ROYAUME-UNI

Grande-Bretagne: Liz Truss élue première ministre

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Une anti-Brexit remplace Johnson

 Liz Truss a remporté lundi la course pour devenir première ministre britannique et succéder à Boris Johnson, avec pour défi immédiat de s’attaquer à la crise historique du pouvoir d’achat qui frappe le Royaume-Uni.


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Âgée de 47 ans, Liz Truss sera la troisième femme à diriger le gouvernement britannique, après Margaret Thatcher et Theresa May.


Sans surprise, la ministre des Affaires étrangères s’est imposée face à son ancien collègue des Finances Rishi Sunak, à l’issue d’un vote par correspondance réservé aux adhérents du Parti conservateur, lequel a été déclenché par la démission début juillet de Boris Johnson, acculé au mur après des scandales à répétition.


Elle a recueilli 81 326 voix (57%) contre 60 399 pour son rival (43%), selon les résultats communiqués par Graham Brady, responsable de l’organisation du scrutin.


«Je présenterai un plan audacieux pour réduire les impôts et faire croître notre économie», a promis Liz Truss, après l’annonce de sa victoire.



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«Je m’attaquerai à la crise énergétique en m’occupant des factures d’énergie des gens, mais aussi en m’occupant des difficultés à long terme d’approvisionnement en énergie», a-t-elle ajouté, promettant une «grande victoire» à son parti lors des législatives prévues en 2024.


Élue cheffe du parti par les adhérents qui ont pris part au vote, elle va, en vertu du système parlementaire britannique, accéder au pouvoir en raison de la majorité dont bénéficient les «Tories» à la Chambre des communes.


Restée fidèle jusqu’au bout à Boris Johnson quand les démissions au sein de l’exécutif se comptaient par dizaines, Liz Truss va entrer à Downing Street dans un contexte économique et social explosif, marqué par une inflation qui dépasse les 10% et une hausse exorbitante des factures d’énergie qui étrangle familles, entreprises et services publics.



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Dans ce contexte, Liz Truss ne dispose d’aucun répit pour se montrer convaincante, à deux ans des législatives de 2024 où l’opposition travailliste – qui dispose d’une nette avance dans les sondages – espère déloger les conservateurs au pouvoir depuis 2010.


Grogne sociale


Elle devra aussi composer avec l’ombre de Boris Johnson, qui manque déjà à certains membres du Parti conservateur – plus masculins, âgés et blancs que la moyenne des Britanniques – et qui n’a pas exclu un retour en politique.


Boris Johnson ira dès mardi remettre sa démission à Élisabeth II dans sa résidence d’été de Balmoral en Écosse, une première pour la souveraine de 96 ans, qui a du mal à se déplacer et ne fera pas le voyage à Londres.


Liz Truss suivra pour devenir la 15e cheffe de gouvernement des 70 ans de règne du monarque, avant de rentrer à Londres pour prononcer son premier discours devant le 10, Downing Street, et former son gouvernement.



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Dans une campagne marquée très à droite, parfois au point de sembler déconnectée de l’aggravation dramatique de la crise pendant l’été, Liz Truss, tardivement convertie au conservatisme comme au Brexit, a séduit en promettant des baisses d’impôt massives et en adoptant un ton très dur contre les syndicats.


Pourtant le préféré des députés conservateurs, Rishi Sunak, richissime ex-banquier, a peiné à séduire la base du parti en prônant un réalisme économique loin des «contes de fées», et il a été vu comme un technocrate donneur de leçons incapable de comprendre les difficultés des ménages.


Dimanche, Liz Truss a assuré sur la BBC que si elle était élue, elle agirait «dès la première semaine» pour aider les Britanniques avec leurs factures d’énergie, refusant toutefois de préciser la nature concrète des mesures qu’elle comptait prendre.



AFP


Si elle est populaire auprès des conservateurs, 52% des Britanniques estiment qu’elle sera une mauvaise, voire une très mauvaise première ministre, selon un récent sondage YouGov. Pas sûr, donc, que ces vagues promesses suffiront à calmer la grogne sociale qui agite le pays comme jamais depuis les années Thatcher (1979-1990).


