La gestion de l'après-Kadhafi

La crédibilité du CNT

Géopolitique — Afrique du Nord



À la faveur du sommet consacré à l'après-Kadhafi, le Conseil national de transition (CNT) a acquis un statut de légitimité qui laisse entrevoir une suite moins cahoteuse que celles observées en Afghanistan et en Irak. Cela étant, ce même CNT est d'ores et déjà confronté à un travail de titan.
Des exemples afghan et irakien, les dirigeants du CNT ainsi que les chefs d'État occidentaux, principalement le Britannique David Cameron et le Français Nicolas Sarkozy, ont tiré des enseignements qui méritent un arrêt sur image. Après le renversement de Saddam Hussein, les forces de la coalition menée par Washington avaient installé à Bagdad un consul, flanqué d'un contingent militaire, à qui avait été donné le mandat de superviser les suites politiques. À quelques différences près, il en fut ainsi en Afghanistan. Bref, dans un cas comme dans l'autre, les opposants à Hussein et aux talibans furent mis sous tutelle.
Dans le cas de la Libye, la gestion politique de l'après-Kadhafi a été articulée afin d'éviter l'enlisement. Dès le premier engagement de l'OTAN, le CNT, de concert avec le duo franco-britannique, a pris un soin particulier à préparer l'après en question à l'aune du postulat suivant: le duo vous aide, vous épaule, mais c'est à vous que revient l'administration pleine et entière des services essentiels (dont la sécurité), de Benghazi, puis de sa province, puis des villes conquises, etc. Résultat? Ici et là, on dit, on affirme, que, sur ce front, les patrons du CNT ont accompli un travail remarquable.
Grâce à cet accomplissement, le CNT a convaincu un nombre aujourd'hui imposant de pays (60) de le reconnaître officiellement comme instance chargée de la préparation politique de l'après-Kadhafi. Il a notamment obtenu la reconnaissance de la Chine et de la Russie, qui s'étaient opposées à la résolution 1473 de l'ONU, de l'Allemagne, qui s'était abstenue, et d'autres nations réticentes.
Car, outre les efforts administratifs effectués, le CNT en a surpris plus d'un avec la composition d'une feuille de route ambitieuse et détaillée. Que l'on y songe, il est prévu que, dans huit mois, une assemblée constituante sera mise sur pied, qui devra évidemment rédiger une constitution soumise ultérieurement à l'assentiment du peuple avant la tenue d'élections présidentielle et législatives dans vingt mois. C'est là que la suite des choses s'annonce plus délicate.
Pour l'instant, le CNT rassemble des personnes qui viennent majoritairement de Benghazi et de ses environs, donc de l'est du pays. Cette région de la Libye est habitée par des clans ou tribus qui ont subi plus que d'autres la répression de Kadhafi et des clans ou tribus de l'Ouest. Maintenant que le CNT contrôle Tripoli, on espère qu'il va réussir deux choses: intégrer au sein de ce gouvernement provisoire des personnalités de cette région et stopper net toute inclination à la vengeance. Dans la fragmentation ethnologique du pays réside le centre de gravité d'un possible affrontement.
À cet égard, la gestion des actifs libyens qui affluent depuis la levée de leur gel par l'Europe et les États-Unis va être révélatrice des volontés qui habitent les actuels patrons du CNT. Des signaux qu'ils ont envoyés jusqu'à présent, on peut déduire qu'ils vont prendre le contre-pied de Kadhafi, Ben Ali, Moubarak, Assad et compagnie. Bref, ils semblent plus enclins à prendre de la hauteur que son contraire.


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