Conflit étudiant

Restons calmes!

En attendant le passage aux urnes, restons calmes. Cette crise en plusieurs actes connaîtra son épilogue si, et seulement si, des échanges réfléchis se poursuivent.

Le Devoir d'angélisme... Ce n'est pas la clarté des idées ou des échanges qui fait problème, mais les principes politiques qui les fondent. L'appel au calme, ou à une "accalmie" est une astuce démagogique qui cache l'espoir du pouvoir de profiter d'un dérapage appréhendé pour imposer la loi et l'ordre... et gouverner ensuite contre l'intérêt collectif.



La bataille de principes autour des droits de scolarité aveugle les parties au point où elles n’arrivent plus à voir les compromis acceptables, même lorsqu’ils trônent sur la table. La suspension des échanges doit être temporaire, le temps de refroidir les esprits. Il y a toujours de quoi discuter.
Selon toute apparence, plus l’on discute, moins l’on se comprend. Lorsqu’un camp s’obstine à exiger le gel des droits, et que l’autre fait d’une juste part payée par les étudiants une affaire d’orgueil, les échanges se gangrènent, même à la troisième ronde de négociations ! Lorsqu’en prime, on travaille sans la moindre marge de manoeuvre financière, pas l’ombre d’un sou neuf, difficile de ne pas frôler le cul-de-sac.
Mais il faut aller au-delà des apparences. L’entêtement aveugle les parties au point où elles ne perçoivent plus, ni d’un côté ni de l’autre, ce qui s’approche d’un compromis auquel ils sont tenus d’arriver afin de préserver la paix sociale. Entre une hausse démesurée de 325 $ par année pendant cinq ans, et l’utopie du gel des droits, se trouve forcément un juste milieu, fût-il temporaire.
Dans un laïus fort détaillé hier, reprenant l’ensemble des propositions mises sur la table par le gouvernement depuis le début du conflit, le premier ministre Jean Charest et la ministre de l’Éducation Michelle Courchesne ont confié avoir soumis une hausse de 219 $ par année pendant sept ans : refusée. Puis une option de 100 $ la première année, avec compensation des 154 $ manquants dans la cagnotte des crédits d’impôt : refusée.
Cette option du crédit d’impôt est donc une « piste intéressante » qui ne rebute pas le gouvernement. Quant à la hausse de 100 $ pour une première année, les associations étudiantes doivent concéder qu’elle correspond exactement à ce qui a été mis de l’avant par Québec entre 2007 et 2012. Il y a peut-être là non pas le fin détail d’une entente de principe, mais le canevas d’un compromis acceptable. Les deux parties doivent reprendre là où elles ont laissé.
Le premier ministre Jean Charest affirme que son équipe fut toujours à l’écoute et de bonne foi, mais comme il lui a fallu du temps avant que ces atouts se déploient ! Au point où une affaire de droits de scolarité - débattue en effet maintes et maintes fois au Québec - s’est transformée en guerre ouverte. L’équipe gouvernementale a poussé très loin hier le paradoxe : elle venait de quitter le champ de bataille qu’elle appelait immédiatement après à une « accalmie »…
Cet appel au calme traduit une nervosité, justifiée par ailleurs. Mais il résulte d’une stratégie pour le moins étrange : comment cette volte-face peut-elle apaiser les esprits ? De quelle manière, à l’approche d’événements festifs tels le Grand Prix et les festivals qui se succéderont à Montréal, peut-on imaginer qu’une suspension des négociations aura l’effet d’un analgésique ? Québec ne peut pas céder à la « menace », mais il a le devoir aussi de ne pas mettre le feu aux poudres. Voyons cela comme une preuve additionnelle de l’incapacité du gouvernement Charest de comprendre la nature du mouvement d’opposition avec lequel il est condamné à parlementer, ne lui en déplaise.
Les étudiants font face eux aussi à des choix cruciaux : ils ont raison de souhaiter encore et toujours la discussion, puisque c’est la seule avenue possible, mais ils devront également avancer sur la voie du compromis. Accepter une portion de la hausse qu’on leur refile, si elle est raisonnable, paraît inévitable. Il leur incombe en outre de ne pas provoquer le chaos par le discours.
En attendant le passage aux urnes, restons calmes. Cette crise en plusieurs actes connaîtra son épilogue si, et seulement si, des échanges réfléchis se poursuivent.


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