Boris Johnson appelle son parti à l'unité


Le premier ministre britannique sortant Boris Johnson a appelé lundi le Parti conservateur à se rassembler «à 100%» derrière Liz Truss.


«Il est maintenant temps pour tous les conservateurs de la soutenir à 100%», a tweeté le dirigeant, qui doit présenter mardi sa démission à Élisabeth II, félicitant celle qui va lui succéder et assurant qu'«elle a le bon projet pour s'attaquer à la crise du coût de la vie, unir notre parti et poursuivre le grand travail d'unification et de nivellement de notre pays».


Réactions


La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a déclaré lundi espérer «le respect intégral (des) accords» entre le Royaume-Uni et l’UE après l’élection de Liz Truss par les conservateurs britanniques pour devenir première ministre.


«L’UE et le Royaume-Uni sont des partenaires. Nous faisons face ensemble à de nombreux défis, du changement climatique à la guerre en Ukraine. J’espère une relation constructive dans le respect intégral de nos accords», a-t-elle écrit sur Twitter, alors que Mme Truss a menacé de passer outre l’accord post-Brexit signé par Londres avec Bruxelles sur l’Irlande du Nord.


Après avoir fait campagne contre le Brexit en 2016, la ministre des Affaires étrangères sortante Liz Truss en est devenue une fervente partisane, adoptant un ton souvent très virulent contre l’Union européenne.


Elle est l’architecte de la loi visant à passer outre l’accord signé par Londres avec Bruxelles sur l’Irlande du Nord, au risque de déclencher une guerre commerciale avec les Européens.


La Commission européenne a déjà lancé contre le Royaume-Uni sept procédures d’infraction, pouvant mener à une saisine de la justice européenne, pour non-respect des dispositions prévues dans ce texte.


Le protocole a été négocié pour répondre à la délicate question de la frontière entre l’Irlande du Nord, qui fait partie du Royaume-Uni, et la République d’Irlande, membre de l’Union européenne.


Il a été conçu pour répondre à un double objectif: protéger l’intégrité du marché unique européen et éviter le retour d’une frontière terrestre qui risquerait de fragiliser la paix conclue en 1998 entre Londres, Dublin et les principales forces politiques d’Irlande du Nord.


De son côté, le chancelier allemand, Olaf Scholz, a déclaré avoir hâte de travailler «en ces temps difficiles» avec Liz Truss.


«Le Royaume-Uni et l'Allemagne vont continuer à travailler étroitement ensemble, comme partenaires et comme amis», a ajouté le chancelier sur Twitter.


LES 15 PREMIERS MINISTRES D’ÉLISABETH II


Liz Truss va devenir la 15première ministre en 70 ans de règne de la reine Élisabeth II, cheffe d’État du Royaume-Uni.


Après avoir reçu formellement la démission de Boris Johnson, le monarque va recevoir mardi Mme Truss dans sa résidence écossaise de Balmoral pour la nommer cheffe du gouvernement.


Voici la liste des locataires du 10, Downing Street, depuis l’accession de la reine sur le trône en 1952.



  • Winston Churchill (conservateur, 1951-1955)

  • Anthony Eden (conservateur, 1955-1957)

  • Harold Macmillan (conservateur, 1957-1963)

  • Alec Douglas-Home (conservateur, 1963-1964)

  • Harold Wilson (travailliste, 1964-1970)

  • Edward Heath (conservateur, 1970-1974)

  • Harold Wilson (travailliste, 1974-1976)

  • James Callaghan (travailliste, 1976-1979)

  • Margaret Thatcher (conservatrice, 1979-1990)

  • John Major (conservateur, 1990-1997)

  • Tony Blair (travailliste, 1997-2007)

  • Gordon Brown (travailliste, 2007-2010)

  • David Cameron (conservateur, 2010-2016)

  • Theresa May (conservatrice, 2016-2019)

  • Boris Johnson (conservateur, 2019-2022)