Le racisme ordinaire

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De « speak white » à « French frogs » : l'amour canadien pour le Québec se confirme


« Je vous parle d’un temps/que les moins de vingt ans/ne peuvent pas connaître... » Hélas! 


Vous savez d’où vient cette expression méprisante de « speak white »? Elle n’est pas tombée du ciel un jour de tempête de neige. Non, elle nous était servie lorsqu’on s’adressait en français aux vendeuses anglophones des grands magasins de la rue Sainte-Catherine Ouest, Eaton’s, Morgan’s, Simpson’s ou dans les restaurants, en face de ces grands magasins. On n’était pas dans le West Island, non, cela se passait dans les années cinquante, soixante et soixante-dix, en plein centre-ville, là où l’on trouve aujourd’hui le Centre Eaton, La Baie et tutti quanti. Speak white voulait dire : ne vous adressez-vous pas à nous en français mais parlez-nous en anglais, la seule langue que nous comprenons et respectons, nous les Canadiens anglophones blancs. 


Vous savez d’où vient cette expression méprisante « French frog »? C’est ainsi que les Anglos de Montréal qualifiaient les Canadiens français réputés amateurs de cuisses de grenouilles. Cela se passait dans n’importe quel quartier de Montréal dans les années cinquante, soixante et soixante-dix. Pour les Anglos, manger des cuisses de grenouilles, un met associé à la « French cuisine », était un acte répugnant et nous étions donc à leurs yeux, nous Canadiens français, tous des êtres répugnants. 


Vous savez d’où vient cette expression méprisante « French bastard »? Des mêmes Anglos pour qui nous étions un peuple bâtard, c’est-à-dire mélangé, métissé, des « half cast », à cause de nos liens sanguins avec les nations amérindiennes. Les Anglos étaient purs et nous, nous étions des impurs, des bâtards. 


Il est bon de se rappeler ce passé récent pour mieux comprendre où nous voulons aller, peu importe ce qu’en pense la chroniqueure du Devoir Francine Pelletier. Il y a quelques jours, j’écoutais l'animatrice Marie-Louise Arsenault, spécialiste de l’aplatventrisme dans la catégorie dénigrement des nationalistes québécois, une vieille discipline olympique pratiquée à Radio-Canada. Elle disait à ses invités, tous unanimes, qu’elle, femme blanche, n’avait jamais connu le racisme contre sa personne. Faut-il mettre cette cécité, cet angélisme sur le compte de son jeune âge? Fait-elle dans le négationnisme volontaire? 


Le racisme envers les Canadiens français et les Québécois francophones est pourtant bien documenté et continue d’exister où que l’on soit à travers le Canada, mais surtout à Montréal. Faut être aveugle pour ne pas le voir ou encore avoir un agenda caché, mais comme je ne suis pas un adepte des théories du complot, je préfère mettre cela sur le compte de l’aplatventrisme chronique. Le racisme se manifeste à travers des expressions comme celles citées ci-dessus, ou d’autres qui nous qualifient de voleurs, de pleurnicheurs et de vermines. Il se manifeste en attaquant notre langue et nos us et coutumes, mais aussi dans des formes plus insidieuses, en niant nos droits comme nation à part entière, en empiétant sans cesse sur la loi qui protège le français dans la langue d’affichage, en qualifiant l’Office de langue française de repère d’Ayatollahs, de talibans et de nazis, en faisant du « Québec bashing » dans les médias anglos, etc. 


Tout se passe, dans les débats qui ont cours actuellement sur le racisme, comme si cela n’avait jamais existé et n’existait pas. Notre histoire a été court-circuitée et n’a jamais existé, sinon comme une honte nationale. Dans ce mauvais film sur le racisme, auquel on ajoute le mot systémique, nous sommes devenus les coupables et les méchants. Méchants envers nos frères amérindiens. Méchants envers les Noirs venus d’où qu’ils soient. Méchants envers les immigrants en général. Hier nous étions racisés, pour reprendre les termes à la mode dans ce faux débat, nous étions les victimes des WASP, humiliés, conspués, minorisés, battus. Et voilà qu’avec un coup de baguette magique savante, nous sommes aujourd’hui transformés en oppresseurs, en racistes. 


Et puis, si vous n’êtes pas encore convaincus qu’il n’y a plus rien à faire avec le ROC, consultez le plus récent sondage Angus Reid. Le taux d’amitié du ROC avec le Québec est à 12%.