Les idées de gauche n’ont
plus vraiment cours au
Québec ou ailleurs au pays.
Dès qu’un tribun exprime et
défend un point de vue gauchi sant, on crie haro sur son opinion,
la jugeant trop radicale. Cela n’est
pas une attitude frileuse, mais de
la pure couardise. Pas étonnant
alors que La Reine-Nègre et autres
textes vaguement polémiques
(Trois-Pistoles, 2010), le plus
récent recueil de textes d’opinion,
de chroniques et de causeries de
Victor-Lévy Beaulieu, soit resté
presque sans écho. Cela m’attriste car, Michel Chartrand et Pierre
Falardeau n’étant plus là, Beaulieu
est un des derniers éveilleurs de
notre léthargique conscience
collective.
Le titre de l’essai, emprunté à
un texte d’opinion (L’aut’journal
mai 2008) interpellant la
Gouverneure générale Michaëlle
Jean, a soulevé les passions. S’en
suivit une dérive verbale comme
si les rois ou les reines-nègres
n’étaient que noirs de peau. Or,
la locution vilipendée ne fait
aucune référence à la couleur
des gens, mais à leur engagement par-devers une minorité
dont ils sont les pantins. Cela dit,
passons au contenu des propos
beaulieusiens.
Que ce soit dans des médias
nationaux, notamment Le
Devoir, La Presse ou Le Soleil, et
les journaux de la presse parallèle tels Le Couac ou L’aut’journal, Victor-Lévy Beaulieu
s’exprime sur la place publique
depuis plus de quarante ans. Il y
a fait paraître de nombreux textes traitant de société, de politique et de culture; il a également
tenu des chroniques régulières.
Puis, au fil des ans, il a rassemblé sous forme de livre les textes
dont il a voulu assurer la pérennité. Ainsi sont parus Entre la
sainteté et le terrorisme (1984),
Chroniques polissonnes d’un
téléphage enragé (1986) et
Chroniques du pays malaisé,
1970-1979.
Le dernier de ces miscellanées
propose des chroniques politiques
dans lesquelles VLB exprime sans ambages son point de
vue sur des événements précis
de l’actualité et ceux qui font la
nouvelle. Ainsi rassemblées, le
sens et la portée de ses proses
corrosives vont au-delà de la
colère du moment, car elles
dégagent une réelle pensée
soci le et politique. Je regrette de
ne pas y retrouver le programme électoral que le Pistolois a
défendu et qui me semble le seul
vrai projet politique à portée
sociale depuis le lointain Jean
Lesage et les premières lignes
d’action de René Lévesque.
Cette pensée sociétale se
retrouve aussi dans les billets
traitant de la téléquébécoise
dont la qualité régresse comme
peau de chagrin depuis que régie
par l’applaudimètre. Quant aux
nombreuses chroniques littéraires,
elles rappellent que Beaulieu
est un lecteur boulimique, et que
sa critique de la littérature et de
ceux qui la font est éclairée.
D’autre part, j’ai bien aimé
relire l’adresse qu’il a faite à
Michel Chartrand à l’occasion
de ses 90 ans, ainsi que l’hommage rendu à la mémoire de
Marc Veilleux, son ami imprimeur.
Enfin, trois textes de chroniqueurs s’adressant à VLB complètent La Reine-Nègre et autres textes vaguement polémiques:
«L’Irlande top tôt», une
entrevue réalisée par Lise
Gauvin et Robert Laplante en
1981; «La spirale Victor-Lévy
Beaulieu», une entrevue de
Francine Bordeleau ( Lettres
québécoises no 105, printemps
2002); et «Souveraine solitude»,
une lettre de Josée Blanchette
(Le Devoir, 28 novembre 2008)
suivie de la réponse de VLB.
Voilà des pages de lecture
incontournable pour celles et
ceux qui ne craignent pas le choc
des idées claires et détestent la
langue de bois. ■
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