Jean Charest en croisade pour sa communauté d'intérêts

Enquête publique - un PM complice?


Il ne fait pas de doute que Jean Charest mérite amplement son salaire de chef du parti Libéral. Le problème, c’est qu’autant Jean Charest est un partisan pugnace et agressif, autant il est un mauvais premier ministre. L’idéal serait que le parti Libéral continue à lui verser un salaire et que l’Etat québécois cesse de lui en verser un. Ainsi sa feuille de paye refléterait mieux ses états de service.
Jean Charest connaît ceux qui constituent un véritable support pour le parti Libéral. Cette source assuré de support, c’est ce que Jean Charest a nommé la « communauté d’intérêts ». Il l’a dit assez souvent : « Le Parti Libéral est une communauté d’intérêts ». Il a souvent spécifié que servir une « communauté d’intérêts » était garant d’une action plus large, plus « inclusive », plus « rassembleuse ».
Jean Charest ajoutait que sa communauté d’intérêts ralliait des gens « impliqués » dans le secteur du bâtiment, de la petite enfance, etc. On comprend mieux ce qu’il voulait dire, l’entendant refuser toute commission d’enquête. Jean Charest craint que sa « communauté d’intérêts » soit touchée par des accusations de népotisme. « Ma communauté d’intérêts est la base du parti Libéral, se dit-il, et le parti et l’Etat Québécois doivent supporter des alliés aussi généreux. »
Aux « bâtisseurs », on doit ajouter à la « communauté d’intérêts » du parti Libéral les activistes canadiens. La communauté d’intérêts du parti Libéral est une famille d’esprit qui rallie d’un océan à l’autre. Le parti Libéral est très ouvert à l’influence de penseurs pour lesquels le Québec est un maillon du développement futur du Canada. Le développement du Québec, affirment-ils avec la régularité d’un mantra, ne pourra se faire que sur la base du Canada, à travers le Canada, en suivant l’exemple de la société canadienne.
Ainsi ils ont fait savoir depuis quelques années déjà l’importance d’une hausse des tarifs d’électricité dans la « province », un mot qui ne dérange absolument pas Jean Charest. La hausse des tarifs d’électricité pourrait servir d’amorce à une politique de parité avec le reste du Canada. Il serait plus facile alors de lier le Québec à un axe de libre-circulation de l’énergie est-ouest.
Jean Charest s’y est attelé dès son premier mandat mais comme il était très impopulaire, il attendit dans l’ombre le bon contexte, le bon contexte pour servir sa communauté d’intérêts en cette matière. Pas de problème, car il n’avait pas attendre pour fournir la marchandise dans tant d’autres domaines… à sa communauté d’intérêts.
C’est ce qui explique que le gouvernement de Jean Charest ne se soit pas inquiété que des devis entraînent des coûts supérieurs de quarante pour cent à ceux auxquels on serait en droit de s’attendre. Il faut un esprit d’ouverture. Les normes de droit sont un cas particulier des normes plus générales, celles que connaît bien la « communauté d’intérêt ».
L’action de Jean Charest voulait par ailleurs que le Québec devienne un membre modèle au sein d’un syndicat de province. Ceci devait ouvrir une nouvelle ère de coopération après celle de la confrontation, comme il le disait si bien. Néanmoins, on voit que l’achat du principal distributeur d’électricité du Nouveau-Brunswick par Hydro-Québec, sème la méfiance. On entend poindre des théories du complot à propos des visées maléfiques du pouvoir québécois qui rappellent les discours sur les menées du pouvoir juif.
Bien sûr, il ne faut pas croire que tout s’arrête là. Pour amadouer les partenaires canadiens, Jean Charest est d’avis avec ses conseillers du Canada, de la nécessité de montrer que le Québec développe le Canada de façon créatrice. Par exemple, signer un accord de libre-circulation de l’énergie et accepter d’inscrire le bilan du Québec en matière d’émission de carbone dans le bilan énergétique global du Canada, eh bien, ce serait une preuve de bonne volonté. Si le Québec veut de la bonne volonté, fait-on valoir auprès de Jean Charest, il faut que la «province » en montre encore plus.
Pourquoi pas un pipeline pour drainer le pétrole issu des sables bitumineux d’un océan à l’autre? Ce serait une construction stable qui se prête plus au partenariat public-privé qu’un organisme complexe et évolutif comme le CHUM. Jean Charest n’y a pas encore pensé. Attendez. Le chef de parti alias le premier ministre du Québec sait que s’il y a une bonne idée quelque part, sa « communauté d’intérêts » lui fera connaître son interprétation scientifique de ses intérêts.
La « communauté d’intérêts » du parti Libéral a des idées intelligentes. Elle est de bonne volonté et elle veut exclure l’erreur par principe, pense Jean Charest. C’est justement pour prévenir les fausses accusations, les erreurs malvenues qu’il ne faut pas de commission d’enquêtes sur les malversations, se fait dire ce chef de parti, nommé accessoirement premier ministre. Tout le monde peut parler. Tout le monde peut juger tout le monde, déplore la « communauté d’intérêts » à l’oreille de Jean Charest.
« Vous n’avez qu’à dire à la population qu’une commission d’enquête altère la conception officielle du droit et le travail de la police. Dites que les normes du droit seront mieux servies autrement. Dites-leur qu’il n’y a pas d’appareil monstrueux, quelques bandits tout au plus, et qui seront démasqués. »
Non, il n’y a pas d’appareil monstrueux, seulement une communauté d’intérêts qui veut que le Québec reste une province et que ses normes de droit demeurent les normes les plus passives possibles.
André Savard


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