Nous, les critiqueux...

Médias et politique



Avez-vous remarqué une chose? Aujourd’hui, dès qu’on critique les États-Unis, c’est-à-dire le gouvernement de ce pays, et non pas sa population, on se fait tourner en ridicule, on nous accuse d’être des vieux militants déphasés qui critiquent ce «grand pays démocratique», comme si on était incapable de discerner entre le bon et le mauvais, entre Bush et Obama, par exemple.
Comme si on s’opposait au gouvernement des États-Unis «pour jouir automatiquement d’un capital de sympathie dans certains milieux prétendument progressistes» (dixit un chroniqueur). Alors que c’est tout le contraire qui se produit...
On critique la guerre en Irak (plus de 1 million de morts!)? On est des antimilitaristes bébêtes. Pourtant il a été démontré que le gouvernement Bush a déclenché la guerre et envahi l’Irak sous des prétextes fallacieux et que la véritable raison était le contrôle de l’or noir et de cette région stratégique.
On critique la guerre en Afghanistan? On est des malades mentaux qui veulent que les talibans détruisent les écoles et empêchent les femmes de s’émanciper.
On critique la position des États-Unis vis-à-vis de Cuba? On est de vieux gauchistes nostalgiques, des dinosaures qui prennent leurs rêves des années soixante pour la réalité, on a des oeillères, on est bornés... «et puis, retournes-y donc si t’es pas content de vivre ici!» m’a-t-on crié plusieurs fois.
On critique l’appui militaire et politique que les États-Unis fournissent à Israël? On est des antisémites déguisés en antisionistes, des antioccidentaux primaires, on a «le jugement déformé par la haine».
On accuse les États-Unis et le Pentagone d’être derrière le coup d’État au Honduras? On est des paranos finis qui voient des complots américains partout et qui ne comprennent rien à la doctrine des «guerres préventives».
On critique la torture pratiquée par la CIA sur des prisonniers de guerre? On est des faiblards et des moumounes pétris de «bons sentiments» qui ne comprennent pas que grâce à ces «interrogatoires musclés» (sic!), les services de renseignement américains ont obtenu des aveux et des informations importantes qui ont permis de protéger la population contre d’éventuels complots.
On rappelle la participation de Washington à la sale guerre en Amérique latine dans le cadre de l’Opération Colombo et du Plan Condor (200 000 morts et 45 000 disparus au Guatemala, 75 000 morts au Salvador, des milliers de morts et de disparus en Argentine, en Uruguay, au Brésil, au Chili, en Colombie, au Paraguay, au Nicaragua, etc.) et on se fait accuser de sortir des squelettes qui sentent les boules à mites, de ne pas être objectifs, parce que les militaires et les dictateurs ne faisaient qu’écraser des guérillas communistes.
On critique l’obsession maladive des États-Unis qui voient des terroristes un peu partout, aussi bien chez eux qu’à l’extérieur de leurs frontières? On passe aussitôt pour des naïfs qui ouvrent la porte à Al Qaeda et aux attentats suicides ou pire, des supporters de terroristes islamistes qui «veulent semer la mort en Occident». Après tout, «il n’y a rien d’effrayant à être de plus en plus contrôlés dans nos vies privées car c’est pour notre sécurité».
Bref, on «critique pour critiquer», on ne fait que de la simple «rhétorique anti-USA», mais pour s’attirer quoi au juste? Rien! Que des insultes, que des critiques de la majorité, de l’immense majorité des journalistes et chroniqueurs d’ici. Avouez que c’est une position plutôt inconfortable que celle de se retrouver toujours minoritaires, et qu’il n’y a aucun bénéfice au bout de la ligne.
Ces prises de position des journalistes laissent supposer qu’il y a consensus, unanimité au sujet de la condamnation de l’empire américain, ce qui est loin d’être le cas, même si une majorité au Québec s’oppose à la guerre en Afghanistan. Cette condamnation majoritaire de la guerre, je ne sais pas pourquoi, a l’heur d’irriter certains journalistes et chroniqueurs inspirés, qui s’empressent toujours de faire le contrepoids, avec des formules toutes faites, comme celles signalées ci-dessus... «Combattre à coups de bons sentiments est radicalement insuffisant.» «Nos soldats ont une mission à accomplir, celle de la défense des valeurs occidentales... Il nous faut gagner le cœur des Afghans...»
Il faudra un bon nombre de cardiologues au sein de l’armée canadienne pour réussir à gagner le cœur des Afghans.


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