GUERRE CULTURELLE

Une église « réveillée »

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L'Église « woke », conséquence de Vatican II...


Depuis trois ans, la paroisse Saint-Bonaventure, dans Rosemont, a triplé son affluence dominicale. Son secret : l’application du concept d’un prêtre d’Halifax, qui prône une église « réveillée », missionnaire et fraternelle.


Il y a trois ans, Patrice Bergeron désespérait de créer l’Église missionnaire et fraternelle dont il rêvait confusément. C’est à ce moment que le curé de Saint-Bonaventure, une paroisse de Rosemont, a engagé Élisabeth Boily comme agente de pastorale. Cette rencontre a été cruciale pour le succès de leur paroisse, qui attirait avant la pandémie de 250 à 300 personnes à la messe du dimanche, un nombre phénoménal pour une paroisse francophone québécoise.


« Il y a trois ans, c’était moins de 100 personnes, dit le père Bergeron. Élisabeth a fait des recherches sur YouTube et a trouvé un prêtre d’Halifax, James Mallon, qui mettait des mots sur le malaise et proposait des solutions. Il appelait ça la Divine Renovation. Nous avons décidé d’appliquer la recette ici et de l’appeler “Église réveillée”. Jusqu’à ce moment, je gérais le déclin, on avait ce que j’appelle une paroisse de maintenance. »





PHOTO FOURNIE PAR EDWARD SÉNÉCAL


Messe à l’extérieur l’été dernier, avec le curé Patrice Bergeron





Catéchèse et soupers alpha


Parmi les innovations : des changements dans les hymnes, dans la catéchèse préparant aux sacrements et des repas fraternels appelés « sessions alpha ».




On voulait des chants qui parlaient plus de l’expérience humaine, qui étaient moins cérébraux comme le vieux répertoire.



Patrice Bergeron, curé de la paroisse Saint-Bonaventure, dans Rosemont



« On a trouvé des chants du groupe Glorious, de l’église de Lyon Centre, en France, avec laquelle on a des liens maintenant. Il y a de la guitare, du piano, un band », dit le curé Bergeron.





 




La préparation aux sacrements a été aussi revue pour être moins scolaire. « Avant, les enfants devaient venir tous les mardis soir pendant deux ans, on ne voyait jamais les parents et on dégoûtait les enfants de l’église ; c’était de l’école de plus. Maintenant, on fait des catéchèses dans le sous-sol le dimanche pendant la messe, les enfants remontent pour le Notre-Père, c’est très fort, il y a parfois 80 à 100 enfants autour de l’autel à ce moment. Il y a des sessions facultatives. »





PHOTO FOURNIE PAR EDWARD SÉNÉCAL


Les enfants autour de l’autel pour le Notre-Père, avec le curé Patrice Bergeron, avant la pandémie





Le parcours catéchétique est maintenant personnalisé, dit Mme Boily. « Il y a des enfants qui font leur communion dans l’année. »


Les sessions alpha ont lieu deux fois par an et regroupent pour un souper des paroissiens actuels ou potentiels, notamment des adultes qui souhaiteraient être baptisés. « On dit aux gens : “Venez et voyez’’, dit Mme Boily. S’ils aiment ça, ils restent. C’est vraiment souvent le cas. »


« C’est très bon pour le vivre-ensemble »


À Montréal, de nombreuses paroisses rassemblant une même communauté culturelle font salle comble à la messe du dimanche, regroupant des fidèles provenant du même pays d’immigration, directement ou par l’intermédiaire de leurs parents. Saint-Bonaventure, elle, est en majorité multiculturelle, mais environ le tiers des fidèles sont descendants des colons de la Nouvelle-France.




Il y a beaucoup d’Haïtiens et d’Africains, qui retrouvent l’esprit des paroisses de leur pays d’origine. Souvent, ils disent : “J’ai été à la messe, mais on ne m’a pas accueilli, pas demandé qui j’étais.’’



Patrice Bergeron, curé de la paroisse Saint-Bonaventure, dans Rosemont



Les gens qui immigrent au Québec proviennent souvent de pays où la pratique catholique est encore soutenue. Est-ce que la foi pourrait devenir un terrain de rencontre ? « Oui, c’est très bon pour le vivre-ensemble », dit le curé Bergeron.


Un prêtre « jeune »


À 51 ans, Patrice Bergeron est un prêtre jeune, considérant que la moyenne d’âge de ses confrères au Québec est de 75 ans. Comment un jeune homme qui a grandi dans la région de Montréal dans les années 1970 et 1980 a-t-il décidé d’être prêtre ?


« Mes parents étaient pratiquants, mais on n’était pas une famille qui parlait de Dieu tout le temps. À 15 ans, j’ai rencontré Jésus grâce à un aumônier qui m’a intégré dans des activités pastorales de groupe, un peu comme les sessions alpha. Je suis entré au séminaire à 20 ans, ça a été un peu difficile pour mes parents. Ça voulait dire des petits-enfants de moins. »


Élisabeth Boily, elle, a 56 ans et a grandi dans la région de Québec. Elle a six enfants, qui ont de 13 à 27 ans. « Quand j’étais petite, mes parents étaient très pratiquants. La religion a toujours compté pour moi, mais à 16 ans, j’ai eu une expérience personnelle de Jésus-Christ et j’ai commencé à fréquenter des célébrations plus charismatiques et plus joyeuses. »





PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE


Élisabeth Boily (à droite), adjointe à la mission à la paroisse Saint-Bonaventure, dans Rosemont, avec sa fille Judith Cournoyer, qui travaille aussi à la paroisse Saint-Bonaventure





Pétition pour Pâques


L’hiver dernier, Mme Boily a lancé une pétition électronique pour « sauver » Pâques, estimant que le gouvernement appliquait des restrictions trop importantes sur les lieux de culte, par rapport aux autres provinces, aux États-Unis et à la France. La pétition a recueilli près de 10 000 signatures. Mme Boily a été surprise et heureuse de l’annonce il y a une semaine que la limite pour les lieux de cultes était rehaussée de 25 à 250 personnes, tout juste avant les Pâques juive et catholiques.




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