Ça suffit! Labeaume presse Québec d'empêcher les villes de renflouer les régimes de retraite

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Passage délicat en vue

Une situation insoutenable qui nécessite un remède législatif rapide. Devant des régimes de retraite qui drainent une partie des finances publiques, les villes de Montréal et de Québec exhortent l’Assemblée nationale à leur donner les coudées franches pour s’attaquer à ce qu’elles décrivent comme un problème, non pas conjoncturel, mais structurel.

Au dernier jour des audiences de la commission des Finances publiques portant sur le rapport D’Amours et l’avenir de la retraite, les municipalités sont venues plaider un rapport de force trop faible dans les négociations avec les syndicats et le besoin, selon elles, d’avoir un projet de loi dès l’automne.

« Jusqu’à présent, on utilise la carte de crédit au maximum », a dit le maire de Québec, Régis Labeaume, selon qui « il n’est pas question » de renflouer les déficits des régimes des employés de la Ville avec l’argent des contribuables.

Le rapport D’Amours, déposé ce printemps, propose notamment une nouvelle « rente longévité » pour les travailleurs de 75 ans et plus, un programme de 4 milliards qui serait financé par les employeurs et les employés. Pour les villes, il propose de permettre des changements unilatéraux aux régimes de retraite si la tenue de négociations pendant trois ans ne porte pas fruits.

Le déficit des régimes de retraite de la Ville de Québec était de 580 millions à la fin de 2012, a dit le maire Labeaume. En utilisant une méthode de « capitalisation améliorée », avancée par le rapport, ce déficit grimpe à 1,3 milliard, a-t-il dit.

« N’oublions pas que 61 % des travailleurs ne bénéficient pas d’un régime à prestations déterminées ou à cotisations déterminées. C’est inéquitable, complètement injuste et, je le répète, il n’est pas question pour la Ville de Québec de faire payer la totalité des déficits des régimes par des gens qui n’en ont pas, c’est-à-dire les contribuables », a ajouté M. Labeaume.

Selon lui, « dans le cadre légal actuel, il est impossible d’être équitable », car « ce sont seulement les contribuables et les employés actuels qui assumeront le problème ». « L’équité et une solution réaliste impliquent que tous participent à la restructuration de nos régimes de retraite : employés, bénéficiaires, retraités et contribuables. »

Déficit global de 41 milliards

Le rapport du comité D’Amours, présidé par Alban D’Amours, ex-président du Mouvement Desjardins, propose une vingtaine de recommandations pour alléger la pression qui s’accumule sur les régimes à prestations déterminées. Au Québec, 7 régimes sur 10 traînent un déficit de plus de 20 %, pour un grand total de 41 milliards divisés à parts égales entre régimes privés et publics.

Les audiences de la commission ont permis d’entendre une quarantaine de points de vue. La journée d’hier, principalement consacrée aux villes, a aussi été marquée par le maire Jean Tremblay, de Saguenay, de même que par l’Union des municipalités du Québec. Ont aussi figuré des regroupements du patronat, des cabinets d’actuaires, des syndicats (CSN, FTQ, SCFP, etc.), des organismes (Fédération des femmes du Québec) et des entreprises privées (Bombardier, Cascades, Transcontinental).

L’intervention du maire Labeaume a choqué le représentant du Syndicat canadien de la fonction publique, Marc Ranger. Ce dernier plaide que la Ville de Québec « est à peu près la seule actuellement qui n’est pas capable [de régler avec ses syndicats] » et que ça ne justifie pas qu’on donne le pouvoir de décréter à tous. « Pendant qu’on a des règlements puis que ça marche, on se fait insulter. »

Plus cher que le transport en commun

Aux yeux de Michel Bissonnet, qui représentait la Ville de Montréal, la période de négociations entre une ville et les participants d’un régime est trop longue. Le comité propose cinq ans : trois ans de pourparlers, suivis d’une période de deux ans pendant laquelle une ville pourrait imposer des décisions unilatérales. « Il faut un délai serré. Ça devrait être raccourci à un an », a dit le maire de l’arrondissement de Saint-Léonard et membre du comité exécutif de la Ville.

Avant la fusion des villes de l’île de Montréal, en 2002, il y avait environ 45 régimes et ceux-ci ont été fusionnés lors de la naissance de la nouvelle ville.

« Les cotisations de Montréal aux régimes de retraite ont presque quadruplé depuis 2002, a dit M. Bissonnet. Qui aurait pu prédire cela ? De 137 millions en 2002, elles atteindront plus de 510 millions en 2014, soit 10,5 % du budget de la Ville. C’est beaucoup plus important que les sommes versées au transport en commun, soit 401 millions. »

« On a vraiment essayé […] de parler aux partenaires syndicaux », a dit Robert Blais, actuaire à la Ville de Montréal. « On a huit syndicats. On a eu de l’action avec l’un d’entre eux. Ç’a été difficile, mais on est fiers. On a bien travaillé ensemble. Mais sept autres ne se sont pas rendus là. Et je ne leur en veux pas. Ce sont des droits acquis. Mais qui va payer ? »

Les villes et leurs 216 régimes
Le monde municipal compte 216 régimes à prestations déterminées qui sont gérés par 108 villes, a dit Éric Forest, maire de Rimouski et président de l’Union des municipalités du Québec (UMQ). « Certains semblent souhaiter que le rapport D’Amours soit mis de côté. Pour l’UMQ, ce n’est pas une option. Au contraire, certaines recommandations de ce rapport, comme l’âge minimal de la retraite à 55 ans, doivent être appliquées immédiatement », a-t-il affirmé.

L’UMQ souhaite aussi que les coûts du service et des déficits découlant des services futurs soient partagés à parts égales entre l’employeur et les participants.


Avec Isabelle Porter


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