Pour en finir avec la nature humaine

Tribune libre

Le texte suivant est un appel au progrès, au potentiel d'un monde meilleur, un monde plus juste et équitable. Ceci n'est pas un discours utopique ni une simple chimère, mais fait allusion à un principe fondamental de nos caractéristiques humaines, c'est-à-dire : la volonté de s'améliorer, de vouloir produire un changement social radical pour accroitre notre qualité de vie et nos interactions sociales. Je le répète, ceci n'est pas un mode de pensée irréaliste, ce que je devance est tout simplement une façon différente de voir le monde; une exhortation à réformer notre système de valeurs et notre manière de pensée.
La clé, se trouve dans l'approche sociale libertaire, non comme modèle de société, mais comme une force critique solennelle et un idéal de valeurs. Nous sommes élevés et formés à croire que notre condition est le résultat irrémédiable de notre nature humaine. Je vous le dis, en vérité, ce concept n'est qu'une illusion et un mensonge.
Élaboré par le pouvoir, qu'il soit de nature ecclésiastique, politique ou économique, pour justifier et donner légitimité à un système aberrant et, à la fin du compte, néfaste au développement et à l'épanouissement humain. Nous vivons dans l'ère technologique, une époque qui nous offre une alternative d'organisation sociale, où nos interactions et nos objectifs ultimes ne seront plus guidés par des notions absurdes telles que la compétition et l'accumulation, ni déterminés par les forces du marché.
Là, sont des idées funestes qui n’apportent rien en termes de développement et de progrès, au contraire, ils ne font qu'occasionner des sociétés de conflits et de privations. Ils divisent les êtres humains en groupes et les gardent enfermés dans un cycle vicieux de dépendance et de rivalité, étouffant tous potentiels créatifs en reléguant les aptitudes particulières de chacun au service du pouvoir. Nos institutions sont obsolètes et nos systèmes politique, économique et social ne peuvent plus répondre à nos besoins fondamentaux, notre avancement dans le domaine technologique a de loin dépassé nos systèmes sociaux devenus, pour ainsi dire, désuets.

Il faut cesser de croire que le système actuel est naturel et que nos comportements égoïstes sont innés. Si, il y a véritablement quelque chose dont nous devrions tenir compte en examinant l'histoire, c'est que les changements qu'ont entrepris nos structures sociales au fil du temps ce sont réalisés suite aux modifications apportées à nos systèmes de valeurs. L'homme est le produit de son environnement, son caractère et sa personnalité, sa manière d'agir avec autrui, tous sont occasionnés par son éducation et l'influence exercée sur lui par son entourage. Tout dépendant des conjonctures sociales et des valeurs transmises, on aboutira avec des individus et des sociétés particuliers. De ce fait, notre société matérialiste/individualiste n'est rien d'autre que le dénouement d'un ensemble de valeurs symptomatiques de notre régime politique et de notre modèle de développement économique : le capitalisme.

Celui-ci est un système dont les origines viennent des campagnes anglaises du XVIIe siècle. Ainsi, il importe plus que jamais de savoir que le capitalisme n'est pas la conséquence inévitable des échanges commerciales et marchands que l'on retrouve dans presque toutes les sociétés humaines, mais a une histoire très singulière et un lieu de naissance bien précis. De là, je veux remettre en question l'idée selon laquelle le capitalisme serait conforme à des lois naturelles, propres à l'espèce humaine.
Ceci est d'une très grande importance, car le système économique dans lequel nous pratiquons nos échanges commerciaux nous a amené à réévaluer nos relations sociales, autrement dit, notre système de valeurs a dû se métamorphoser radicalement. Car, le capitalisme avec toutes les contraintes, qui font sa spécificité, engendre naturellement une société de consommation où les rapports sociaux sont déterminés par l'accumulation et la possession de biens matériels. Ellen Wood, professeure de science politique à l'université York à Toronto note le suivant :

''Au sein d'un système capitaliste, la vie matérielle et la reproduction sociale sont entièrement médiatisées par le marché, de sorte que les individus doivent, d'une façon ou d'une autre, nouer des relations marchandes pour avoir accès à leurs moyens de subsistance. Cette dépendance, absolument unique, fait en sorte que les conditions mêmes du marché : ses impératifs de concurrence, l'accumulation, la maximisation des profits et l'accroissement de la productivité du travail règlent et régulent, non seulement les transactions économiques, mais les rapports sociaux dans leur ensemble."

