<i>La Marseillaise</i> et Le manifeste du FLQ: UN MÊME COMBAT !

Chanter "La Marseillaise" vient-il cautionner la violence?

1759 - Commémoration de la Conquête - 12 et 13 septembre 2009

Avec entrain, lorsque les Français chantent fièrement au garde à vous: "Aux armes citoyens! Armez vos bataillons! ... qu'un sang impur abreuve nos sillons", à l'unission de Nicolas Sarkozy, en tête de cette France républicaine, suivi des pieux cardinaux fort pacifiques en passant par les voix candides des écoliers de la douce France, eh! bien, cette "Marseillaise" est chantée par tout un peuple, cet hymne guerrier, sanglant qu'il est en 1792, peu après la déclaration de guerre de la France révolutionnaire au Roi de Bohême et de Hongrie.
L'hymne rappelle aussi le pouvoir royal de Versailles décapité, mettant la France dans le chaos. Ce chant devient un véritable « Te deum révolutionnaire » selon l'expression de Goethe.
Cet hymne, le plus entraînant des hymnes nationaux, fait-il, à chaque cérémonie officielle de l'État, l'apologie de la haîne et du terrorisme ? Bref, chanter "La Marseillaise" vient-il cautionner la violence?
Chanter "La Marseillaise" sous le Tricolore battant au vent, vient-il justifier la terreur ? Tenez, aux Jeux d'hiver d'Alberville, voilà quelques années, la voix pure et suave d'une adolescente chanta "La Marseillaise" en ouverture des Jeux. "Le jour de gloire est arrivé!... Amour sacré de la patrie !"
Illustration: La Marseillaise ou Le départ des volontaires en 1792.

François Rude, haut-relief, pierre de Chérence

(hauteur 12, 70 m)

Arc de triomphe de l'Étoile (1833-36)
Certes non, à notre avis, la Marseillaise ne cautionne aucune violence puisque les paroles terrifiantes de l'hymne national français auraient été changées depuis belle lurette, soit par l'Académie française, ou encore quelque politicien talentueux de l'Hexagone. D'ailleurs, personne en France n'oserait changer un seul petit mot de ce chant guerrier, loin de tout esprit catholique. L'Histoire en est marquée à jamais. Des prêtres traditionalistes se disent mal à l'aise envers les paroles de cet hymne.
Dans cette veine, oser faire la lecture en public (et non le chanter) du Manifeste du défunt Front de Libération du Québec (FLQ) de 1970, vient-il aussi justifier la terreur? Bien sûr, nous rejetons d'emblée ce Manifeste, croyant à la voie pacifique et démocratique de toute action politique.
Donc, la terreur serait-elle justifiée en lisant le Manifeste ? Certes non. Le moindre bon sens en convient.

Mais, ici, au Québec, c'est malheureusement "Oui" pour Jean Charest, premier ministre de l'État-nation francophone d'Amérique, qui condamne au nom de son Gouvernement cette lecture dont les éléments terroristes font (malgré lui) partie de l'histoire du Québec, au même titre que les éléments terroristes décrits dans la célèbre "La Marseillaise" (malgré le clergé catholique).
Photo: Jean Charest
Les jeux sont faits : Charest joue à l'hypocrite et se dissocie de la manifestation pacifique commémorative (de même que le maire de Québec, aussi hypocrite) hautement historique intitulée "Le Moulin à paroles", venant souligner le 250e anniversaire de la bataille de 1759, où depuis les Plaines de Québec, l'armée de l'Empire britannique battait l'armée royale française et chassait à jamais les Français d'Amérique avec la reddition de ces derniers en 1763.
Durant 24 heures, sur les même plaines, théâtre de cette guerre mondiale entre deux empires, dès le matin du 12 septembre 2009, en plus du Manifeste du FLQ, quelque 150 autres textes seront récités par 130 artistes, créateurs, citoyens engagés et politiciens, signalent les organisateurs.
Illustration: le patriote de 1837-38,

à l'insurrection ratée devant créer

l'indépendance du Québec
"L'événement est consacré essentiellement à la parole, dans la sobriété et la dignité, sans musique, sans orchestre.
Notre mémoire collective à travers la littérature, la poésie, la chanson et les discours qui construisent le long récit de notre présence en Amérique. Une narration de ce que nous sommes, de ce qui nous anime et de ce qui nourrit nos espérances."
TROUBLE DANS LA DÉMOCRATIE QUÉBÉCOISE
L'inquétude moderne
Avec toupet, trouvant la force d'être hypocrite envers non seulement l'histoire du Québec, mais envers le peuple tout entier, Jean Charest incarne cette "inquétude moderne" qui consiste à diriger le pouvoir vers un objet stable et parfait : le statu-quo des idées éternelles de la haute-finance qui influent dans les coulisses de sa politique; de l'égo brûlant de ces grands patrons pour qui les "intérêts supérieurs de la nation" n'existent pas... car les intérêts de la nation dérangent et dérangeront toujours les financiers dont la visée est avant tout personnelle dans leur empire.
Chez Charest, chanter "La Marseillaise" aux côtés de Sarkozy, est un honneur conquis pour le petit premier ministre provincial sans envergure qu'il est. Mais pourquoi donc n'est-il pas terrassé par les mots chantés? Bien sûr, les mots font partie du passé révolutionnaire, dira-t-il. Ce n'est pas une torsion malveillante de l'esprit humain, ce n'est qu'un rappel entraînant des faits, portés à leur forme extrême dans les strophes.
Et le Manifeste du FLQ ? Ah! là, c'est tout autre chose pour Charest. Il devient un homme de l'Antiquité, incapable de transcender les événements. Il en suffoque de rage.
Voilà deux attitudes incompatibles pour l'homme banal, élu pourtant chef d'État et qui n'arrive pas à dégager un sentiment de confiance absolu en l'avenir, étant issu de cette mentalité bourgeoise anglophone, peureuse et soupçonneuse, qui, cherchant à se prémunir contre le danger de l'indépendance politique du Québec, se fait (dans sa tête de premier ministre) une gigantesque projection du statu-quo constitutionnel pour plaire au Canada anglais. Et ne rien déranger. La crainte de s'y heurter le hante au plus haut point, sachant trop qu'il n'est pas un Charles de Gaulle aux formes supérieures... le nez (!) bien plongé dans l'Histoire, autant de la France libre que du "Vive le Québec Libre!", lancé en 1967.
Pour le petit premier ministre provincial Charest, l'événement du "Moulin à paroles" est l'affaire des "séparatistes", des "souverainistes", des "indépendantistes", bref, de tout ce qui n'est pas "fédéraliste". N'empêche que parmi les invités, Benoît Bouchard, ancien ministre fédéral et fédéraliste (encore) semble-t-il convaincu, ne craint pas le Manifeste du FLQ, sachant départager avec évidence les drames de notre histoire.
Parmi les lecteurs, se retrouve Andrew Wolfe Bourroghs, journaliste et descendant de James Wolfe, vainqueur de la bataille des Plaines.
Un projet libre
Le "Moulin à paroles" est une construction spontanée et généreuse: participants et organisateurs y sont engagés à titre purement bénévole.
Où? À Québec, sur les Plaines d’Abraham, au kiosque Edwin-Bélanger, au peu à l’est du Musée national des beaux-arts du Québec.
Quand? Du 12 septembre 2009, à partir de 15 heures, au 13 septembre 2009 à 15 heures.
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Michel Cloutier
Éditeur,
Journal Québec Presse


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