Et pourtant, elle penche...

ECR - le cas du Collège Loyola


Le jugement de la Cour supérieure sur l'exemption demandée par une école anglophone privée pour le cours d'éthique et culture religieuse est consternant. La mise en avant de la primauté de Dieu devant la laïcité des institutions scolaires est un symbole important de la réalité du multiculturalisme et de son relativisme total.
Donner une perspective religieuse à tout cours est une négation même de la raison d'être de l'école: former des citoyens critiques, pouvant juger eux-mêmes de ce qui est bien et de ce qui doit être fait. La construction d'un carcan catholique ou de quelque autre vision autour des apprentissages limite les possibilités de développement du jugement critique et de la réflexion rigoureuse. Bref, une telle vision mène à la reproduction mécanique de citoyens avec des oeillères et une vision myope.
Pire encore, le juge fait du révisionnisme historique en parlant du procès de l'Église catholique contre Galilée. Le tribunal de sept cardinaux était pourtant clair: «Soutenir que le Soleil, immobile et sans mouvement local, occupe le centre du monde, est une proposition absurde, fausse en philosophie, et hérétique, puisqu'elle est contraire au témoignage de l'Écriture.»
Bref, Galilée a été condamné pour avoir fait fi des oeillères de l'Église catholique, pour avoir outrepassé la myopie religieuse. Il s'est plutôt basé sur des observations, obtenues entre autres méthodes par la construction d'un nouvel instrument optique: le télescope. Ses observations ont été vérifiées par d'autres scientifiques, le modèle héliocentrique copernicien a été confronté à la réalité de l'expérience. C'est seulement ainsi qu'il aurait, selon la légende, ajouté «et pourtant, elle tourne...».
Fausse ouverture
Dans cette cause, le juge a mélangé l'ouverture théorique sur papier prônée par l'école anglophone privée et l'ouverture réelle de la laïcité. L'école anglophone privée, sous son appel à l'ouverture, désire choisir les informations qu'elle donnera aux élèves. Elle veut choisir l'angle des oeillères fournies aux élèves. La laïcité est plutôt une volonté d'enlever ces oeillères et de voir l'ensemble du monde.
Ce jugement montre encore une fois que tout jugement fondé sur la Charte canadienne et le multiculturalisme penche du même côté, celui des droits individuels religieux contre les droits communs du vivre ensemble. D'ailleurs, quelle est la prochaine étape? Est-ce que l'évolution sera remise en cause en vertu de la «primauté de Dieu», comme dans plusieurs États? Est-ce que la vente de condoms sera jugée illégale? Est-ce que l'avortement sera criminalisé de nouveau, comme le souhaite l'Église?
Consternant, alarmant... il est temps que le Québec réagisse. Il est possible de répondre à chaque cas, individuellement, et de s'inquiéter du prochain jugement. Mais il est aussi possible, primordial, de voir la situation d'ensemble.
Pour ce faire, une seule solution existe, en deux étapes. La première: utiliser la disposition dérogatoire systématiquement, sur tous les jugements à caractère multiculturel, afin d'assurer la construction d'un modèle d'intégration réellement québécois. Ensuite: mettre de côté le multiculturalisme pour toujours, mettre en avant la réalité québécoise et ses valeurs, bref, faire notre pays!
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Alexis Gagné-LeBrun - Enseignant en physique, Cégep de Saint-Hyacinthe


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