Le Québec ne sait pas reconnaître ses vrais amis. Imaginez-vous donc que le projet fédéral de réglementation des valeurs mobilières soulève les passions dans les milieux financiers ontariens. L’étendue des pouvoirs que veut se donner le gouvernement fédéral serait à ce point gargantuesque que trois grands fonds de pension ontariens tenteraient de s’y soustraire. Au Globe and Mail, on juge la situation suffisamment préoccupante pour essayer de tirer le Québec de son sommeil. Le Globe ne craint pas les...gros défis.
En page B-1 du Report on Business du 13 janvier dernier, donc, nous apprenons que le Healthcare of Ontario Pension plan, l’Ontario Municipal Employees Retirement System et l’Ontario Teachers` Pension Plan Board ont manifesté leur souhait d’être exclus du cadre d’application du projet fédéral, aux termes d’une lettre commune qu’ils ont fait parvenir au ministre fédéral des Finances Joe Oliver en décembre dernier.
Pourtant, on se souviendra que l’Ontario se rangeait parmi les supporteurs les plus convaincus de ce projet fédéral. Le problème, voyez-vous, c’est que le gouvernement central semble vouloir en donner beaucoup plus que ce que le client demandait...
Jim Kehoane, de la direction du HOOPP, nous donne une idée de l’envergure des ambitions fédérales dans l’exercice de sa « nouvelle compétence » :
« This act, as it reads right now, gives this regulator unbelievable powers that no other regulator in the world has... It can prohibit or restrict any business activities that we undertake. It could force us not to trade securities. The regulator can at his discretion order us to do anything it deems necessary to address systemic risk. It’s completely open-ended. »(RoB, Jan., 13,15, p., B-1)
Ajoutant l’injure à l’insulte, les auteurs du projet se seraient montrés particulièrement chiches côté recours contre les mesures que pourraient prendre le nouvel organisme de réglementation. On pourrait tout au plus soumettre des observations.
Oui, mais avec sa « victoire » en Cour suprême, le Québec n’échappe-t-il pas aux griffes de l’ogre ? Hummmm, pas vraiment.
En page B-1 du RoB du 19 janvier dernier, nous lisons que la « nouvelle compétence » fédérale au titre du risque systémique est d’application générale au Canada, indépendamment du fait qu’une province ait adhéré ou non au projet...coopératif du pouvoir central :
« And yet Ottawa’s plan to regulate "systemic risk" may have sweeping implications right across the country, reaching deep into activities, investments, trading platforms and a myriad of financial institutions. Even provinces and territories who aren’t joining the national securities regulator could feel the long arm of the new regulator’s powers. »( RoB, Jan., 19, 15, p., B-1)
N’est-ce pas ce que votre humble serviteur raconte depuis longtemps déjà ? Et, oui, il y aurait donc des « victoires » plus coûteuses que d’autres. Dans ce cas-ci, le coût, c’est que la Cour suprême a confortablement installé le fédéral au volant de la Caisse, de la Bourse de Montréal, de Desjardins, etc. Même le RoB estime devoir voler à ton secours, Québec :
« Curiously, there was silence from Québec and Alberta, two provinces that vigorously oppose the creation of a national Securities regulator...Would Ottawa’s power to regulate systemic risk, for example, extend to some of the activities of iconic Québec and Alberta institutions, such as the Caisse de dépôt, the Desjardins Group or Alberta Treasury Branches ?... » ( RoB, Jan., 19, 15, p., B-1)
Et dire que la classe dirigeante du Québec a qualifié l’Avis de la Cour suprême de « grande victoire » pour la province. Y-a-t-il vraiment quoique ce soit à ajouter ? Les grands médias québécois ne semblent certainement pas le penser...
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5 commentaires
Archives de Vigile Répondre
8 juillet 2015Nous apprenons ce matin (2015-07-08), en page B-2 du Devoir, que le gouvernement québécois demande à la Cour d'appel de se prononcer sur la validité constitutionnelle du projet fédéral de constitution d'une commission nationale des valeurs mobilières; il est malheureusement trop tard pour cela.
La Cour suprême a transféré des provinces vers le fédéral le pouvoir d'encadrer le risque systémique. Pis encore, elle a associé ce risque aux produits dérivés. Bye, bye, la Bourse de Montréal...pour ne pas parler de la Caisse et de Desjardins. Oh, ce qu'il était impressionnant d'entendre les péquistes saluer, récemment, l'héritage de monsieur Parizeau avec les trémolos dans la voix...
