Xavier Raufer : « Neuf tueries de masse sur dix se produisent dans des pays anglo-saxons protestants »

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Il y a moins de tueries dans les pays où il y a encore plus d’armes comme le Brésil ou le Mexique


Le criminologue Xavier Raufer analyse la tuerie perpétrée dans une école primaire au Texas. Rien de nouveau sous le soleil américain, hélas, les tueries se suivent et se ressemblent et ne font que révéler un problème profond qui ne se résoudra pas par la régularisation des ventes d'armes comme on se plaît à croire en Occident.




Marc Eynaud. Dans la petite ville d’Uvalde, au Texas, un homme, Salvador Ramos, 18 ans, ouvre le feu dans une école primaire et assassine 19 enfants. Ce drame terrible a évidemment ému la planète.


C’est finalement le énième drame américain.


Xavier Raufer. Depuis les années 60 du XXe siècle, on compte en moyenne, pour les cas les plus graves, quelques dizaines de tueries de masse par an. Ce n’est pas la première fois. Souvenez-vous, il y a quelques années, à Las Vegas : il y avait eu près de 70 morts. C’est quelque chose de régulier aux États-Unis. Ce sont des bouffées de rage délirante d’individus qui sortent une arme à feu, qui vont dans la rue et qui tuent caractéristiquement des gens qu’ils ne connaissent pas.


M. E. D’après les premiers éléments de l’enquête, Salvador Ramos aurait été harcelé dans cette école et ce serait éventuellement une forme de vengeance. Ces raisons suffisent-elles à expliquer cette tuerie ou est-ce un problème beaucoup plus profond et plus américain ?


X. R. En observant de près tous les auteurs de ces tueries sur les quarante dernières années, ils reflètent exactement la population américaine. Quand on compte combien de Noirs, de Blancs, de gens issus des îles Samoa du Pacifique, on se rend compte que la mosaïque de la population américaine est reflétée dans les tueries de masse. Ce ne sont pas particulièrement des extrêmes qui tuent, mais la population américaine est reflétée à peu près exactement dans les auteurs de tueries de masse.


M. E. À chaque fois qu’un tel drame arrive, le débat sur la liberté d’être armé reprend. Ce débat fait-il sens ? En légiférant davantage sur le port d’arme, pourrait-on limiter de telles tueries ?


X. R. C’est naturellement une des formes les plus récurrentes du gâtisme du journalisme dit d’information que l’on subit en France ! C’est totalement faux et cela n’a rien à voir.


Comparons avec d’autres pays. Il y a beaucoup plus d’armes en circulation, en comparaison et surtout dans le milieu criminel, au Mexique et au Brésil qu’aux États-Unis. Il y a zéro tuerie de masse comme celles que l’on voit aux États-Unis, bien que les armes soient plus abondantes.


Il y a plus d’armes dans certains pays, mais sans avoir ce genre de tueries de masse. Par conséquent, l’explication est ailleurs. Si l’explication était par les armes, un enfant de quatre ans comprendrait qu’il y aurait plus de tueries dans les pays où il y a encore plus d’armes comme le Brésil ou le Mexique. Or, ce n’est pas le cas.


Neuf fois sur dix, ce genre de tuerie se produit dans des pays plutôt de culture anglo-saxonne ou protestante. Dans les pays catholiques, il n’y a pratiquement pas ce genre de tueries. Cela arrive dans des endroits où la bienséance politiquement correcte est tellement écrasante que 999 habitants de ces pays la subissent et la supportent. Et de temps en temps, il y en a un qui explose et qui, ne supportant plus, prend son arme à feu et tire sur tout le monde.


Le FBI a fait une enquête extraordinairement fouillée. On ne sait toujours pas pourquoi l’homme de la tuerie de Las Vegas a agi. Il avait une soixantaine d’années, il était plutôt prospère dans la vie et avait deux maisons. Ce n’était pas le révolutionnaire, l’anarchiste, pourtant il est monté au sommet d’un hôtel et a tiré sur tout le monde.


En majorité, on ignore les raisons pour lesquelles ils tuent. Ce sont souvent des hommes, car ils ont la capacité à utiliser les armes à feu. C’est plutôt une spécificité masculine que féminine. Ces gens ne sont pas bien dans leur peau et ont majoritairement un passé psychiatrique. Si vous faites le total de tous les individus aux États-Unis correspondant à ces critères-là, vous aurez à peu près 50.000 personnes. Ce n’est donc pas un profil. Les milliards dépensés depuis une trentaine d’années pour essayer de savoir le profil précis ont à ce jour tous échoué.