Est-ce l'arrogance qui accompagne parfois les gouvernements majoritaires ? Toujours est-il que les libéraux de Jean Charest ont décidé d'enterrer l'idée de tenir une commission parlementaire spéciale sur l'horrible bilan de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Cet entêtement est injustifié.
Parlant au nom de son gouvernement, Monique Jérôme-Forget a refusé d'ordonner une commission spéciale, et a refusé d'y témoigner.
«Je suis dans un mode solution maintenant», a lancé la ministre des Finances, comme simple explication. Des propos qui offrent bien peu de réconfort pour les contribuables québécois qui ont vu leurs économies collectives rétrécir de 39,8 milliards $ en raison des mauvais choix de placements réalisés par les administrateurs de la Caisse au cours des dernières années.
De fait, la ministre procéderait sous peu à la nomination d'un ancien mandarin du Conseil du Trésor, Robert Tessier, à la présidence du conseil d'administration de la Caisse. D'autres postes au conseil devraient être comblés. Puis, il restera à trouver un nouveau président-directeur général en remplacement de Fernand Perreault, une nomination intérimaire.
Certes, ce travail doit se faire et cela prépare un nouveau chapitre pour la Caisse de dépôt et placement du Québec, après l'ère Henri-Paul Rousseau, et l'ère Jean-Claude Scraire, avant lui. Mais la page n'est pas encore tournée sur la dernière crise de la Caisse, contrairement à ce que tente de faire croire la ministre.
Lors de l'annonce sur les résultats de la Caisse, LeDroit a défendu l'idée qu'une commission spéciale n'était peut-être pas nécessaire à ce moment. La ministre y était prête, pourtant. Y participer était cependant pour elle hors de question.
Maintenant, il n'est ni question d'une commission spéciale, et pas plus d'y participer. Encore moins le premier ministre Charest. Mme Jérôme-Forget n'a pas voulu accéder aux demandes de l'opposition péquiste qui demandait que comparaissent les gestionnaires de la Caisse, des experts conseils, des déposants... ainsi que la ministre. Il y avait aussi une question d'horaire. Les troupes de Pauline Marois souhaitaient attendre en avril, après le dépôt du rapport annuel de la Caisse dont nous connaissons maintenant les grandes lignes. Les libéraux souhaitaient tenir ça le plus vite possible, afin de tout balayer sous le tapis le plus rapidement possible. Ils voulaient éviter un roman savon comme celui que l'on a vu à Ottawa avec le comité sur le scandale des commandites, ou celui qui a étudié les liens entre Brian Mulroney et l'affaire Airbus.
À défaut d'une commission spéciale, nous persistons de croire que le comité des finances publiques peut accomplir un travail utile dans le dossier. Le comité a tous les pouvoirs d'inviter les témoins qu'il jugera nécessaire, et l'ex-président de la Caisse, M. Rousseau en premier lieu. Il a évité les questions jusqu'ici, et ne prévoyait prendre la parole qu'à l'occasion d'un discours sous peu. Ce n'est évidemment pas suffisant et il doit répondre aux questions des élus. Idem pour ses principaux lieutenants, qui pourraient avoir des informations d'importance à communiquer.
Cela vaut aussi pour les deux plus importants élus du gouvernement, M. Charest et Mme Jérôme-Forget. Il importe de savoir, par exemple, si le gouvernement s'est fié sur les rendements de la Caisse pour éviter des hausses de frais pour les sociétés d'État qui sont des déposants à la Caisse de dépôt. Ou remettre aux calendes grecques une réforme de la Régie des rentes du Québec, par exemple. Ce ne sont pas des questions anodines et si l'une de ces deux personnes doit en porter le fardeau politique, si c'est le cas. Il serait aussi pertinent de savoir si la mission de la Caisse pourrait être modifiée à l'avenir.
Pour toutes ces questions du genre, il y a peu de moyens plus efficaces qu'une commission de l'Assemblée nationale pour extirper ce genre d'informations.
Il n'est pas question de laisser le gouvernement Charest s'en tirer à si bon compte !
pjury@ledroit.com
Entêtement injustifié
Il n'est pas question de laisser le gouvernement Charest s'en tirer à si bon compte !
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