En cette avant-veille de la fête du « plusse meilleur pays du monde », nous pouvons nous demander si notre langue, parlée par seulement 2 % de la population de l’Amérique du Nord, sera toujours là dans cinquante, cent ou deux cents ans.
Nos maîtres plus ou moins puissants discutent des destinées du Canada sans trop se soucier de sa composante identitaire française, la seule qui pourtant le distingue essentiellement des États-Unis. Stephen Harper a osé reconnaître le Québec en tant que « nation » il y a quelques années… Mais l’histoire d’amour avec les électeurs du Bloc québécois dont rêvait le chef du Parti conservateur (qui souhaitait rééditer l’exploit électoral de Mulroney qui catalysait le vote bleu en 1984) n’a pas eu lieu. Les Québécois ont eu l’étourderie de voter orange en raison du beau sourire moustachu de feu Jack Layton… et Harper s’est replié sur le Canada anglais, les Québécois étant devenus trop peu nombreux pour faire pencher la balance du côté de leur premier choix… Or, on apprenait la semaine dernière que le PM canadien est venu s’entretenir de la question québécoise avec Brian Mulroney et Jean Charest… Ce regain d’intérêt pour notre peuple n’est probablement pas étranger au fait que le NPD devance maintenant le PC dans les sondages et que, de surcroît, Pauline menace de prendre le pouvoir.
Jean le fantôme
En prévision d’élections automnales de plus en plus probables au Québec, un Jean Charest pâle sur fond blanc (sans doute une manière de le faire passer pour un pur), nous serine des rengaines propagandistes au sujet des décisions difficiles qu’il prendrait pour le bien de son peuple… Il n’a pourtant jamais daigné lever le petit doigt pour défendre l’identité québécoise. Quant à sa ministre Christine Saint-Pierre, en huit ans, elle n’a jamais cherché à protéger celle des deux langues officielles du Canada qui s’avère toujours moins égale et moins officielle que l’autre…
Grâce à Jean le fantôme, on va même imposer l’apprentissage intensif de l’anglais à tous les morveux en sixième année…, et ce, même aux enfants de Montréal que l’on a toute la misère du monde à faire parler en français dans les corridors ! Et la réciproque – l’apprentissage intensif du français aux petits anglais – ne sera pas exigée.
Opportunisme électoral
Parce que des élections sont dans l’air, soudainement, l’Office québécois de la langue française montre les dents… pour la première fois depuis 2003 ! Dans une chronique la semaine dernière, un de mes collègues du Journal se disait gêné d’imposer un descriptif français aux commerçants qui barbouillent nos paysages de raisons sociales en anglais. Je ne vois pas de mal à rappeler notre statut de nation française dans un contexte où notre langue est celle de seulement 2 % des gens.
Faut-il se laisser faire (et faire exprès de se laisser faire) quand l’Amérique anglophone menace d’engloutir nos 400 ans d’enracinement dans une uniformisation détestable ? Devrons-nous fermer les portes du ministère du Tourisme dont les publicités carburent toujours avec le taste of difference (goût de la différence) au Québec ? Un nouveau slogan pourrait être : « A place like everywhere else » (Un endroit comme partout ailleurs).
Cessons d’avoir des convictions à géométrie variable. Et rappelons à ce Canada anglais que sans nous, il perd la dualité qui fait son âme. Stephen Harper aura alors beau se démener pour raviver les symboles britanniques de l’ancien dominion, le « plusse meilleur pays du monde » ne sera jamais rien de plus qu’une succursale des États-Unis.
Nos problèmes identitaires risquent de continuer à se corser puisque, malgré l’avalanche de scandales de corruption, Jean Charest pourrait reprendre le pouvoir grâce à ses ti-amis les étudiants manipulateurs qui font pour une cinquantaine de cennes par jour un chahut digne des grandes causes nationales qui les laissent indifférents.
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