En clôture du congrès des jeunes libéraux, dimanche, le premier ministre Charest a pourfendu son adversaire Mario Dumont en l'accusant d'avoir une vision étriquée du Québec par rapport à l'immigration. L'attaque faisait suite à [une entrevue accordée par le chef de l'ADQ->8160] dans laquelle il soutenait que le Québec avait sans doute besoin de plus d'immigrants sur un plan strictement économique, mais qu'en pratique, nous aurions atteint le seuil au-delà duquel il devient difficile de les intégrer.
Avant de sombrer dans la démagogie, rappelons quelques données. Le Québec accueille chaque année près de 45 000 immigrants, soit 17 % du total canadien. Juste à côté, l'Ontario en accueille 141 000, soit trois fois plus que nous. Y a-t-il un lien entre l'immigration et le fait que le nombre d'Ontariens en âge de travailler (15 ans et plus) ait grimpé de 65 % pour atteindre 10,2 millions en trente ans, alors qu'il ne s'est accru que de 30 % au Québec, à 6,2 millions? Et y a-t-il un autre lien à établir entre ces données et le fait que l'économie ontarienne soit maintenant 100 % plus importante que la nôtre alors que le rapport n'était que de 65 % il y a trente ans?
Bien sûr, la natalité, le vieillissement et le solde migratoire interprovincial jouent aussi à l'avantage de l'Ontario, mais ce ne sont là qu'arguments de plus pour défendre l'importance de l'immigration.
Dans les pays développés où l'espace et les ressources ne manquent pas, immigration et croissance économique vont de pair: l'une stimule l'autre. L'immigration ne corrige pas tous les maux d'une société, elle en transporte même quelques-uns dans ses bagages. Mais qui osera dire que le Québec fait face à de graves problèmes à cause du voile ou du kirpan? Bien réfléchie, une politique d'accueil devrait nous aider à faire un pas de plus, et non l'inverse.
Il faut continuer de favoriser l'immigration de langue française, tout en reconnaissant que l'on ne parle pas notre langue dans la plupart des pays qui constituent les bassins les plus importants de demandeurs. Il faut donc investir encore plus pour accroître la fréquence et le nombre d'heures de cours de français comprimées de moitié au fil des ans. Investir aussi dans les services de soutien pour faciliter la recherche de logements et d'emplois à la hauteur des compétences de chacun.
L'an dernier, le gouvernement a modifié les règles d'admission pour accorder plus d'importance aux compétences techniques des demandeurs qu'à leur niveau de scolarité absolu. Il a du même coup ajouté des points pour ceux qui se disent prêts à s'installer en région. S'ils sont appliqués, ces changements sont susceptibles de diversifier les régions d'accueil et d'éviter la formation de ghettos. En Ontario, les immigrants s'installent surtout à Toronto, mais aussi à Hamilton et Windsor, par exemple.
N'en déplaise à M. Dumont, non seulement le Québec n'a pas atteint un plafond, mais le rythme annuel pourrait être accéléré... pour autant que Québec investisse l'argent nécessaire et que les habitants de toutes régions se montrent intéressés.
Les Québécois ne sont ni plus ni moins accueillants que les autres. Ce qui fait la différence, c'est l'emploi, le logement et la paix sociale. M. Dumont ne doit pas jouer la carte de la peur, au contraire. À titre de chef de l'opposition, il a le devoir de défendre des idées qui favorisent l'harmonie et la prospérité.
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