La Cour d’appel confirme la portée des mariages religieux

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Le bon sens l'emporte


Un mariage religieux a des conséquences juridiques et les obligations qui y sont rattachées ne restreignent pas la liberté de religion, a tranché mercredi la Cour d’appel du Québec. Le jugement met un terme à un épisode qui avait plongé dans l’embarras le gouvernement Couillard en mars 2016.


La Cour d’appel a ainsi rejeté l’appel d’un homme qui prétendait « qu’en associant des conséquences juridiques au mariage religieux, le Code civil du Québec entrave l’exercice de la liberté de religion des individus ».


Il faisait valoir que les croyants qui se sentent forcés de se marier pour vivre en conjugalité étaient désavantagés par rapport aux non-croyants, qui peuvent vivre en union libre et régler à leur bon vouloir les termes de la « dimension économique de leur conjugalité ». Au Québec, le mariage entraîne différentes obligations financières — partage des biens, pension alimentaire, protection de la résidence familiale, etc. —, ce qui n’est pas le cas des unions libres.


La Cour d’appel indique dans son jugement qu’on « ne peut voir dans les conséquences juridiques rattachées au mariage célébré par un ministre du culte une entrave à la liberté qu’a chacun de croire et de pratiquer ses croyances ». Le tribunal n’y voit ainsi pas d’entorse aux chartes canadienne et québécoise des droits et libertés.


De la même manière, le fait de se marier ne cause pas de préjudice sur le plan économique, note-t-on. « Bénéficier du cadre juridique [du mariage], par opposition à celui des conjoints de fait, qui n’ont pas droit à la même protection, ne peut être considéré comme un désavantage […]. Au contraire, il favorise [les époux] et il ajoute à leurs droits en instaurant un régime qui met en oeuvre un principe fort d’égalité et de protection. »


Le juriste Alain Roy, qui a agi comme consultant auprès de l’appelant dans cette cause (et qui est impliqué de près dans le dossier de la réforme du droit québécois de la famille), note à cet égard que la Cour d’appel « partage la prétention [soulevée par la Cour suprême dans le fameux dossier d’Eric et Lola] selon laquelle les conjoints de fait subissent un désavantage par rapport aux conjoints mariés », puisque rien ne les protège sur le plan juridique. M. Roy a salué mercredi un « jugement étoffé ».


Pas d’unions spirituelles !


La Cour rappelle autrement que tout célébrant d’un mariage religieux a le devoir, en vertu du Code civil, de transmettre la déclaration de mariage au directeur de l’état civil.


Une évidence ? Oui… mais non, considérant ce que la Procureure générale du Québec (Stéphanie Vallée à l’époque) avait plaidé il y a trois ans — et qui avait été retenu dans le jugement de la Cour supérieure qui vient d’être renversé.


La juge Alary avait alors stupéfié la communauté juridique québécoise. « Dans la mesure où des conjoints font appel à un ministre du culte pour célébrer un mariage uniquement religieux, le Tribunal ne voit pas pourquoi ce ministre devrait faire parvenir au directeur de l’état civil la déclaration de mariage », disait-elle en reprenant un argumentaire développé dans ce procès par le procureur du gouvernement (et qui permettait de contourner les prétentions sur la liberté de religion et le droit à l’égalité).


La ministre Vallée avait eu fort à faire pour défendre cette position par la suite. Le concept des sous-mariages sans conséquences civiles — des « unions spirituelles » qui ouvraient selon plusieurs la porte aux mariages forcés — a finalement été abandonné, Québec ayant plaidé en Cour d’appel le contraire de ce qu’il avait défendu devant la Cour supérieure.




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