Du soldat Delisle à Richard Henry Bain

Le SCRS savait que le soldat Delisle était un espion, mais n’a pas averti la GRC

Chronique de Louis Lapointe

Une dépêche de la presse canadienne du 26 mai dernier a immédiatement attiré mon attention. On y révélait que le SCRS avait laissé un espion vendre des renseignements de l’armée canadienne à la Russie sans qu’elle n’en informe la GRC.
«Ottawa – Les services secrets canadiens ont observé clandestinement un officier de la marine qui a transmis des informations secrètes à la Russie pendant des mois, mais sans en informer la Gendarmerie royale du Canada (GRC).
Il s’agit d’une opération qui n’était pas connue à ce jour, et qui permet de se demander si Jeffrey Delisle aurait pu être arrêté plus tôt.*
La Presse canadienne a appris que le Federal Bureau of Investigation (FBI) a avisé le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRC) des activités illicites que menait le soldat Delisle pour le compte de Moscou bien avant que la GRC ne commence son enquête, en décembre 2011. Les policiers fédéraux l’ont arrêté le mois suivant. Le SCRS avait décidé de ne pas transmettre à la GRC son épais dossier sur Delisle. L’agence de renseignement a choisi de garder son enquête sous scellé par crainte de devoir exposer devant la cour les détails de ses échanges de renseignement de sécurité avec les États-Unis.
Dans un revirement bizarre, c’est le FBI, plutôt que le SCRS, qui a envoyé une lettre à la GRC pour l’informer du fait qu’un militaire canadien revendait aux Russes de l’information sensible, y compris des renseignements classifiés aux États-Unis. La GRC a dû entreprendre sa propre enquête sur Delisle. Le délai a inquiété Washington parce qu’une importante quantité de secrets continuaient à être dévoilés par le militaire. »
Le SCRS savait que le soldat Delisle était un espion, mais n’a pas averti la GRC


*«Il s’agit d’une opération qui n’était pas connue à ce jour, et qui permet de se demander si Jeffrey Delisle aurait pu être arrêté plus tôt.»
Le même genre de question que je posais au sujet de Richard Henry Bain dans ma chronique du 29 septembre 2012:

Devant le silence troublant de la GRC face aux activités de la mafia dans l’octroi de contrats à la Ville de Montréal et compte tenu de ses nombreux manquements antérieurs, je ne peux faire autrement que de me poser la question suivante.
Si la GRC avait su, grâce à des agents infiltrés au sein de mouvements extrémistes ou partitionnistes anglophones du Québec, qu’un attentat se tramait contre Pauline Marois, en aurait-elle informé la SQ et le SPVM chargés d’assurer la sécurité de la première ministre élue le soir du 4 septembre 2012 ?
Il ne faut surtout pas oublier que le principal suspect, Richard Henry Bain, s’est décrit comme un partitionniste lors d’une entrevue téléphonique tenue avec les journalistes de la station radiophonique montréalaise CJAD.
Si la folie peut expliquer en bonne partie son geste, rien n’exclut que des complices aient pu manipuler Richard Henry Bain, sachant qu’il avait tout l’armement requis pour commettre un attentat contre la première ministre élue.
Les agents infiltrés de la GRC jouaient justement le même rôle au sein du FLQ dans les années 1970.
C’est à tous ces événements inexpliqués auxquels a été mêlée la GRC au fil des années que j’ai aussitôt pensé lorsque j’ai assisté en direct à l’attentat raté contre Pauline Marois le soir de 4 septembre 2012 et lorsque j’ai posé cette question dans ma chronique du 6 septembre 2012.
« Comment les forces de l’ordre - la GRC, le SCRS, la SQ et le SPVM - pourront justifier un tel laxisme alors qu’elles connaissaient l’existence au Québec de groupements "partitionnistes" et d’extrémistes anglophones ? »
Quand la GRC ferme les yeux...


***
Du même auteur :
La triade
Quand la GRC ferme les yeux...
« Séparatistes » sous surveillance policière ?
Comme dans un roman de Kafka
De Québec à Tuscon
D'un autre auteur:
Du Pastagate au Baingate

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Louis Lapointe534 articles

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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