Lettre ouverte au président de la CDPDJ

Les droits de la personne en "sous-traitance"

Le Prix Droits et Libertés de la Commission des Droits de la Personne a été décerné à la Fondation de la tolérance.

ECR - Éthique et culture religieuse

Montréal, 29 novembre 2010
Monsieur Gaétan Cousineau
_ Président de la
_ Commission des droits de la personne
_ et des droits de la jeunesse
_ 360, rue Saint-Jacques 2e étage
_ Montréal (Québec)
_ H2Y 1P5
Monsieur,
Le Prix Droits et Libertés de la Commission des Droits de la Personne a été décerné à la Fondation de la tolérance.
Ce choix m’indigne au plus haut point et je vais tenter de vous expliquer pourquoi.
Une tolérance à deux vitesses
La Fondation de la tolérance est active dans les écoles où elle offre de la formation complémentaire contre la discrimination dans le cadre des cours d’Éthique et Culture Religieuse ( ECR).
Or, on retrouve dans le conseil d’administration de la fondation des personnes faisant activement la promotion des politiques pro-israéliennes dont le président M. Marc Gold, sioniste notoire. Ces personnes ont déjà été identifiées par le professeur Marc-André Gagnon dans Le lobby pro-israélien et la politique étrangère canadienne, article paru en 2006.
Selon Norman G. Finkelstein, auteur de L'industrie de l'Holocauste, réflexions sur l'exploitation de la souffrance des Juifs, des organismes de défense des droits de la personne ainsi que des musées sont investis par le lobby sioniste afin de définir et maintenir une certaine interprétation idéologique de l'Holocauste.

" Grâce à la mise en oeuvre de cette industrie, un pays doté d'une puissance militaire parmi les plus redoutables, présentant un dossier désastreux en matière de droits de l'homme, s'est assigné à lui-même un rôle d'État-victime, et le groupe ethnique qui réussit le mieux aux États-Unis a lui aussi acquis un statut de victime. Cette façon spécieuse de se poser en victime rapporte des dividendes considérables et en particulier elle immunise contre toute critique si justifiée soit elle." Norman G. Finkelstein

Les faits rapportés par l’auteur nous rappellent le cas pathétique de [Droits et démocratie->rub1079].
Pédagogie ou sensationnalisme?
Il s’avère que le contenu de la Caravane de la tolérance, principale activité pédagogique de la fondation, met un accent particulier sur le crime de génocide. De plus, un suivi de l’activité est offert par le Musée de l’holocauste, partenaire de la Fondation depuis peu.
L’« approche pédagogique » mettant l’emphase sur le crime de génocide est largement utilisée en Israël comme en témoigne le documentaire de Yoav Shamir Defamation. Les éducateurs utilisent les émotions extrêmes suscitées par la visite d’un groupe d’étudiants israéliens à Auschwitz afin d’embrigader les adolescents dans la défense israélienne.
Il semblerait qu’ici aussi le sensationnalisme fasse partie de l’expérience proposée par la Caravane de la tolérance si on considère les vives réactions des élèves rapportées dans un article d’[Agnès Gruda paru dans la Presse du 19 décembre 2009->24763].
J’émets de sérieuses réserves pédagogiques quant à la nécessité de recourir à l’exemple du génocide, phénomène rare et exceptionnel, pour dénoncer les discriminations courantes. C’est un peu comme utiliser un Bazooka pour tuer une mouche; il y a disproportion entre les moyens et les fins.
Une activité pédagogique moins choquante, plus vraisemblable et idéologiquement neutre permettant à l’élève de s’approprier l’expérience discriminatoire et de la transposer dans une situation qui corresponde à son vécu personnel serait certainement plus adéquate et efficace. En ce sens l’expérience pédagogique menée par Mme Annie Leblanc décrite dans « La leçon de discrimination » (reportage d’Enquête, SRC) témoigne d’un réel professionnalisme.
Je vous rappelle que la DCPDJ a formulé deux importantes mises en garde quant à l’implantation de nouveaux contenus religieux à l’école via le cours ECR, à savoir;
« b. La neutralité dans le choix des méthodes pédagogiques et du matériel didactique
À cet égard, la Commission a écrit :
« Le choix des méthodes pédagogiques et didactiques employées par les enseignants revêt une grande importance en vue d’assurer la neutralité du cours d’ÉCR. À titre illustratif si, pour des raisons didactiques, un enseignant faisait venir en classe des leaders religieux, il lui incomberait de veiller à ce que ses invités ne fassent pas la promotion d’une religion donnée à des fins de prosélytisme ».


(…)
« c. Les contenus du cours et les méthodes pédagogiques doivent être adaptés à l’âge et au niveau de développement des enfants
À cet égard, la Commission a écrit :
« Une grande prudence est de mise afin de veiller à ce que le contenu et les approches pédagogiques du cours d’ÉCR soient adaptés en fonction du niveau variable de développement psychoaffectif des enfants ».(1)

La Fondation de la tolérance contrevient à ces deux mises en garde en usant de moyens pédagogiques discutables pour promouvoir une interprétation tendancieuse les droits de la personne à des fins de propagande politico-religieuse. De plus, les activités douteuses de la Fondation ont lieu dans nos écoles dites « non-confessionnelles » grâce à des subventions gouvernementales, des budgets scolaires dédiés aux projets spéciaux et à des exemptions fiscales puisque la Fondation peut émettre des reçus de charité à ses généreux donateurs dont la liste laisse tout aussi perplexe que la composition du conseil administratif.
Le manque de vigilance du Mels
Vous aurez compris que, n’étant pas « anti-sémite », je puis très bien imaginer que l’exemple fourni par la Fondation de la tolérance n’est pas le seul et unique cas en ce genre et que d’autres organisations religieuses, catholiques, musulmanes ou que sais-je encore en fassent tout autant. Je suspecte qu’aucun mécanisme de contrôle n’existe et que les organisations les plus motivées et les plus en moyen aient le champ libre pour investir nos écoles.
Je terminerai donc par une question; « Quel contrôle le Mels a-t-il mis en place pour s’assurer du professionnalisme des individus et des organisations religieuses ou autres qui sont invitées dans les écoles pour alimenter les cours d’ÉCR et les activités du SAVSEC? »
La CDPDJ aurait dû jouer ce rôle de chien de garde mais elle s’est au contraire montré en deçà de tout en attribuant le Prix droits et liberté à un loup ayant réussi à entrer subrepticement dans la bergerie.
Je souhaite vivement que la CDPDJ se ravise en attribuant plutôt le Prix droits et libertés à une enseignante certifiée dont le travail est exemplaire plutôt qu’à un organisme qui « sous-traite »les droits de la personne à bon compte.
Marie-Michelle Poisson
_ Professeure de philosophie
_ Montréal
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(1) Examen de la conformité du cours d’Éthique et culture religieuse à la charte, Paul Eid, Direction de la recherche et de la planification.




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