AVORTEMENT
- Cause Henry Morgentaler, 1988
5 juges contre 2
La Cour suprême invalide au nom de la Charte la section du Code criminel obligeant une femme à obtenir la permission d'un comité thérapeutique avant d'obtenir un avortement. Contrevenir à la loi valait à la femme deux ans de prison, et la perpétuité pour l'avorteur.
«Forcer une femme, sous la menace d'une sanction criminelle, à mener un foetus à terme à moins qu'elle ne satisfasse à des critères sans rapport avec ses propres priorités et aspirations est une ingérence grave à l'égard de son corps et donc une violation de la sécurité de sa personne», écrit le juge en chef d'alors, Dickson.
Placé devant un vide juridique, le gouvernement de Brian Mulroney a proposé un projet de loi pour rebaliser l'avortement, qui n'a jamais pu être adopté. Depuis, le Canada n'a aucune loi en la matière.
- Cause Chantal Daigle c. Jean-Guy Tremblay, 1989
9 juges unanimes
La Cour suprême tranche qu'un homme ne peut pas empêcher son ex-conjointe, enceinte de lui, de se faire avorter. Le tribunal conclut que le foetus n'a aucun droit reconnu par la législation tant qu'il n'est pas mené à terme, et que le futur père ne peut donc pas avoir de prétention sur lui.
- Cause de Mme G., 1997
7 contre 2
Les autorités manitobaines veulent imposer à une femme enceinte toxicomane une cure de désintoxication pour protéger son enfant à naître. La Cour suprême tranche une fois de plus en faveur de la femme.
La juge en chef Beverley McLachlin écrit: «Une ordonnance prescrivant la détention d'une femme enceinte pour protéger le foetus nécessiterait des changements aux règles de droit qui ne sont pas du ressort des tribunaux, mais du législateur.» La juge rappelle dans son jugement qu'en le faisant, la Cour ouvrirait une boîte de Pandore: un foetus ressentant un malaise pourrait-il poursuivre le médecin ou sa mère? Un foetus mort dans un accident de voiture pourrait-il obtenir compensation d'un assureur? «Si l'enfant à naître est une personne juridique titulaire de droits, des arguments peuvent être formulés à l'appui de toutes ces propositions. Certains pourront souscrire à une telle évolution, d'autres la déploreront. Il reste qu'il s'agit d'une modification substantielle aux conséquences multiples qui placerait les tribunaux au coeur d'un épineux débat d'ordre moral et social relevant davantage des élus que des tribunaux.»
HOMOSEXUALITÉ
- Cause Egan, 1995
5 contre 4
C'est probablement la cause qui fait le plus rager les critiques de l'activisme judiciaire. La demande d'un homosexuel visant à profiter de la pension de vieillesse de son conjoint décédé est rejetée, mais la Cour suprême reconnaît pour la première fois l'homosexualité comme un motif non acceptable de discrimination, bien que n'étant pas mentionnée dans la Charte.
«L'orientation sexuelle est une caractéristique profondément personnelle qui est soit immuable, soit susceptible de n'être modifiée qu'à un prix personnel inacceptable et qui, partant, entre dans le champ de protection de l'article 15 parce qu'elle est analogue aux motifs énumérés», écrivent les juges.
- Cause Vriend, 1998
8 contre 1
La Cour suprême ajoute l'homosexualité à la liste de motifs de discrimination interdits à la Loi sur la protection des droits individuels albertaine à la suite du congédiement d'un homme pour cause d'homosexualité.
- Cause M. c. H., 1999
8 contre 1
La Cour suprême reconnaît le droit à une pension alimentaire pour des partenaires homosexuels.
- Renvoi du gouvernement fédéral, 2004
La Cour suprême donne son imprimatur à l'avant-projet de loi fédéral sur le mariage entre conjoints de même sexe, mais les juges invoquent leur «pouvoir discrétionnaire» pour refuser de répondre à la quatrième question, à savoir si la définition traditionnelle du mariage est contraire à la Charte.
SUICIDE ASSISTÉ
- Cause Rodriguez, 1993
5 contre 4
Atteinte d'une maladie dégénérative incurable, Sue Rodriguez demande le droit d'obtenir de l'aide pour mettre fin à ses jours. La Cour suprême le lui refuse.
Pour la majorité, le juge Sopinka écrit: «Bien qu'elle fonde sa demande sur l'atteinte à ses droits à la liberté et à la sécurité de sa personne, on ne peut dissocier ces intérêts du caractère sacré de la vie, qui est une des trois valeurs protégées par l'article 7 de la Charte.»
FESSÉE
- Cause Canadian Foundation for Children, Youth and the Law, 2004
6 contre 3
La Cour suprême conclut que les sections du Code criminel permettant la fessée des enfants ne sont pas contraires à la Charte.
«Le choix du législateur de ne pas criminaliser cette conduite n'est ni dévalorisant pour les enfants ni discriminatoire envers eux; il est conforme à la réalité de leur vie en répondant à leur besoin de sécurité d'une manière appropriée à leur âge», écrit Mme McLachlin.
KIRPAN
- Cause Multani, 2006
7 à 0
La Cour suprême tranche qu'un étudiant a le droit de porter son kirpan à l'école.
«La tolérance religieuse constitue une valeur très importante au sein de la société canadienne. Si des élèves considèrent injuste que Gurbaj Singh puisse porter son kirpan à l'école alors qu'on leur interdit d'avoir des couteaux en leur possession, il incombe aux écoles de remplir leur obligation d'inculquer à leurs élèves cette valeur qui est à la base même de notre démocratie», affirme la juge Louise Charron. «La prohibition totale de porter le kirpan à l'école dévalorise ce symbole religieux et envoie aux élèves le message que certaines pratiques religieuses ne méritent pas la même protection que d'autres», renchérit-elle.
AIDE SOCIALE
- Cause Gosselin, 2002
5 à 4
Une prestataire québécoise de l'aide sociale de 27 ans, qui jugeait discriminatoires les prestations moindres accordées aux moins de 30 ans, est déboutée en Cour suprême.
«Cette politique, écrit Beverly McLachlin, traduit la sagesse pratique du vieux proverbe chinois qui dit: "Donne un poisson à un homme, il aura à manger pour un jour; apprends-lui à pêcher, il pourra se nourrir toute sa vie." Cette mesure ne constituait pas une négation de la dignité des jeunes adultes, mais bien au contraire la reconnaissance de leur potentiel.»
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