Les rapports sociaux, désormais définis par les échanges économiques, ont menés vers une dénaturalisation des modes normales d'interactions humaines. L'homme, dorénavant transformé en outil de travail doit être conservé pour des raisons de production et d'efficacité. Ainsi, la préservation du tissu social (dans sa forme actuelle) est primordiale au déroulement du système économique. Notre système politique contemporain : l'État-nation, devient par conséquence le gardien du système capitaliste, la force régulatrice et préservatrice des moyens de production (l'homme).
C'est ainsi, que les lois qui réglementent nos sociétés sont superficielles et donnent l'impression d'un système de justice réellement impartial. Conséquemment et forcément, des institutions coercitives, telle l'institution policière, sont créées pour renforcer ces lois, mais ces règlements législatifs sont, en vérité, appliqués à une strate spécifique de la société, tandis qu'une minorité opulente, celle qui détient la très grande portion des richesses et du pouvoir, est, en quelque sorte, prémunie des châtiments du système légal, les exemples n’en sont pas modiques.

L'argument qui soutient que les êtres humains ont besoins une forme d'autorité organisée (la police) pour maintenir la sécurité, l'ordre et la paix est en soi illogique. Supposons que, les êtres humains sont par nature égoïstes et violents, comme le postulat célèbre de Thomas Hobbes le déclare : ''L'homme est un loup pour l'homme'', que dire alors des hommes en position de pouvoir? La nature humaine ne s'appliquerait-elle pas davantage à eux? Dans de telles circonstances, ne sont-ils pas plus aptes à succomber à ces vices? Or, n'ont-ils pas une prédisposition à la corruption et aux abus? Le raisonnement est certes déficient et circulaire.
On octroie naïvement le monopole de la violence à une infime minorité dont on croit être les sauvegardes légitimes de la société, mais en vérité elles ne sont que les protecteurs du 1%, tandis que la population est perçue comme une espèce de tribu arriérée nécessitant une laisse. Si la police est ici pour nous surveillez, qui alors est là pour surveiller la police? Selon Jean-Jacques Rousseau, dans le Discours sur les inégalités parmi les hommes, nous (les moins nantis) avons simplement consenti à un pacte de dupes.

Or, les structures politiques et judiciaires sont organisées de manière à servir les intérêts de la sphère économique, tout doit être sacrifié pour alimenter les marchés financiers insatiables. Pour faire régner ''l'ordre et la stabilité'' parmi les gens de classe moyenne et de classe basse, afin de garantir la préservation des forces de production, nous qui sommes réduits à de simples marchandises et à des outils de fabrication.
De là, à garantir le bon roulement du système pendant que les ploutocrates nous escroquent et nous exploitent. Il est temps de revoir notre manière de s'organiser et d'interagir, la survie de l'espèce humaine en dépend, car si nous ne sommes pas disposés à abandonner ce modèle de surconsommation, le capitalisme industriel va finir par détériorer notre écosystème. On ne peut plus poursuivre avec ce mode de vie qui repose sur la surexploitation des ressources naturelles et la consommation excessive, il faudra réorganiser notre société de manière à répondre à nos besoins primordiaux pour ainsi moins consommer et mieux consommer.

