Reconquérir le français : une nécessité vitale

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« La maîtrise de la langue nous tire tous vers le haut »

On s’inquiète avec raison de la maîtrise très approximative de la langue française par de trop nombreux cégépiens québécois.  


Ils sont québécois et pourtant, leur propre langue leur échappe. Ils la mutilent. Pire encore : ils sont nombreux à banaliser la chose. 


La chose n’est pas banale.


Certains ont voulu les convaincre que la langue n’a pas de génie propre, qu’elle n’est qu’une technique de communication qui peut se délivrer de sa structure formelle et du respect de ses règles.


Pourvu qu’on se comprenne, répètent-ils souvent, sans prendre conscience, justement, qu’une langue mal écrite et mal parlée est une langue mal comprise, qui vire au dialecte, et qui ne sera plus d’aucune utilité un jour.




La culture du texto


Poursuivons : la langue se déstructure aussi sous la pression de l’anglais, qui la colonise à la fois dans son vocabulaire et ses structures de phrase. Halte aux anglicismes !


Notre langue souffre aussi de la culture du texto, qui pousse même les meilleurs esprits à écrire comme des débiles, à coup d’abréviations improbables et d’émojis. 


Elle souffrira demain, soyons-en certains, de la pseudo-écriture inclusive, cette abomination mentale qui finira par détruire la langue en la rendant illisible, en plus de déformer sa structure. 


Quelle sottise que l’écriture inclusive ! 


Ses promoteurs laissent croire, par définition, qu’avant elle, la langue française était exclusive – en gros, elle serait sexiste, transphobe et hostile aux minorités, ce qui est aussi faux qu’imbécile.


Elle s’impose par l’intimidation : qui ne l’emprunte pas est soupçonné de complicité idéologique avec l’exclusion ! 


Celui qui voudra un jour l’enseigner à l’école, je l’accuserai d’assassiner notre langue, en plus de la martyriser. 




Rupture avec la littérature


Mais poursuivons notre réflexion sur la langue : elle souffre depuis longtemps de sa rupture avec la littérature, oserais-je dire. 


Je m’explique : la meilleure manière d’apprendre la langue, c’est encore de l’apprendre dans les grandes œuvres à travers lesquelles elle dévoile son génie. 


Je parle des grands romans de la langue française, qu’on appelle les classiques. 


Hélas, la littérature n’est plus au cœur de l’apprentissage du français depuis un bon moment. On la dit élitiste. On l’assimile même au snobisme. 


Une part de la culture québécoise continue de se méfier des « grands mots », des « grandes phrases », et tout simplement, des livres. 


Elle y voit une forme de pédantisme aristocratique. Presque un mépris pour les gens ordinaires. À tort.


La maîtrise de la langue nous tire tous vers le haut. Elle permet d’exprimer sa pensée avec les subtilités nécessaires, elle permet de rendre compte du monde tel que nous le voyons, dans ses contrastes et ses contradictions. J’ajouterais que la langue est une fête, quand on sait l’embrasser. 


Qu’on me comprenne bien : je ne dédaigne pas les québécismes. J’adore les mots qui caractérisent le français québécois. Ils ne dégradent pas la langue, ils l’enrichissent. 


Chose certaine, si j’étais ministre de l’Éducation, je ferais de la reconquête de notre langue par la conquête de la littérature une priorité absolue, une nécessité vitale. 


Je ne suis pas ministre de l’Éducation, mais j’espère que Bernard Drainville entendra ce message.