Le maintien du contrat de véhicules blindés entre le Canada et l’Arabie saoudite découle de la doctrine de la « conviction responsable » que le ministre des Affaires étrangères dit avoir l’intention de suivre.
Dans une allocution prononcée mardi à l’Université d’Ottawa, Stéphane Dion a de nouveau défendu la décision du gouvernement libéral d’honorer cette entente d’une valeur de 15 milliards conclue sous le précédent gouvernement conservateur.
Il a réitéré que l’annulation du contrat pourrait entraîner des « amendes salées » pour le Canada, refusant toutefois de préciser quel pourrait être le montant de cette pénalité financière lorsque la question lui a été posée après son allocution.
Le ministre Dion a également fait valoir qu’il importait peu, pour Riyad, « que l’équipement vienne d’une usine de Lima, en Ohio, ou de Stirling Heights, au Michigan, plutôt que d’une usine de London, en Ontario ».
Cet argument a plus tard été qualifié de « très, très faible » par l’ex-haut commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Louise Arbour, l’une des oratrices invitées à la conférence « Le Canada sur la scène internationale », qui se tient mardi et mercredi à l’Université d’Ottawa.
« De dire: "Si ce n’est pas nous qui allons faire ça, quelqu’un d’autre va le faire", à mon avis, ça ne dit rien à propos de nos choix de valeurs », a-t-elle dit lors d’une mêlée de presse.
« Si on se servait de ça comme argument, on pourrait excuser les pires comportements », a tranché Mme Arbour.
La juge à la retraite de la Cour suprême du Canada suggère qu’Ottawa cherche à tirer profit de son lien contractuel pour faire progresser le dossier du blogueur Raïf Badawi, qui est emprisonné depuis plus de trois ans pour avoir critiqué des dirigeants religieux saoudiens.
« Ça ferait plaisir aux Canadiens de voir un pays cocontractant […] faire un geste qui ne leur coûterait pas beaucoup, mais qui aurait beaucoup d’impact, je pense, dans l’opinion publique canadienne envers l’Arabie saoudite », a exposé Mme Arbour.
L’Occident complice ?
Le ministre Dion a par ailleurs refusé de se prononcer sur les écrits de l’un de ses conseillers, Jocelyn Coulon, qui accusait indirectement l’Occident de tolérer la violation des droits de l’homme en Arabie saoudite en échange de lucratives ententes commerciales.
« Il y a longtemps que l’Arabie saoudite a acheté le silence des Occidentaux par ses juteux contrats civils et militaires », a écrit l’ancien directeur du Réseau de recherche sur les opérations de paix dans une lettre ouverte parue en janvier 2016 dans le quotidien La Presse.
Invité à dire s’il partageait cette vision, Stéphane Dion n’a pas voulu se mouiller.
« Je ne veux pas commenter les écrits passés de mes collaborateurs, parce que ça pénalise les gens qui écrivent. À ce moment-là, on embauchera seulement des gens qui n’ont jamais rien écrit de leur vie », a-t-il offert.
« Cela dit, on ne peut pas acheter le gouvernement Trudeau, c’est impossible », a insisté M. Dion.
Rupture avec la doctrine conservatrice
En mettant de l’avant la doctrine de « conviction responsable » dans son discours, Stéphane Dion semble avoir voulu marquer une nette rupture entre la politique étrangère des libéraux de Justin Trudeau et celle qui prévalait sous les conservateurs de Stephen Harper.
Il a ainsi soutenu que le rétablissement des liens diplomatiques avec l’Iran et le réchauffement de la relation avec la Russie suivaient ce principe directeur.
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