Services en français: fini le temps des excuses d’Air Canada, estiment des élus

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Quarante-neuf ans après l'adoption de la loi fédérale sur les langues officielles, on en est toujours là !

Les blâmes visant Air Canada pour non-respect de ses obligations en matière de bilinguisme se suivent et se ressemblent. Aussi les parlementaires à Ottawa proposent-ils de prendre les grands moyens pour assurer un service en français à bord des avions du transporteur. Ils recommandent au gouvernement de donner au commissaire aux langues officielles le pouvoir d’imposer des amendes à la compagnie aérienne.



Le rapport du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes, rendu public jeudi, reprend ainsi à son compte une suggestion qui avait été faite l’an dernier par le commissaire de l’époque, Graham Fraser.



« Tout comme mes prédécesseurs, s’était désolé M. Fraser dans un rapport spécial, j’ai utilisé, sans succès, divers pouvoirs que la loi me confère afin de tenter d’obliger Air Canada à mieux respecter ses obligations linguistiques à l’égard du public voyageur. Après des centaines d’enquêtes et de recommandations, après une vérification exhaustive et après deux recours, dont l’un jusqu’à la Cour suprême du Canada, force est de constater que mes multiples interventions, à l’instar de celles de mes prédécesseurs, n’ont pas donné les résultats souhaités. »



Ça ne suffit pas, la bonne volonté. Il faut qu’il y ait des résultats quelque part.


Denis Paradis, député libéral et président du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes



M. Fraser demandait des dents. Il suggérait divers moyens pour dédommager plus facilement les voyageurs lésés ou pour mettre à l’amende le transporteur.



Des amendes



Le comité d’élus fédéraux s’étant penché sur la question a choisi cette seconde option. Il suggère que le commissaire ait le pouvoir de conclure des « ententes de conformité exécutoires » avec le transporteur et de lui imposer des amendes.



« Il faut faire en sorte qu’on puisse avoir des dents quelque part pour qu’en cas de manquements graves à la Loi sur les langues officielles, le commissaire aux langues officielles puisse y remédier sans ajouter une charge pécuniaire par rapport aux tribunaux de droit commun qui auraient à se pencher là-dessus », a expliqué le député libéral Denis Paradis, qui préside le comité parlementaire.



M. Paradis reconnaît avoir, pendant les audiences, senti la « bonne volonté » d’Air Canada. « Mais ça ne suffit pas, la bonne volonté. Il faut qu’il y ait des résultats quelque part. »



Pas juste Air Canada



La proposition du comité parlementaire va cependant beaucoup plus loin que la suggestion initiale de Graham Fraser, car elle autoriserait le commissaire à imposer des amendes non seulement à Air Canada, mais à toutes les institutions soumises à la Loi sur les langues officielles.



L’actuelle commissaire aux langues officielles par intérim, Ghislaine Saikaley, se dit surprise. « Je ne peux pas dire que je m’attendais à ça », dit-elle en entretien téléphonique avec Le Devoir.



Voit-elle un risque particulier à imposer des amendes à d’autres institutions ? Elle ne s’avance pas plus loin que pour dire que « c’est une question complexe qu’il faut analyser de manière attentive ».



Le comité parlementaire recommande d’ailleurs de restructurer le Commissariat aux langues officielles en séparant la future section des sanctions de celle des enquêtes afin d’éviter toute confusion des genres.



La ministre du Patrimoine, Mélanie Joly, n’a pas voulu s’engager à mettre en oeuvre les recommandations unanimes du comité multipartite. Elle dispose de 60 jours pour y répondre.



Question de principe



L’avocat spécialisé dans les droits linguistiques Michel Doucet se réjouit de la proposition du comité.



« C’est une grosse recommandation, qui est très importante,dit-il au Devoir. On sait que le Commissariat, depuis ses débuts, fait des rapports et des recommandations pour que les institutions se conforment à la loi, mais malheureusement, ces recommandations n’ont aucune valeur juridique. […] Il y a la possibilité pour le commissaire d’intenter des poursuites, mais c’est une procédure qui est beaucoup plus longue et onéreuse. »



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