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«Habemus papam»

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«On se dit que l’époque, finalement, a bien plus besoin de lumières que d’un pape !»

Deux choses aujourd’hui : le pape et les trolls. D’abord, le pape : la semaine dernière, le maire Denis Coderre a fait souffler un vent de soupirs sur sa métropole en rappelant l’invitation qu’il a lancée au pape François pour une visite officielle à l’occasion des fêtes du 375e anniversaire de Montréal. Espérons que le monsieur en robe blanche ne répondra pas au bristol envoyé pour mieux se concentrer sur les marchés en expansion de son culte, en terres du sud pour la plupart, plus pauvres qu’ici et forcément plus ouvertes à la servilité convoquée par le dogme qu’il représente.

Inviter le pape pour célébrer le 375e anniversaire d’une ville qui s’est sortie depuis un demi-siècle de sa soumission au catholicisme pour mieux embrasser la modernité a tout du geste incongru. On pourrait même parler d’un puissant décalage avec l’esprit d’une ville-monde comme Montréal, ouverte et diversifiée, où la rationalité d’une laïcité a pris le pas sur les fantasmes d’un sauveur, pour le mieux des masses, de la condition des femmes, des arts, de l’équité, du respect des enfants, des orphelins, des Amérindiens…

Selon le premier magistrat, une visite du pape en 2017 viendrait célébrer l’ancrage du catholicisme dans l’ADN de la ville, qui s’est bâtie sur les prêches des curés de la colonie pour commencer, puis ceux des curés des nombreuses paroisses de l’île qui aujourd’hui forment un tout dans lequel la mémoire de ce passé religieux est déjà assez bien surlignée comme ça, par les saints des rues ou les 100 clochers qui persistent, 135 ans après avoir été recensés par Mark Twain.

Pas besoin d’un pape pour en rajouter donc, à moins que cela ne soit pour conforter des appuis auprès de l’électorat vieillissant parqué dans les immeubles qui bordent la rivière des Prairies ou pour briller dans plusieurs communautés culturelles sensibles à cette « hypothèse inutile », comme disait le mathématicien Pierre-Simon de Laplace pour parler de Dieu. Ces communautés, Denis Coderre les connaît bien pour en avoir fait le carburant de son ascension politique, entre deux commentaires en ligne sur des matchs de hockey.

Passé catholique, visite du pape : l’équation a ce simplisme qu’une ville mature et moderne ne devrait certainement plus se permettre, sauf si elle cherche à se distinguer comme la capitale du manque d’imagination et d’originalité.

Sur cette base plutôt opportuniste, le comité des fêtes du 375e devrait d’ailleurs penser inviter la Cicciolina — pourquoi pas ? —, étonnante figure de la pornographie et de la politique italienne, afin de rappeler le passé de décadence et de stupre qui a fait de Montréal cette « ville ouverte » avant que Pax Plante ne vienne mettre sa morale là-dedans ? On pourrait même demander à Tracy Lords ou Ginger Lynn, des amies à elles, de l’accompagner pour mettre encore plus de coeur et de silicone à la fête !

Et si tous les passés pas très glorieux d’une ville méritent d’être célébrés, appelons aussi Donald Trump, tiens, pour nous rappeler que Montréal a déjà cultivé dans sa trame urbaine le repli identitaire, le racisme et l’obscurantisme.
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