Qu'on se le tienne pour dit: Madame la ministre du Patrimoine canadien, Bev Oda, est dans «l'impossibilité technique et bureaucratique» de définir les critères qui permettront la distribution des 30 millions de dollars promis ce printemps aux festivals canadiens.
Environ 500 événements au pays, dont près de 200 au Québec, misaient sur ce montant, promis à la faveur du dernier budget Flaherty, pour souffler un peu. Saignés tant par l'interdiction des commandites du tabac que par la mise à mort du tristement célèbre programme des commandites, les festivals réclamaient depuis près de trois ans que l'on renfloue leurs coffres.
C'est donc avec le sourire que le programme promis par la ministre Oda a été accueilli. Voguent les dollars, et que la manne tombe!
Il faut toutefois conclure que bonheur et culture, dans la cour fédérale et en matière de soutien financier, font très mauvais ménage. Les critères d'octroi n'étant pas encore ficelés, la ministre reporte la distribution des bonbons à l'automne, alors que 80 % des grands manitous de festival en seront à peaufiner les bilans... noirs. Depuis, la valse des grincements de dents a repris de plus belle.
On râlerait à moins! Depuis leur accession au pouvoir, les conservateurs de Stephen Harper s'évertuent, on le dirait, à maintenir dans le milieu culturel un certain niveau de grogne. À une montagne de récriminations déjà élevée s'ajoute désormais le report du financement des festivals.
Les quelques mois de sursis que demande la ministre pour dresser une liste équitable des critères d'octroi sont suffisants pour étouffer des festivals déjà saucissonnés dans leurs finances. Quelques gros joueurs ont déjà publiquement grogné. Ils en ont assez de quémander! Ils parlent aussi au nom des petits, qui ne peuvent supporter le moindre bris dans la chaîne de soutien, au risque d'accabler les artisans eux-mêmes.
L'argument technique sur lequel s'appuie la ministre du Patrimoine n'est pas très robuste... Surtout lorsque l'on sait que la Coalition des festivals canadiens a déjà fourni à Mme Oda une liste de critères sanctionnés par le milieu. Quand on sait aussi que Québec a proposé d'utiliser les références dont il dispose, l'espace d'un été.
Dans une -- rare -- entrevue accordée à Radio-Canada récemment, la ministre du Patrimoine s'octroyait une excellente note en matière de défense de la culture, alors que ses détracteurs évoquent plutôt le désastre.
Et c'est sans même glisser dans la sphère linguistique: Bev Oda ne s'exprime jamais en français, ce qui n'a rien pour rehausser sa cote d'amour. La ministre a beau avoir vu cinq fois le film québécois C.R.A.Z.Y. et en avoir raffolé, cela ne vient pas l'absoudre de l'importance de pouvoir communiquer son coup de coeur à ses auteurs... dans leur langue!
La froideur de ces manières ne punit pas seulement une industrie aux finances déjà comprimées. Le poids de «l'impossibilité technique et bureaucratique», c'est le festivalier qui le portera cet été en consentant à un contenu clairsemé et à une réduction des événements gratuits.
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