La commission Charbonneau produira un rapport incomplet si le gouvernement Couillard refuse de prolonger son mandat.
Martine Valois, professeure adjointe à la Faculté de droit de l’Université de Montréal, pousse un cri du coeur en faveur de la commission, tant critiquée pour ses méthodes, ses délais et ses insuccès en ce qui a trait au volet de l’enquête sur le financement des partis provinciaux.
D’une part, la commission a hérité d’un mandat « extrêmement large ». D’autre part, elle a dû défendre ses décisions devant les tribunaux supérieurs, entre autres pour avoir accès au matériel de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) dans le projet Colisée et pour utiliser les écoutes électroniques de Diligence, au grand dam de l’ex-syndicaliste Michel Arsenault.
Ces batailles, toutes remportées par la commission, ont détourné des procureurs tels que Simon Tremblay et Érika Porter du mandat original de la commission puisqu’ils devaient défendre ces décisions devant les tribunaux.
« Cette commission est jugée plus sévèrement que les autres à cause de la nature même de ses travaux. Elle s’attaque à deux groupes qui tirent les ficelles au Québec : la classe politique et la classe économique », affirme Mme Valois.
Deux mois ou dix mois ?
La juge France Charbonneau a demandé un délai de dix mois pour produire son rapport final (au plus tard le 30 novembre 2015).
Les libéraux seraient tentés de lui accorder un sursis de deux mois, rapportait La Presse la semaine dernière.
« Deux mois, c’est complètement ridicule. C’est comme accorder deux semaines. Il faut avoir travaillé dans une commission d’enquête pour comprendre », lance Martine Valois.
L’avocate parle en connaissance de cause. Elle était conseillère principale à la rédaction du rapport Bastarache, portant sur le mode de nomination des juges.
Une douzaine de personnes ont travaillé sur la rédaction du rapport final, dont la moitié à temps plein, pendant une période de deux mois.
La commission Bastarache, dont le mandat était circonscrit, avait entendu seulement 39 témoins lors de 30 journées d’audiences. À titre de comparaison, la commission Charbonneau a entendu 292 témoins en 261 journées d’audiences.
Une centaine de témoins auraient reçu des préavis de blâme. La commission doit s’assurer que sa preuve est solide et tenir compte des explications qui seront données par les témoins à risque d’être blâmés, afin que son rapport final résiste à la contestation.
Comme solution mitoyenne, Mme Valois propose de reporter la production du rapport jusqu’à la mi-septembre, alors que les travaux parlementaires feront relâche.
À son avis, le gouvernement Couillard va payer un prix politique élevé s’il n’exauce pas les voeux de la commission. Puisque des préavis de blâme ont été envoyés à l’ex-premier ministre Jean Charest et au PLQ, les libéraux auront le mauvais rôle s’ils décident de couper court aux travaux. « Ça laisserait entendre que le PLQ ne veut pas que la commission aille au bout de ses intentions », estime Mme Valois.
Le leader du gouvernement, Jean-Marc Fournier, a indiqué qu’aucune décision n’avait été prise encore.
Il a réitéré que le délai de production importait moins que la qualité du rapport. « Personnellement, je pense qu’il doit y avoir un délai, pour que le rapport soit de qualité », a-t-il dit à l’émission matinale C’est pas trop tôt.
Cri du coeur pour la commission Charbonneau
La professeure Martine Valois se dit favorable à la prolongation du mandat
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