Bioéthique: une défaite de la raison

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« Les jeunes générations ne peuvent comprendre les roueries des déconstructeurs des années 80 qui sont à la manœuvre de la machine idéologique. »


 

 



Les débats actuels sur la loi bioéthique – ouvrant la PMA à toutes les femmes – sont l’aboutissement des manœuvres d’une machine à décerveler qui vient de loin. Une étrange défaite.






La machine à décerveler fonctionne à plein régime pour faire adopter la loi sur la PMA. Nous étions habitués aux pépites de Mesdames Schiappa et Buzyn, de Monsieur Touraine ainsi que de Madame le Garde des Sceaux. On est passé à la vitesse supérieure, avec la tenue de la Commission préparatoire de bioéthique, ouverte le 10 septembre, et un premier vote, à l’Assemblée Nationale, sous la présidence de Monsieur Ferrand, le 26 septembre, qui fait aujourd’hui polémique.


Suite logique du mariage pour tous


Le 28 août 2019, une séance donne le ton technicisé de ce projet de loi. Jean-Louis Touraine et le professeur René Frydman sont à la manœuvre. Jean-Louis Touraine se félicite du progrès sociétal que représente la PMA, tout en regrettant que le progrès n’ait pas pris ses bottes de sept lieues. Lui fait écho la voix mesurée, bienveillante, de René Frydman, ouvert aux réticences de certains et répondant avec la précision d’un spécialiste de la fécondité. Plaisir de princes que ce duo préliminaire se félicitant de l’avancée que représente la production, à grande échelle, d’enfants sans père ! La parole est ensuite donnée à des intervenants clairsemés assis à des tables de formica. Au tour d’une spécialiste de la chose linguistique de parler : Claire Hugonnier, doctorante à l’Université Grenoble Alpes, en sciences du langage estampillées par le laboratoire Lidilem, et auteur d’un travail intitulé « Du discours religieux au discours haineux. Le cas de la PMA. » Elle lit une étude besogneuse du discours homophobe ambiant, devenu plus agressif et moins cernable depuis le mariage pour tous, selon elle. Avec un léger sourire, Madame Agnès Firmin Le Bodo ramène l’intervenante au temps de l’horloge. Un intervenant recadre Madame Hugonnier.


Question : Comment ont été choisis ces intervenants venus d’on ne sait où, affiliés à des groupes de pression, parlant d’une voix confuse, tous acquis, sauf deux, à une loi qui concerne l’avenir de notre progéniture ?


Agnès Buzyn, c’est Agnès de l’Ecole des femmes!


Dans le discours public, on le vérifiait quotidiennement, chacun tenait son rôle. Madame Schiappa, celui du dérapage contrôlé. Monsieur Touraine, celui de la provocation. Madame Buzyn, elle, c’était un peu Agnès dans l’Ecole des femmes : car enfin, qui croyait qu’elle avait réellement la naïveté d’ignorer la différence entre enfants nés de PMA, et famille homoparentale ? La confusion voulue banalise une idée existante. De même, quand Madame Buzyn répond à l’Académie de Médecine que ses réticences sont « datées » ce n’est pas irrespect et ignorance : Madame Buzyn s’adresse à son public progressiste. Et selon les enquêtes récentes de Jérôme Fourquet, notre jeunesse est à fond la caisse pour la PMA et la société participative du cross funding. 


« Entrer en idéologie » c’est comme « entrer en religion » : c’est accepter d’être moqué. Madame le Garde des Sceaux assume. L’histoire des mères 1 et 2 puis mère et mère, est à ce titre d’une grande habileté. Désormais, la compagne de la mère qui accouche n’aurait plus besoin d’adopter l’enfant de sa compagne. En décalquant à l’identique le mariage lesbien sur le mariage hétérosexuel avec sa présomption de paternité, on supprime l’argument majeur contre la filiation lesbienne. Avec l’adoption, en effet, on détournait de sa finalité l’adoption qui est de remédier à un malheur de la vie. Avec la mère et la mère, l’Etat ne peut plus être « accusé » de créer des enfants « adoptables. » 


Les déconstructeurs à la manœuvre


Autre projet, dans cette commission préparatoire, deux amendements autorisent les établissements de santé privés à but lucratif, à conserver les gamètes en vue de la PMA. Voilà résolu le problème de la gratuité du don et de sa pénurie.


 

On dit avec raison que l’idéologie prospère sur l’ignorance. Les jeunes générations ne peuvent comprendre les roueries des déconstructeurs des années 80 qui sont à la manœuvre de la machine idéologique. Leur esprit critique n’a pas été formé, et ce n’est pas leur faute. Les responsables, c’est la génération des Trente Glorieuses qui n’a pas transmis ce qu’elle avait reçu au moment où tout basculait dans la société : le savoir, la maîtrise de la langue, l’étude de grands auteurs qui musclent la pensée. Or, les héritiers de 68 avaient tout : la paix, le savoir, l’emploi, au point que le jeu intellectuel de la déconstruction était particulièrement jouissif.




Un vote contesté


Quand la bise fut venue, ils ont fui les barricades pour une « retraite bien méritée » en choisissant la bien-pensance. À présent, le cynisme du discours peut s’étaler au grand jour. À quoi sert un père ? Telle est la question que ne se pose même plus le peuple accro à ses tablettes. Pourtant, pas besoin d’avoir fait bac plus 10 pour répondre. Le bon sens élémentaire suffit. À quelle étrange défaite de la raison assistons-nous en France ?


Le 25 septembre a été adopté à l’Assemblée Nationale, sous la présidence de Monsieur Ferrand, à mains levées, recroquevillées sur des doigts paralysés, l’amendement 21231 qui a fait polémique. Et hop ! Évaluant à la louche les mains vite baissées, le président Ferrand a déclaré « adopté » l’amendement. Tollé dans l’hémicycle. Ferrand a dû accorder les deux minutes demandées par les députés pour parler de cette pratique problématique qui augure mal de la suite.