Petit impair, petite tempête

Boisclair à Paris




Sur le coup, la déclaration lundi après-midi de Ségolène Royal en faveur de « la souveraineté et la liberté du Québec » n’avait provoqué aucune réaction en France. Un journaliste français présent au point de presse d’André Boisclair n’avait même pas relevé l’incident.
Il a fallu la mise au point très sèche du premier ministre Stephen Harper, traitant cette déclaration d’« inappropriée » pour que soudain tous les principaux médias français comprennent de quoi il était question.
Du coup, la nouvelle a fait pendant une bonne partie de la journée la une des journaux à la radio, où l’on parlait de « nouvel impair », et à la chaîne d’info continue (LCI), qui avait intitulé le sujet « Couac diplomatique ».
Invitée au journal du matin d’Europe 1, l’une des principales radios privées, Ségolène Royal, qui ne s’attendait apparemment pas à cette minitempête, a été obligée de s’expliquer longuement.
Longue tradition
Disant en substance que sa déclaration s’inscrivait dans une longue tradition de soutien et d’amitié au Québec, mais qu’elle n’avait en aucune manière pris position sur les questions « institutionnelles » canadiennes. Et enfin qu’elle maintenait les termes de « souveraineté et de liberté » en ce sens que le vote et l’expression de la volonté populaire relèvent en effet de la « souveraineté ».
« Comme dans toute démocratie, a-t-elle dit, le peuple qui vote est souverain et libre, et donc les Québécois décideront librement de leur destin le moment venu, s’ils en sont saisis. Mais ce n’est pas à la France de dicter aux Québécois ni aux Canadiens ce qu’ils doivent faire. »
Quelques heures plus tard, lors d’un point de presse avec une nouvelle porte-parole, la députée guyanaise Christiane Taubira, Mme Royal déclarait à propos de la polémique : « Je me suis exprimée. Je n’y reviendrai pas. »
Sollicité de nouveau pour commenter les propos de la candidate – qui est sa compagne dans la vie –, François Hollande s’en est tiré de manière un peu laborieuse, en expliquant que ses propos ne faisaient que reprendre à son compte une ligne politique traditionnelle d’« accompagnement du Québec » – « dans la lignée de de Gaulle, Philippe Séguin, Jacques Chirac ou Alain Juppé ».
Hier en début de soirée, la même Christiane Taubira expliquait qu’un « responsable politique avait bien le droit de manifester sa sympathie pour un mouvement qui a fait 48 ou 49 % au référendum il y a deux ans » (sic). Une demi-douzaine de responsables socialistes se sont portés à la défense de leur candidate.
Dans le camp de son principal adversaire, Nicolas Sarkozy, on ne s’est pas privé de dénoncer ce que la ministre (gaulliste) de la Défense, Michèle Alliot-Marie a qualifié de « légèreté extrême » de Mme Royal en matière internationale. Le porte-parole des centristes de l’UDF a parlé de « bourde préoccupante ». Les « impairs » commis, en décembre au Proche-Orient et en janvier en Chine, ont été rappelés.
Dans une longue interview à France-Inter, à 13 h, l’ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin, familier de longue date du Québec, a reproché à Ségolène Royal son « improvisation inquiétante, préoccupante ».
« En tant que haut responsable politique, a-t-il dit, il faut être très soucieux de parler à l’ensemble du peuple québécois, et non pas à un seul parti politique. Il ne faut pas sous-estimer le caractère délicat du débat sur la souveraineté, qui divise le peuple québécois. »


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