Le mépris systémique

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L'éternel retour de la haine envers le Québec au Canada anglais

Accepterait-on toute autre manifestation de mépris que celle qui vise le Québec?  


Ce n’est pas banal, des politiciens du Canada anglais qui encouragent, qui incitent au mépris du Québec. Du lot, celui qui, fort probablement, occupera la chaine de PM de l’Alberta lors des prochaines élections dans cette province, un ex-ténor du gouvernement Harper.  


On ne parle pas ici d’obscurs politiciens de formations politiques marginales.  


On répand des faussetés à propos du Québec pour attiser encore plus le ressentiment envers lui; on en appelle au boycott de tout ce qui y est produit. Encore une fois, rien de banal.   


Et pourtant, sentez-vous un grand vent d’indignation chez nous? Les médias se fendent-ils de textes pour dénoncer cette ignominie? Tsé, mettons, comme quand, à l’unisson, ils se sont levés pour dénoncer les attaques méprisantes de Doug Ford contre la francophonie ontarienne?   


Non.  


Pourquoi?   


Car le mépris du Québec est le dernier rempart acceptable du mépris. Surtout si cela vise des nationalistes et des indépendantistes.   


Auquel cas c’est «open season» comme ils disent à l’ouest de la rivière des Outaouais. On est loin du Love-in de 1995 n’est-ce pas!  


Hier, le site de Radio-Canada Alberta rapportait ceci :   


«L'hostilité de certains Albertains envers le Québec s'est manifestée lundi lors d'une manifestation propipeline à Calgary. Le maire Naheed Nenshi a été accueilli par des huées quand il a voulu prononcer quelques mots en français devant une foule de 2500 personnes rassemblées en soutien à l'industrie pétrolière.»  


C’est vraiment pas joli. Des milliers d’Albertains qui huent le maire d’une des plus grandes villes du Canada, car il ose parler français ; le tout pour bien envoyer le message qu’ils en ont ras-le-bol des Québécois. Remarquez que cela n’a pas eu une très grande résonnance médiatique. Imaginons des milliers de citoyens de Québec qui huent leur maire, car il parle anglais. Ça fait la nouvelle selon vous ?  


Québec, « gros consommateur de pétrole saoudien »... et de péréquation!  


Un mensonge que certains médias anglophones aiment bien entretenir, en le répétant autant que possible en espérant en faire une vérité, la prétention que le Québec préfère s’approvisionner en pétrole auprès de régimes infréquentables comme l’Arabie saoudite plutôt que du côté du pétrole de l’Ouest canadien.  


Le caricaturiste Mackay en a peint une image qui est rapidement devenue virale. Le Québécois étant assis au sommet d’une pyramide de pétrole au sommet de laquelle un baril de pétrole saoudien.   


Pourtant, ce « fake news » a été démonté plusieurs fois. Cela empêche-t-il les politiciens de l’ouest de s’en servir pour nourrir le ressentiment anti-québécois? Bien sûr que non. Ceci de Tristan Hopper dans The Montreal Gazette le 11 décembre dernier :   


«Legault shot down any hope for a revival of the Energy East pipeline saying “there’s no social acceptability (for oil) in Quebec.”  


Albertans are correct that Quebec has penchant to disparage Athabasca oil while simultaneously fuelling their cars with petroleum from some of the worst regimes on earth. They are also correct that Quebec disproportionately benefits from federal treasuries flush with Alberta oil money. »  


(Traduction : Legault a anéanti tout espoir de revitaliser l’oléoduc Énergie est en déclarant qu ’« il n’y a aucune acceptabilité sociale (pour le pétrole) au Québec ».  


Les Albertains ont raison de dire que le Québec a tendance à dénigrer le pétrole d'Athabasca tout en ravitaillant leurs voitures avec le pétrole de certains des pires régimes de la planète. Ils ont également raison de dire que le Québec profite de manière disproportionnée des trésors fédéraux engrangés surtout par les fonds pétroliers albertains.)   


La réalité, comme on le soulignait récemment dans L’Actualité, « le volume de pétrole canadien raffiné au Québec a augmenté de plus de 50 % de 2015 à 2017 ». Ce dossier signé par Jean-Philippe Cipriani montre que le Québec importe plus de 80% de son pétrole soit du Canada (45%) ou des États-Unis (38%). Aucun pétrole de l’Arabie saoudite dans le lot.   


Pas grave, on continue de propager des mensonges à propos de l’approvisionnement du pétrole au Québec, à propos de la péréquation (quand voyez-vous les médias anglophones référer à la part de péréquation en fonction du prorata de la population ?), toujours en soufflant un peu plus fort sur les braises du ressentiment anti-Québec.  


On félicitera le PM du Québec qui tient son bout en ce qui a trait au pétrole de l’ouest et à l’oléoduc Énergie est.   


On pourrait répondre aux gens de l’Ouest que le pétrole des sables bitumineux a certainement quelque chose à voir avec le fait que le Canada se classe dans les bas-fonds du Climate Change Performance Index 2019 (qui recense la performance climatique des 56 États qui comptent pour 90% de la production de GES dans le monde. Et sur ces 56 États, le Canada est 49e.   


C’est peut-être à ça que référait François Legault en qualifiant de « sale » le pétrole albertain.   


Remarquez, François Legault a dit bien peu de choses quand on compare cela à la charge virulente anti pétrole bitumineux du prestigieux magazine américain Foreign Policy qui avait traité le Canada «de gentil voisin autrefois qui est devenu un insouciant État pétrolier paria»...   


Mais comme toutes les unions qui durent trop longtemps, inévitablement, le ton devient acrimonieux, et la séparation finit par s’imposer comme option la plus pertinente...