Le travail ne doit plus être le milieu où notre main d'œuvre est marchandée pour un salaire médiocre, simplement pour subsister. Il doit devenir l'endroit où nos capacités et nos aptitudes créatives puissent se développer et s'épanouir, où nous retrouvons le sens de notre existence et non pour affirmer notre droit d'exister, un droit qui devrait, en principe, être reconnu ‘acquis de nature’. Toutes barrières nationales, ethniques et culturelles doivent prendre le bord et faire place à ce qui nous uni : notre humanité. Les conflits ethniques, religieux, nationaux, sur l'orientation sexuelle, l'inégalité entre hommes et femmes, les problèmes de langues et d'identités sont tous des problèmes humains et ce n’est seulement qu’en changeant notre système de valeurs et en transformant radicalement nos mentalités qu'on pourra arriver à les rectifier.
Énormément d'énergie et de ressources sont dépensées pour nous maintenir dans notre condition léthargique. Les réseaux médiatiques sont contrôlés par les oligarques, ainsi que nos écoles, qui sont structurées et administrées de façon à reproduire et à promulguer le système de classes sociales. Sachant que l'arme, par excellence, est l'information et l'éducation par lesquelles on peut assujettir ou émanciper une société entière, la lutte pour les moyens de communications est au centre de cette querelle entre les forces du pouvoir et du contre-pouvoir.

En éliminant les relations de compétition et par l'adoption de rapports coopératifs mutuels, on pourrait ériger la fondation d'une nouvelle société, non pas utopique, mais progressiste. Plusieurs de nos problèmes aujourd'hui peuvent être résolus aisément, nous possédons les connaissances et les outils technologiques pour le faire, c'est de la volonté et de l'audace dont nous sommes défaillants. Alors, commençons par briser nos chaînes mentales et rompons avec cette notion farfelue de nature humaine qui nous garde dans un état somnolant et qui anéantit les moindres aspirations dont nous avons pour un monde meilleur.



Eid Harb

8 Avril 2013


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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    13 mai 2013

    M. Hamelin, je suis tout à fait d'accord avec vous la dessus. Je me suis mal prononcer, je ne voulais pas dire, que nos différences étaient des ennuis à notre développement. Au contraire, je voulais tout simplement énoncé le fait, que notre humanité doit être le critère le plus essentiel sur lequel nous devons fonder nos relations. La culture, les nations, les ethnies, sont ce qui font de nous des êtres humains, or il faudrait reconnaitre l'homme comme étant une combinaison de tous ces aspects identitaires. Ainsi, nous devrions juger autrui que selon le contenu de leur humanité et non selon le genre de culture et l'ethnie à qui ils appartiennent.

  • Archives de Vigile Répondre

    14 avril 2013

    Plein de vérités, plein d'optimisme...!
    Une courte phrase m'a fait un petit pincement...
    « Toutes barrières nationales, ethniques et culturelles doivent prendre le bord »
    Les nations ne sont pas des barrières, enfin NE DOIVENT PAS être des barrières, pas plus que les ethnies ou les cultures. Au contraire c'est par la rencontre des cultures que les hommes se rencontrent vraiment. L'idée du grand tout, internationaliste est en soit un fantasme. Le grand buldozer unificateur. C'est le discour de la mondialisation. Tous les concepts de liberté et d'émancipation que vous nommez si bien dans votre beau texte ont plus de chance de naître dans un état « bien tenue », bien conceptualisé, bien représentatif, que dans un grand tout sauvage et sans scrupule. Il ne faut plus jamais mettre en contradiction nation ou culture et épanouissement humain. Au contraire. C'est la aussi, une idée toute faite qui comme un champignon prevertie notre vision du monde. Chaque culture à besoin d'un terreau fertile pour grandir et si les hommes doivent assurément connaître le partage et la générosité, c'est en ouvrant les portes de leurs nations qu'ils pourront le faire, pas en se noyant dans une mer informe ou plus personne ne se reconnaîtra. Small is beautifull...

  • Archives de Vigile Répondre

    14 avril 2013

    "Ils divisent les êtres humains en groupes et les gardent enfermés dans un cycle vicieux de dépendance et de rivalité, étouffant tous potentiels créatifs en reléguant les aptitudes particulières de chacun au service du pouvoir"
    Et j'ajouterais que ça va jusqu'à nier l'existence de certaines personnes, en particulier les plus démunis de la société; comme si ces gens n'existaient pas et dans certains cas, comme s'ils étaient de trop en ce monde.
    Et dire qu'il y en a qui pensent qu'au 21e siècle, nous avont atteint le summum de la civilisation parce que nous avons des ipod, des ipad etc...