Quelqu’un écrivait dernièrement dans un journal qu’il fallait en finir avec les problèmes linguistiques au Québec. [Que l’on n’accepte qu’une langue à l’école, l’anglais->12085], et dans quelques années, c’en sera fini des querelles linguistiques, tout le monde parlera l’anglais, ce sera la plus belle unanimité.
On croit rêver! Ce n’est pas possible! Déjà que la société actuelle, sous l’effet du développement des médias et des moyens de communication de toutes sortes tend vers une banale uniformité, vers un grégarisme qui noie l’individu dans la foule! Faut-il pousser l’uniformisation plus loin encore, le plus loin possible? Ne faut-il pas plutôt cultiver les différences, protéger ce qui est particulier, unique, spécial?
On nous disait souvent autrefois que tout être humain est unique, irremplaçable. Peut-être certains ne voient-ils plus l’être humain que comme un numéro, ou disons un consommateur. Bien sûr, dans cette perspective, la langue n’a plus d’importance, mais l’âme non plus, mais la personne humaine non plus, ni la famille, ni la nation qui n’est qu’une famille élargie.
Au lieu de miser sur l’uniformité, le Québec doit miser sur la particularité, sur la diversité. On parlait récemment des fêtes d’hiver à Québec et à Montréal. On rapportait que des gens sont venus des provinces de l’Ouest pour participer à ces fêtes. Il paraît que beaucoup de gens s’ennuient dans l’Ouest. Certains viennent au Québec pour s’amuser. Les Québécois fêtent. Et cela remonte à très loin. Déjà sous le régime français, Charlevoix, qui était venu de France et qui avait visité la Nouvelle-Angleterre et la Nouvelle-France, avait remarqué que les gens de la Nouvelle-Angleterre économisaient, alors que les gens de la Nouvelle-France dépensaient beaucoup et s’amusaient sans penser au lendemain.
Les Québécois ne le savent pas assez, mais ils ne sont pas des puritains, ils ont gardé de leur héritage catholique une joie de vivre qui les distingue de leurs voisins américains. Ils ressemblent à ce point de vue aux Italiens. Stendhal, qui a vécu dans la première moitié du dix-neuvième siècle, qui était un agnostique, raconte dans son Voyage en Italie, que c’est dans les États pontificaux que l’on ressent le plus la joie de vivre. Cette joie de vivre on la retrouve chez les Québécois d’autrefois qui savaient fêter et s’amuser. On la retrouve chez les Québécois d’aujourd’hui quand ils se laissent aller à leur naturel.
Mais par un complexe de colonisés, les Québécois se voient parfois comme des jansénistes ou des puritains, ce qui est le comble de l’erreur. C’est par le même complexe de colonisés que certains disent que l’on devrait abandonner le français pour adopter l’anglais. Ma conviction, c’est qu’au lieu d’être malheureux de se sentir différents de ceux qui les entourent, les Québécois devraient plutôt se réjouir de n’être pas comme tout le monde, d’avoir de la personnalité, d’être originaux. Et d’ailleurs, ils devraient comprendre que c’est dans la mesure où ils sont spéciaux, qu’ils sont eux-mêmes, qu’ils sont différents, qu’ils peuvent intéresser les autres.
Pensons un instant aux fêtes de Québec, cet été. Si Québec n’est qu’une ville comme toutes les autres, pourquoi les visiteurs, les touristes y viendraient-ils plutôt que dans d’autres villes du Canada et des États-Unis? Québec est intéressante parce qu’elle est particulière, différente, unique. Un petit coin de France, d’Europe en Amérique du Nord. Et de même, c’est tout le Québec qui doit cultiver ses particularités, sa différence, sa personnalité.
Paul-Émile Roy
Le Québec, une question de différence
c’est tout le Québec qui doit cultiver ses particularités, sa différence, sa personnalité
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1 commentaire
Archives de Vigile Répondre
4 mars 2008Bonjour M. Roy,
Le Québec n'est pas «différent». Le Québec est normal et nous sommes normaux. Ce sont nos voisins en Amérique qui sont différents de nous. Vous trouverez sur Vigile un topo là-dessus: «Pelletier et la spécificité: le spécifique, c'est l'autre !»
Bonne journée !
Léonce Naud, Québec