André Pratte et l'Écosse indépendantiste

Écosse et indépendance

[André Pratte dit n'importe quoi pourvu que ça l'arrange et que ça arrange Gesca->3568].

Il crée l'impression qu'en faisant des concessions à l'Écosse, Tony Blair n'a fait qu'attiser les "braises indépendantistes". C'est du langage d'amateur.

Tony Blair n'a rien attisé. Il a seulement constaté que l'Écosse, le Pays de Galles et l'Irlande du nord tendaient naturellement vers les statuts d'États reconnus et il a
décidé d'obtempérer. Ces statuts s'appuient sur les progrès matériels, économiques, sociaux et politiques de l'Écosse, l'Ulster et le Pays de Galles, progrès contemporains fondés sur les prises de conscience qui résultent des nouvelles communications et d'un niveau d'instruction de plus en plus élevé chez les Irlandais, les Gallois et les Écossais. Plus une population est instruite, plus elle réclame de pouvoirs.

Avec le Union Act de 1707, le pouvoir impérial de Londres a tenté de fossiliser l'Irlande, l'Écosse et le Pays de Galles une fois pour toutes. La politique du ONE NATION, ONE FLAG, ONE QUEEN OR KING, avec inféodation absolue à un pouvoir centralisateur et unitaire, n'a fait qu'un temps. L'arbitraire ne peut combattre indéfiniment les États naturels que tentent de faire disparaître les pouvoirs impériaux centralisateurs. Ce sont les pouvoirs impériaux qui sont appelés à disparaître, à mesure que changent les jeux d'intérêts et de rapports de forces. Sociétés territoriales, les États naturels, dont l'Écosse, l'Ulster, le Pays de Galles et aussi le Québec, finissent par avoir le dernier mot.

Ni l'Écosse, ni l'Irlande, ni le Pays de Galles n'ont existé par l'Angleterre, avec l'Angleterre et pour l'Angleterre. Ces pays ont eu une existence propre longtemps avant d'être inféodés au pouvoir de Londres, qui a tenté tout ce qu'il a pu pour fossiliser les peuples celtiques des Iles Britanniques.

Mais les pouvoirs impériaux oublient que la géographie a été et demeure un facteur de différenciation, tant dans l'espace que dans le temps. L'Écosse n'est pas seulement le foyer national d'un peuple distinct des Anglo-Saxons: c'est aussi un État qui a été presque fossilisé au cours des deux derniers siècles par la volonté impériale de Londres. De même pour l'Irlande et le Pays de Galles.
La nature qui a servi à la genèse et au développement original de ces peuples celtiques a fini par avoir le dernier mot. Certes, les événements qui entourent la formation des États exigent beaucoup de temps mais les temps sont mûrs pour l'apparition en nombre de nouveaux États partout dans le monde maintenant. Cette tendance naturelle, liée aux nouvelles communications et aux technologies miniaturisées, favorise le développement d'États de taille modeste mais capables de fonctionner et de vivre confortablement, pour le plus grand bonheur de leurs citoyens. C'est Stéphane Dion qui a vanté l'État naturel, selon Gottlieb Herder, devant le London School of Economics. Savait-il au moins de quoi il parlait?

Le pouvoir est complètement dans ses communications. Les gros pouvoirs impériaux et post-impériaux qui se sont constitués pendant la seconde moitié du 18e et tout le 19e siècles ont exploité les développements de la machinerie à vapeur et sa technologie lourde. Sans la machine à vapeur, ni l'Empire britannique ni les autres empires coloniaux ni les nouveaux empires, dont la Russie et l'Allemagne, n'auraient jamais existé, ni le Canada et les États Unis non plus. Que les chemins de fer, qui ont servi à inféoder la Chine aux empires coloniaux, se soient retournés contre ces empires est tout à fait naturel. Que les chemins de fer et navires à vapeur aient servi à faire avancer de nombreuses régions sur le plan économique et politique, voilà qui est également naturel.

La renaissance de l'Écosse, l'Irlande et le Pays de Galles et leur croissance en force ont récemment augmenté avec l'arrivée des nouvelles communications, dont le camion, l'auto, l'avion, la télévision, les ordinateurs, les satellites et les instruments de communications de plus en plus miniaturisés et perfectionnés.

Ces communications sont en train d'horizontaliser le monde actuel et à venir. Les grandes pyramides économiques et politiques du temps des machines lourdes sont appelées à tomber.

Tout cela est naturel et qualifier ces phénomènes de "séparatisme" est de l'ignorance crasse, digne de La Presse d'André Pratte, qui sait que son journal est condamné et qui dit n'importe quoi pour assurer sa survivance.

Ces problèmes politiques d'envergure, comme ceux que Londres doit maintenant régler avec compétence et intégrité, ce sont des problèmes de STATUTS, des problèmes d'État, non des questions idéologiques superficielles, comme le rapporte André Pratte, comme si la politique était encore une affaire d'arbitraire, comme ce fut le cas pendant toute la période des empires qui sont en train de mourir de leur seconde mort.

La différence entre Tony Blair et André Pratte se situe au niveau de la maturité politique. Tony Blair a vu que les temps ont changé. Il voit que les temps continuent de changer. C'est lui qui a fait plier la Reine lors de la mort tragique de Diana Spencer et a forcé les Royals à se présenter respectueusement à ses funérailles. Voir à ce sujet le film The Queen au Atwater. Trop avancé pour La Presse.
C'est lui, Tony Blair, qui a appuyé la candidature de Sean Connery pour le titre de noblesse que la Reine lui a accordé et la Reine a obtempéré. De plus, la Reine a reconnu Michael Jean comme gouverneure générale du Canada peu importe qu'elle ait été "indépendantiste du Québec ou non". Le précédent de Sean Connery était suffisant pour que tous ceux et toutes celles qui ont un peu d'intelligence comprennent qu'il s'agit pour l'Angleterre comme pour la Monarchie de s'adapter à des conditions nouvelles comme il se doit lorsque les temps changent. Il n'y a que les imbéciles qui s'accrochent aux discours désuets.

Tony Blair et la Reine Élizabeth savent que les temps ont changé et que Londres doit composer en conséquence.

On ne peut en dire autant de La Presse ni d'André Pratte. Si le but des Orangemen et United Empire Loyalists qui ont fondé à Ottawa un État centralisateur et unitaire était de fossiliser le Québec, ils ont bien réussi avec les Desmarais, Pratte et Cie.

René Marcel Sauvé, géographe, spécialisé en géopolitique et auteur de Géopolitique et avenir du Québec.

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J. René Marcel Sauvé, géographe spécialisé en géopolitique et en polémologie, a fait ses études de base à l’institut de géographie de l’Université de Montréal. En même temps, il entreprit dans l’armée canadienne une carrière de 28 ans qui le conduisit en Europe, en Afrique occidentale et au Moyen-Orient. Poursuivant études et carrière, il s’inscrivit au département d’histoire de l’Université de Londres et fit des études au Collège Métropolitain de Saint-Albans. Il fréquenta aussi l’Université de Vienne et le Geschwitzer Scholl Institut Für Politische Wissenschaft à Munich. Il est l'auteur de [{Géopolitique et avenir du Québec et Québec, carrefour des empires}->http://www.quebeclibre.net/spip.php?article248].





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