Autant la rue, où sont déjà descendus plusieurs milliers de Québécois, que les sondages le disent: le budget Bachand ne passe pas dans l'opinion publique. Déjà élevée, l'impopularité du gouvernement de Jean Charest bat des records, ce qui semble par ailleurs être le moindre de ses soucis. Étonnant de la part d'un politicien aguerri.
Il est vrai que ce gouvernement avait des choix difficiles à faire au moment de rédiger ce budget 2010. L'état dans lequel se trouvent les finances publiques du Québec au lendemain de la récession exigeait que soient mises en place des mesures de redressement. Ne rien faire n'étant pas une option possible, le premier ministre et le ministre des Finances, car ce budget a été écrit à quatre mains, ont choisi de mettre le cap sur l'équilibre budgétaire en trois ans, rejetant l'étalement de l'effort sur une plus longue période comme l'a fait l'Ontario.
Courageux, ce budget? Sans doute faut-il une bonne dose d'audace pour imposer aux contribuables un si lourd fardeau, mais le geste reste quand même difficile à expliquer du point de vue de la chose politique, où les politiciens au pouvoir cherchent à trouver le juste équilibre entre les politiques à mettre de l'avant et la capacité des citoyens à y adhérer. L'ancien premier ministre Robert Bourassa était un maître de cet art. Jean Charest a, lui, ignoré ces règles de base de la politique.
Pourquoi avoir fait un tel choix? Le sondage Léger Marketing-Le Devoir dont nous avons publié les résultats hier nous suggère la seule réponse apparemment logique. Déjà très impopulaire, le gouvernement libéral n'a rien à perdre à provoquer l'opinion publique un peu plus. Depuis le mois de janvier, tous les indices de popularité des libéraux sont, de fait, en baisse constante. De 40-41 % qu'elles étaient pendant l'année 2009, année de la récession, les intentions de vote pour le Parti libéral sont graduellement passées en janvier à 39 %, puis à 37 % en février, à 32 % en mars, et maintenant à 30 %. Pendant la même période, le taux d'insatisfaction à l'endroit du gouvernement est passé de 58 % à 77 % et la confiance envers Jean Charest est passée de 29 % à 17 %.
Depuis quatre mois, tout ce que fait — ou ne fait pas — ce gouvernement se retourne contre lui, qu'il s'agisse de la crise des urgences dans les hôpitaux, de l'octroi des places dans les garderies ou de son refus d'instituer une enquête publique sur les problèmes dans la construction. Sa crédibilité est sérieusement entachée, à tel point que sa capacité de communiquer avec les Québécois est amoindrie. Le budget Bachand est venu ajouter à la difficulté en raison non seulement des sacrifices demandés, mais aussi de l'abandon de référents communs. Difficile de comprendre que pour cette taxe de la santé qui atteindra 200 $ par personne l'on rejette le caractère progressif de l'impôt, un principe que tous les gouvernements québécois ont partagé ces 50 dernières années.
Aujourd'hui, il n'y a pas de dialogue qui semble possible. D'emblée, les porte-parole gouvernementaux, le ministre Raymond Bachand en tête, refusent toute révision des mesures budgétaires. Néanmoins, il faudra y venir, ne serait-ce que parce que la popularité est un oxygène dont un politicien ne peut se passer sans risquer de s'asphyxier. Les prochaines élections ne sont que dans trois ans, ce qui donne un espace-temps pour reconstruire l'image de ce gouvernement, mais curieusement, le budget 2010 a parsemé sur la route libérale plusieurs obstacles, comme les hausses de la TVQ en 2011 et en 2012, la taxe sur la santé qui atteindra son plafond de 200 $ en 2013, puis les hausses des tarifs d'électricité à compter de 2014. La route demeurera cahoteuse.
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