Et le fédéral ne s'arrêtera pas au risque systémique. Les lecteurs du Globe and mail savent depuis longtemps déjà que le gouvernement central planche sur un plan de protection du consommateur de produits financiers, ainsi que sur un programme d'alphabétisation financière. Peut-on imaginer plus provincial que cela comme activités? Le fédéral travaille sur l'acceptabilité sociale de son plan de constitution d'une commission nationale des valeurs. Et, tout cela sera administré par des anglophones hors-Québec. Pas grave, ils nous donnent de la péréquation...
Il n'y en a pas des milliers de façons de stopper le fédéral. Il y en a une et une seule et c'est de sortir mon cas concernant les valeurs mobilières. N'oubliez pas l'Affaire des conventions de travail, non plus. Quand il sera trop tard dans ce dossier-la également, eh bien il sera trop tard. Quand la Cour suprême parle, c'est généralement pas mal fini...Surtout dans des cas comme ceux-là.
Maintenant, on apprenait en page B-3 de la même édition du Devoir, que la Davie avait obtenu un contrat de 16 millions. Ce contrat empeste le mépris. Le Canada anglais a obtenu 35 milliards $ en contrats de construction navale. Et, en dans le langage fédéral, ces 16 millions $ laissent entrevoir que l'on s'apprête à en donner beaucoup plus encore au Canada anglais.
Que fait le gouvernement québécois avec sa stratégie maritime, une compétence fédérale? Si le Québec se sent obligé d'agir, c'est que le fédéral ne fait rien pour le secteur maritime québécois. En fait, il fait tout ce qu'il peut pour lui nuire.
Les politiques économiques fédérales sont systématiquement défavorables au Québec. Le Québec est pauvre et le fédéral contribue à cet état de chose. Si vous voulez vous faire rapidement une idée de la pauvreté du Québec, jetez un coup d'œil du côté du prix médian des maisons à Montréal, Toronto et Vancouver. Le rapport est approximativement d'un million $ à 400 000 $, un peu plus, un peu moins. Évidemment, l'immobilier va éventuellement s'écraser, cela ne peut continuer. Mais, les chiffres parlent quand même.
Vous savez, quand je traite le Québec de «tit-peupe», je ne le fais pas gratuitement. Le Canada anglais, il traite le Québec comme une province de second ordre. Et, il serait peut-être temps de lui dire qu'on aime pas ça. Baoff, on se plaint, parfois... Vérificateur général unilingue, pas de français aux Olympiques.... Les procédures en Cour d'appel, c'est un coup d'épée dans l'eau...
Louis Côté
Archives de Vigile Répondre
4 février 2015Le gouvernement Couillard a manifestement comme programme non seulement la réduction de la taille de l'État mais aussi, et surtout, son asservissement au fédéral. Absolument rien dans le parcours de Philippe Couillard n'indique un intérêt pour le Québec. Il faut remonter à Daniel Johnson fils (Je suis Canadien avant d'être Québécois) pour retrouver ça.
Archives de Vigile Répondre
30 janvier 2015S'il y a un jour une loi fédérale sur les valeurs mobilières, on ne pourra certainement pas le reprocher à Vigile.
L. Côté
Archives de Vigile Répondre
29 janvier 2015A mon humble avis faut sortir du carcan fédéral et ça presse.Faut absolument devenir un pays et c' est une urgence.
Pierre Gouin Répondre
29 janvier 2015Est-ce que le problème ça ne serait pas le Canada ?
Le Canada anglais ne vole pas au secours du Québec, il défend ses intérêts. C’est ce que le gouvernement du Québec ferait aussi dans ce nouveau dossier si on avait un gouvernement qui prenait à cœur les intérêts des Québécois.
Même si le gouvernement fédéral devait intégrer les dispositions sur le risque systémique à un projet sur la réglementation des valeurs mobilières, ces nouvelles dispositions sont indépendantes de la création d’une agence fédérale de réglementation et du jugement de la cour suprême sur le maintien d’agences provinciales. Comme le souligne le Report on Business, la « nouvelle compétence » fédérale au titre du risque systémique est d’application générale au Canada, indépendamment du fait qu’une province ait adhéré ou non au projet...coopératif du pouvoir central. Autrement dit, le fédéral aurait pu se donner ces pouvoirs même si son projet d’agence avait été rejeté.
La bataille des provinces canadiennes, et éventuellement du Québec, sera probablement perdue, mais c’est essentiel pour nous de mener toutes les batailles légitimes contre Ottawa. Elles sont le plus souvent perdues, et certaines victoires peuvent avoir l’air de défaites, mais l’incapacité du Canada à répondre aux aspirations du Québec est la principale raison de quitter cette galère et c’est notre meilleur argument pour convaincre les Québécois hésitants.