Le gouvernement Couillard a dépêché quatre ministres pour rassurer la population sur son intention d’appliquer les recommandations de la commission Charbonneau. L’initiative est tardive, mais elle n’est pas dénuée de mérite.
C'est une conférence de presse qui tombait bien mal. Au lendemain de la publication d’un sondage dévastateur de Léger dans Le Devoir et Le Journal de Montréal, un quatuor formé de Sam Hamad, Stéphanie Vallée, Rita De Santis et Jacques Daoust a présenté un « état de situation » sur la mise en oeuvre des recommandations de la commission Charbonneau.
Sept répondants sur dix croient que la corruption est « un phénomène répandu » au Québec. Près de huit répondants sur dix s’attendent à ce que d’autres politiciens soient arrêtés pour des gestes de fraude et de corruption dans un avenir rapproché.
Le Québec est désabusé de ses élus. À l’Assemblée nationale, les partis d’opposition croient être en mesure de marquer des points dans l’opinion publique en frappant sur le clou de l’éthique et de l’intégrité des libéraux. Un coup de sonde ne fait pas le printemps, mais les résultats du récent sondage démontrent qu’une écrasante majorité de Québécois n’a plus confiance dans la classe politique tout entière.
Dans ce climat délétère, les libéraux ne perdraient rien à repousser l’examen du rapport de la commission Charbonneau, et ils ne gagneront rien avec l’annonce de jeudi, tellement son importance est marginale en regard du poids du cynisme ambiant.
Quatre mois exactement après le dépôt du rapport final de la commission Charbonneau, il y avait de sérieuses raisons de s’interroger sur les intentions du gouvernement de mettre en application les recommandations, outre celle portant sur la nécessaire protection des lanceurs d’alerte.
La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a assuré que le rapport n’a pas été mis sur une tablette. Sa sortie ne rétablira pas à elle seule le lien de confiance du public à l’égard de la classe politique. Par contre, l’engagement libéral est maintenant clair. Oui, le rapport aura une vie. Tous les efforts pour assainir les moeurs dans l’industrie de la construction et dans le financement des partis politiques n’auront pas été vains.
Le gouvernement sera jugé aux résultats. Sans présumer de l’aboutissement des réflexions dans les officines gouvernementales, il y a lieu d’être à la fois rassuré et inquiet.
La création d’une Autorité des marchés publics (la première recommandation du rapport) est rassurante. L’instance nationale obtiendrait la responsabilité de surveiller en permanence les marchés publics, afin de détecter les malversations.
Le resserrement de la loi électorale est rassurant. Les chefs seraient enfin imputables des pratiques de sollicitation de leurs formations et de leur légalité (finies, les excuses du genre « je n’avais pas à savoir ça »). Le registre des donateurs comprendrait aussi des informations sur l’identité et l’employeur du donateur, une mesure essentielle pour débusquer les prête-noms.
La suspension provisoire des élus de l’Assemblée nationale traduits en justice pour des accusations de corruption ou de collusion, dans l’attente de leur procès, est aussi rassurante.
Les inquiétudes portent sur les autres recommandations, qui pourraient tomber dans l’oubli, à commencer par l’adoption d’une loi sur la facturation frauduleuse. Aux États-Unis, cette loi permet au premier dénonciateur d’actes de collusion de toucher de 15 à 30 % des sommes récupérées par l’État à la suite d’un procès. Ces lois, en vigueur au fédéral et dans une trentaine d’États, ont permis de récupérer quelque 35 milliards $US en 25 ans.
Le Barreau a réservé un enterrement de première classe à cette recommandation qui frappe les pros de l’entente secrète dans leur portefeuille. L’État doit transcender les intérêts corporatistes, et explorer cette avenue prometteuse.
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CORRUPTION
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