Crise au Parti québécois

Danger: femme au pouvoir

Les parcours des femmes parvenues aux hautes cimes des responsabilités sont semés d'embûches, et leur ascension est sous haute surveillance

Qu'en pensent les électeurs québécois?



Autour de la crise qui secoue le Parti québécois et sa chef Pauline Marois, on a fait silence jusqu'ici sur un aspect délicat des choses, car au Québec, bien sûr, le féminisme a fait des pas de géant.
Et pourtant... Tous les prétextes sont bons pour abattre la femme qu'est Pauline Marois, la forcer à renoncer, à rentrer dans ses terres. Et ce, depuis plus longtemps que les derniers et éprouvants épisodes et au-delà de tout ce qu'on pourra trouver pour expliquer les démissions fracassantes, les cruels manques de loyauté, l'absence douloureuse de solidarité!
Il y a certes de sérieuses questions à débattre ces temps-ci, et les discussions ne touchent pas que le Parti québécois, même si la culture politique de ce dernier les a toujours encouragées. Les indépendantistes qui souffrent depuis longtemps de l'étapisme et de l'électoralisme ont tout à fait le droit de souhaiter un retour ferme à l'option de base du PQ, alors que la volatilité de l'électorat québécois exigerait de tous les partis plus de clarté et moins d'opportunisme populiste.
Derrière la plupart des réactions qui ont déclenché les dernières salves à l'égard de Mme Marois se profilent la soif inextinguible de pouvoir chez certains hommes et la mesquinerie de ces femmes qui refusent d'accorder leur confiance à l'une des leurs. Les attaques tombent sur elle cette fois, mais était tout aussi discriminatoire, on s'en souviendra, le rejet d'André Boisclair...
On a d'abord reproché à Pauline Marois ses vêtements et ses bijoux, sa prestance et sa fierté, taxées à tort de snobisme, son aisance financière aussi, laquelle devient admirable chez François Legault. Il a réussi, dira-t-on!
Puis, voyant qu'elle continuait d'avancer, on est passé à un autre niveau. Si elle dénonce avec vigueur, dans son rôle de chef de l'opposition officielle, des situations outrancières ou abusives, on dira qu'elle est beaucoup trop agressive. Quand, par contre, elle s'exprime avec tact et douceur, on dit qu'elle défend mollement ses dossiers, sans conviction. L'un des reproches les plus cinglants que lui auront adressés ses faux amis, c'est d'avoir voulu imposer un encadrement rigoureux à ses députés!
Doit-elle rester uniformément gentille devant le parti qui «tient le volant»? Restera-t-elle simplement attristée par les dérives de ses ex-collaborateurs à l'ego surdimensionné, dont les «beaux-pères» qui ont pourtant déjà joui du pouvoir? Demeurera-t-elle indifférente aux velléités de celui qui, reniant ses anciennes croyances, grappille sans scrupule dans les meilleures idées des partis adverses?
Pourquoi n'ont-ils pas choisi, les uns et les autres, de travailler à l'intérieur du parti qui les avait accueillis, cherchant l'unité plutôt que la division? Poser la question ramène inévitablement au propos de ce texte.
Après des années de luttes féministes, il est encore difficile pour une femme de se maintenir au sommet, même si certaines semblent heureusement mieux s'en tirer. De nombreuses études sociologiques l'affirment d'ailleurs: les parcours des femmes parvenues aux hautes cimes des responsabilités sont semés d'embûches, et leur ascension est sous haute surveillance.
Ce qui endiguera à la longue, souhaitons-le, le flot des malveillances à son égard, c'est la dignité et la détermination de Pauline Marois. Forte de l'appui de la majorité des membres de son parti, elle acceptera, c'est tout à son honneur, de faire sans complaisance les compromis et les rapprochements qui s'imposent.
Une femme au pouvoir? Oui, pourquoi pas, enfin! Pauline Marois a tout ce qu'il faut de savoir-faire et d'expérience pour devenir la première femme première ministre du Québec, une victoire considérable et symbolique en Amérique du Nord.
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Francine Lavoie, Québec


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