enfin comme des êtres libres.

  • Pierre Cloutier Répondre

    28 avril 2014

    Monsieur Bernier,
    Tout dépend sous quel angle on voit les choses. Moi je n'en veux pas aux fédéralistes d'aimer leur pays et de vouloir le protéger et le défendre. Je n'ai aucun problème avec cela. Par contre, j'en veux beaucoup aux élites péquistes d'avoir manqué de courage en laissant passer 4 élections - 4 élections monsieur Bernier - sans avoir fait une proposition d'indépendance nationale au peuple québécois et après cela d'être tout surpris quand les fédés jouent - avec raison et avec succès - la carte du "référendum". Sont idiots ou quoi?
    A qui la faute? Quand on traite l'indépendance comme une maladie honteuse, ne trouvez-vous pas cela normal que le peuple n'ait pas le goût de voter pour des hypocrites?
    Nous avons 4 ans devant nous pour faire la défense et l'illustration du pays et c'est au Parti Québécois que cela doit se faire. Si vous et d'autres ne comprenez pas cela, alors rien ne se passera et on continuera de tourner en rond et de s'épuiser inutilement avec de savantes analyses qui tournent à vide.
    Quand on veut un pays, on le met sur la table. Point final. Le reste c'est juste du bla bla. N'êtes-vous pas écoeuré du bla bla sur à peu près tout, sauf sur l'essentiel qui est une proposition formelle d'indépendance au peuple québécois, le matin, le midi, le soir, avant, pendant et après les élections?
    Est-ce clair ou il faudrait que j'invente une autre langue pour me faire comprendre? Cela ne donne strictement à rien de crier sur les toits que les libéraux sont des gros méchants. On le sait. So what? C'est à nous de changer, pas à eux. De toute façon, eux, ils ne changeront pas. Ils viennent de gagner.

  • Archives de Vigile Répondre

    28 avril 2014

    Bonjour et merci pour ce papier.
    Ce que vous écrivez est connu, documenté, on a même une commission d'enquête et malgré cela les Québécois ont voté pour les libéraux. Surréaliste, navrant, décourageant tout ça grâce à l'ignorance d'abord et avant tout.
    Depuis le retour du PLQ tout recommence de plus bel, a commencé par mettre au poubelle les cours d'histoire nationale, qui fait partie du problème. La gouvernance souverainiste nous a plongé en plein drame et ce pour quatre longues années. Les libéraux sont tout sourire, fendants et pour cause.
    Comment faire pour limiter les dommages surtout qu'au PQ on est encore a discuter sur le comment se sortir de là alors que je ne vois qu'une solution celle d'assumer notre désir profond d'être indépendant, si nous perdons après avoir démontré aux Québécois que c'est nécessaire pour que le Québec se développe alors nous vivrons avec. L'heure n'est plus à chercher des faux fuyants l'heure est de réfléchir à un plan pour rejoindre tous les Québécois partout en parlant le langage du peuple, car à l'école, on a pas appris à être fier de la nation, les Québécois doivent apprendre d'où ils viennent pour savoir où aller et ce malgré les forces pour les s'en éloigner le plus possible.