Éducation

Le sens de l’effort, un atout en voie d’extinction

Tribune libre

L’éducation vise d’abord à former des hommes et des femmes et à faire passer les individus de l’enfance à l’âge adulte. Pour y arriver, les enseignants se doivent de développer les sens de l’effort et de la persévérance chez les jeunes qui lui sont confiés. Le fait de donner à l’élève le goût de l’effort fera naître en lui le désir de contribuer à la société.

Pour amener l’élève à progresser, il est est essentiel de l’initier à la rigueur, de l’inciter à aller toujours plus loin dans son apprentissage et de développer encore et toujours ses capacités, en un mot, de se dépasser. C’est en agissant de la sorte que l’enseignant formera des esprits libres capables de penser par eux-mêmes et de futurs citoyens responsables.

Milieu familial

Depuis déjà plusieurs décennies, l’école est devenue petit à petit le réceptacle d’un glissement de l’éducation des enfants qui doit être exercée par les parents à la maison, un phénomène qui s’est accentué à partir du moment où les deux parents se sont mis à travailler à l’extérieur de la maison. Une situation familiale qui a donné naissance à une forme de démission de la part des parents eu égard au sens de l’effort qu’ils auraient dû inculquer à leurs enfants en tant que valeur fondamentale dans le chemin qui les conduira au monde du travail.

Conséquemment, il m’apparaît essentiel que les parents se montrent exigeants eu égard à la réalisation des travaux scolaires à la maison. Je verrais aussi d’un bon œil que les parents confient, dès leur jeune âge, des tâches ménagères à leurs enfants pour les initier aux sens des responsabilités et de l’entraide au sein de la micro-société qu’est la famille.

Rôle de l’école

Tant et aussi longtemps que les parents feront preuve de laxisme eu égard au développement du sens de l’effort de leurs enfants, les enseignants seront confrontés à un mur de résistance tenace dans des situations où ils doivent inculquer à leurs élèves des notions sur le français, les mathématiques ou les sciences qui demandent un effort intellectuel supplémentaire pour arriver à les comprendre et à les assimiler par la suite.

Enseigner est un art qui incite au dépassement, et les enseignants ont le devoir de combattre les tenants du nivellement par le bas à l’exemple de la vice-présidente de l’Association québécoise des professeurs de français (AQPF) et enseignante en deuxième secondaire, Alexandra Pharand, qui déclarait dernièrement en entrevue avec un média qu’il est impératif de simplifier les règles d’accord des participes avec l’auxiliaire avoir « plutôt que de marteler des règles figées depuis des siècles ».

Conciliation famille-école

Dans la foulée de ces constats ayant trait aux rôles des parents en famille et du personnel enseignant de l’école, il va de soi, à mon avis, qu’un canal de communication doive être établi en tant que lien entre la famille et l’école. À cet égard, le conseil d’établissement a été intégré dans le milieu scolaire en 1998 et est composé de représentants des parents et de la communauté, d’enseignants, de membres du personnel de l’école ainsi que d’élèves, lorsqu’il s’agit d’une école qui accueille des classes de 4e et 5e secondaires.

Son rôle principal est d’analyser la situation de l’école, en particulier les besoins des élèves, les enjeux liés à la réussite des élèves ainsi que les caractéristiques et les attentes du milieu. En ce sens, le conseil d’établissement m’apparaît être l’organisme privilégié pour aborder la notion du sens de l’effort comme objectif essentiel au développement intellectuel des jeunes tout en assurant un indispensable continuum entre la famille et l’école.


Henri Marineau, ex-directeur d’école au secondaire


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Henri Marineau2090 articles

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Né dans le quartier Limoilou de Québec en 1947, Henri Marineau fait ses études classiques à l’Externat Classique Saint-Jean-Eudes entre 1959 et 1968. Il s’inscrit par la suite en linguistique à l’Université Laval où il obtient son baccalauréat et son diplôme de l’École Normale Supérieure en 1972. Cette année-là, il entre au Collège des Jésuites de Québec à titre de professeur de français et participe activement à la mise sur pied du Collège Saint-Charles-Garnier en 1984. Depuis lors, en plus de ses charges d’enseignement, M. Marineau occupe divers postes de responsabilités au sein de l’équipe du Collège Saint-Charles-Garnier entre autres, ceux de responsables des élèves, de directeur des services pédagogiques et de directeur général. Après une carrière de trente-et-un ans dans le monde de l’éducation, M. Marineau prend sa retraite en juin 2003. À partir de ce moment-là, il arpente la route des écritures qui le conduira sur des chemins aussi variés que la biographie, le roman, la satire, le théâtre, le conte, la poésie et la chronique. Pour en connaître davantage sur ses écrits, vous pouvez consulter son site personnel au www.henrimarineau.com




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1 commentaire

  • François Champoux Répondre

    1 mai 2023

    Bonjour M. Marineau,


    Vous déclarez que le sens de l'effort est un atout en voie d'extinction; n'êtes-vous pas en train de généraliser un peu vite pour expliquer l'échec de notre génération? 


    Je conçois très bien que nous sommes les enfants du XXe siècle, celui des trouvailles incroyables et géniales pour que nous devenions de plus en plus confortables, pour ne pas dire paresseux. Oui, effectivement, les efforts que nos prédécesseurs ont su y mettre pour nous rendre la vie facile ont probablement augmenter notre paresse à vouloir, nous aussi, faire mieux qu'eux; c'est probablement là le paradoxe du génie humain: nous voulons faire bien, mais le résultat laisse songeur, surtout lorsqu'on regarde l'état de l'environnement qui se détériore de plus en plus, et non le contraire.


    Je viens de voir un film "Memory box" (Liban, Canada, France) dans lequel le père, enseignant, se suicide après avoir vécu les affres de la guerre (Beyrouth), et pour avoir consacré sa vie à l'éducation: devant le résultat de ses efforts et de sa foi en l'enseignement et l'éducation, il n'a pu accepter cet échec, son échec.


    On ne peut sauver le monde; le monde se sauvera lui-même, peut-être. C'est une chance de concevoir la vertu de l'effort comme donnant de soi des résultats probants: malgré toutes les vertus du monde et tous nos efforts à le rendre meilleur, ce monde, nous devrons toujours le composer sans espérance, juste pour tenter de le rendre meilleur et non parfait. 


    François Champoux, Trois-Rivières