À lire et à entendre l'hostilité féroce qui émaille les propos de Nicolas Sarkozy et de Dominique de Villepin, on imagine aisément que tous les gardes-champêtres de France et de Navarre sont sortis de leur longue retraite. Après quoi, ils ont dépoussiéré le tambour des mauvaises nouvelles. Puis se sont précipités sur la place du village où ils ont effectué les trois roulements de tambour conventionnels avant de marteler haut et fort ceci: «Avis à la population. Le président et le prétendant se battent à mains nues et plus méchamment qu'Hara Kiri ne l'aurait fait. Il ne reste qu'une chose à faire: tous aux abris! Ça va saigner comme jamais depuis l'époque des Borgia.»
Bon. Une chose est certaine, ça va saigner. Pour s'en convaincre, il suffit d'écouter les mots qu'un député UMP réputé proche de Villepin a prononcsé ces jours-ci: «Maintenant, c'est Verdun. Ils veulent la guerre, ils l'auront. On est dans les tranchées pour deux ans.» Cette référence, Georges Tron, c'est son nom, l'a faite après les dénégations de l'Élysée selon lesquelles jamais Sarkozy n'avait ordonné au parquet d'en appeler de la décision du tribunal qui a jugé Villepin innocent dans l'affaire Clearstream. Ajoutons-y une louche. Villepin, lui, se «sent comme un chef de réseau entre 1940 et 1944». En moins de deux, Villepin et son Pancho ont composé une ode guerrière greffant Verdun à Stalingrad. Chapeau! Haut-de-forme du lyrisme qui sied à l'ambition et non le béret auvergnat des avares. Il fallait y penser. Il fallait le faire.
Pour Sarkozy, la semaine qui vient de s'écouler a été celle de la déveine. Car après l'innocence reconnue de Villepin et les cafouillages de l'Élysée, voilà qu'un sondage révèle que la majorité des Français souhaitent que Villepin se présente à la présidentielle de 2012. Dans cette corrida aux Champs-Élysées où le président et son ennemi préféré jouent à M'as-tu vu en cadavre, le second est en train de se poser en possible bretteur tuant les espoirs d'un deuxième mandat présidentiel du premier. À l'évidence, Villepin mijote avec délectation la recette concoctée en son temps par Jacques Chirac, son mentor, et qui avait coûté la victoire à Giscard d'Estaing en 1981.
Manque de chance pour Sarkozy, les militants et élus de l'UMP ont été réunis à Paris pour écouter les patrons du parti décliner les noms des candidats retenus pour les élections régionales qui auront lieu dans un mois et demi. Ces militants ont appris qu'au nom de l'ouverture aux autres formations politiques les deux tiers de ceux qui s'étaient présentés en 2004 ont été rayés des listes. En agissant de la sorte, Sarkozy a offert sur un plateau d'argent un contingent de grognards de l'UMP à Villepin qui désormais peut déclamer: Par un matin brumeux je m'en allais rosser l'impétrant/ Assuré que de battant son coeur deviendrait ballant.
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