ÉNERGIE EST

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Écouter, pour mieux ne rien changer



L’Office national de l’énergie (ONE) n’avait pas le choix de reprendre à zéro son étude du projet Énergie Est. L’organe fédéral a encore bien du chemin à faire pour rétablir sa crédibilité.





Pour une rare fois dans le dossier d’Énergie Est, la voix des groupes environnementalistes a été entendue. Ils demandaient la reprise complète de l’étude, en raison de craintes de partialité. C’est maintenant chose faite.


 

Il est rarissime pour l’ONE de faire table rase dans un processus d’examen d’un projet aussi important que cet oléoduc de TransCanada. Énergie Est, un serpent de plus de 600 kilomètres au Québec, traversera quelque 860 cours d’eau, les terrains de 2000 propriétaires et les plus riches terres agricoles de la vallée du Saint-Laurent.


 

Tout déversement accidentel en cas de bris entraînerait des impacts « majeurs et durables » sur l’environnement, selon une étude de Polytechnique Montréal commandée en 2015 par le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles. Contamination des sources d’eau potable, spoliation des terres agricoles, du fleuve et des rivières du Québec : ces risques doivent être quantifiés avec rigueur et indépendance dans le cadre de l’examen à venir, en fonction des retombées du projet.


 

Or, que propose TransCanada aux Québécois ? Environ 200 emplois permanents après la construction d’un oléoduc qui permettra de faire transiter 1,1 million de barils par jour de pétrole de schiste de l’Ouest destiné majoritairement à l’exportation.


 

Bonne chance au nouveau comité de l’ONE pour convaincre les Québécois de l’acceptabilité sociale du projet. L’ONE promet cette fois une étude « juste et transparente », ce qui contraste avec ses travaux antérieurs. En 2015, deux membres du premier comité, Jacques Gauthier et Lyne Mercier, avaient rencontré en privé l’ancien premier ministre Jean Charest, qui était consultant pour TransCanada. Le président de l’ONE, Peter Watson, était aussi présent lors de cette discussion.


 

Les nouveaux membres temporaires nommés par l’ONE possèdent des expertises variées et complémentaires. Le président, Don Ferguson, est un ancien sous-ministre à la Santé du Nouveau-Brunswick spécialisé en gouvernance. Le commissaire Marc Paquin siège au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), un organisme dont les préoccupations pour le développement durable agacent jusque dans les plus hautes sphères de l’État québécois. Enfin, la commissaire Carole Malo a oeuvré pendant 25 ans dans la réalisation de projets de pipelines et de gazoducs, entre autres pour Aecon et SNC-Lavalin.


 

Ils auront l’occasion de se faire leur propre idée sur le projet d’Énergie Est puisqu’ils reprennent le travail à zéro. Les décisions antérieures rendues par le premier comité seront complètement supprimées du dossier officiel de l’audience. Voilà au moins un sujet de contentieux en moins.


 

Les nouveaux commissaires devront tenir compte de la nouvelle donne dans leur analyse. En donnant le feu vert à Keystone XL, un autre pipeline de TransCanada dans l’axe nord-sud, le président américain Donald Trump offre une autre raison de s’interroger sérieusement sur la pertinence d’Énergie Est. En effet, Keystone XL permettra l’exportation du pétrole de schiste albertain jusqu’aux raffineries américaines du golfe du Mexique. Il s’agit d’un enjeu vital pour l’Alberta, dont l’économie en panne dépend de l’exploitation du pétrole des sables bitumineux.


 

Les questions délicates entourant la gouvernance et la crédibilité de l’ONE demeurent entières. Cet organisme de réglementation, totalement indépendant du gouvernement fédéral, a un pouvoir quasi judiciaire. Il possède les mêmes droits et privilèges qu’une cour supérieure. Ses décisions sont exécutoires en vertu de la loi. Les pouvoirs étendus de l’ONE commandent, au nom de l’intérêt public, qu’il agisse avec transparence, impartialité et indépendance dans l’exercice de son mandat. Ce mandat, faut-il le rappeler, ne consiste pas à approuver servilement les projets des compagnies pétrolières. L’ONE doit prendre en considération à la fois « la sûreté et la sécurité, la protection de l’environnement et l’efficience de l’infrastructure et des marchés énergétiques ».


 
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