Anonymous porte atteinte au privilège parlementaire de Vic Toews

Anonymous - le pouvoir derrière les sans-nom...





Hugo de Grandpré La Presse (Ottawa) - Les menaces proférées par le groupe de pirates Anonymous à l'égard du ministre de la Sécurité publique, Vic Toews, forment à première vue une atteinte au privilège parlementaire, estime le président de la Chambre des communes, Andrew Scheer.
Le président Scheer a rendu sa décision mardi matin concernant la question de privilège soulevée par le ministre Toews la semaine dernière. M. Toews et ses collègues du gouvernement demandaient de déclarer que les vidéos d'Anonymous représentaient «une menace ou tentative d'influencer les actions d'un député».
Anonymous a diffusé une série de vidéos sur le site web YouTube les 18, 22, 25 février et 1er mars, en réaction au projet de loi C-30. Ce projet vise à donner aux forces de l'ordre le pouvoir d'obtenir sans mandat des informations personnelles sur des internautes, dans certaines circonstances.
Anonymous a donné un ultimatum au gouvernement: renoncer à C-30 ou faire face à la divulgation de révélations «compromettantes» sur le ministre Toews.
Dès son dépôt à la Chambre des communes, il y a quelques semaines, le projet de loi C-30 a provoqué une véritable montée aux créneaux de différents groupes et des partis de l'opposition. Plusieurs craignent qu'il entraîne des abus et multiplie les intrusions de l'État dans la vie privée des citoyens.
Dans la foulée du dépôt du projet de loi, un employé du Parti libéral avait, sous le couvert de l'anonymat, créé un compte Twitter, Vikileaks30, pour diffuser sur internet une série de renseignements personnels sur Vic Toews.
Mis au fait de la situation, le chef libéral intérimaire Bob Rae s'était aussitôt excusé et avait accepté la démission de l'employé en question.
Évoquant ces excuses, le président de la Chambre a d'ailleurs refusé de considérer Vikileaks30 comme étant une atteinte à première vue du privilège parlementaire du ministre Toews.
Andrew Scheer a aussi rejeté la portion de la question de privilège touchant à «une apparente campagne visant à inonder (le bureau de M. Toews) d'appels, de courriels et de fax».
En ce qui concerne Anonymous, l'atteinte au privilège à première vue devrait maintenant être renvoyée pour étude en comité parlementaire. Ce comité fera ensuite rapport au président de la Chambre des communes. On pourrait donc attendre encore quelques semaines avant de connaître la suite des choses. La nature du groupe visé, qui est comme son nom l'indique anonyme, pourrait par ailleurs compliquer le processus pour les parlementaires, s'ils souhaitaient, par exemple, forcer quelqu'un à comparaître.
Dans l'attente, le groupe a rendu public vendredi une dernière vidéo, dans lequel il a accusé Vic Toews d'avoir fait nommer l'une de ses maîtresses dans une cour albertaine de juridiction fédérale. Il a promis de continuer à diffuser ce genre d'information, tant et aussi longtemps qu'il n'aurait pas gain de cause dans sa lutte contre le projet de loi C-30.
Force symbolique
Les atteintes au privilège parlementaire ne donnent pas souvent lieu à des conséquences très graves pour ceux qui en sont trouvés coupables. Par exemple, une seule personne a été emprisonnée, et pour quelques jours seulement, pour cette raison. Quelques autres ont été forcés à témoigner devant les parlementaires.
Les atteintes au privilège sont néanmoins porteuses d'une charge symbolique importante dans le cadre des activités démocratiques et parlementaires canadiennes.
«J'ai visionné attentivement les vidéos en ligne, qui contiennent effectivement des menaces directes dirigées contre le ministre en particulier, mais aussi contre l'ensemble des députés», a écrit le président Scheer dans sa décision.
«Ces menaces démontrent un mépris flagrant pour nos traditions et se veulent une attaque subversive contre les privilèges les plus fondamentaux de la Chambre.»
Hérités du système britannique, les privilèges parlementaires englobent l'ensemble des droits et pouvoirs nécessaires pour permettre aux députés et sénateurs de faire leur travail. «Comme l'a mentionné le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre, toute menace ou tentative d'influencer les actions d'un député constitue une atteinte au privilège», a conclu le président.


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