Un jugement rendu cette semaine à Drummondville confirme que le cours Éthique et culture religieuse ne cause apparemment aucun préjudice grave aux croyants catholiques qui souhaiteraient en être dispensés à l'école. Un préjudice? Quel préjudice?
Ils croyaient démontrer que le cours Éthique et culture religieuse ébranlait la foi de leurs enfants, vexant du coup leur liberté de conscience. La cour les a complètement déboutés, leur servant même en guise de revers suprême leur propre religion: l'Église catholique -- la leur! -- admet le «bien-fondé d'une présentation objective des autres religions».
Ces parents de Drummondville liés à la Coalition pour la liberté en éducation (CLÉ) ont tenté, sans succès, de prouver que le cours axé sur la culture causait un «préjudice grave» à leurs enfants, contrevenant aux deux chartes des droits, bafouant la Loi sur l'instruction publique. Le juge Jean-Guy Dubois, implacable, les recale, trois fois plutôt qu'une.
Le verdict -- le premier à tomber dans trois causes du genre et duquel les parents appelleront peut-être -- renverse leurs arguments, étalant du même souffle la faiblesse de leur démonstration. «Il n'est pas tout de dire avec sincérité qu'on est catholique pratiquant pour prétendre qu'une présentation globale de différentes religions puisse nuire à celle que l'on pratique», écrit le magistrat.
En somme, celui-ci n'a pas cru que le fait d'exposer un pratiquant de la foi catholique à diverses cultures et traditions religieuses suffisait à «perturber» les croyances propres des élèves. Il cite en outre de longs passages du témoignage de la mère, qui portait cette requête, ainsi que celui de son fils inscrit au secondaire. La mère: «Je ne suis pas d'accord [avec le fait] que [mon fils] ait à prendre d'autres contenus d'autres religions alors qu'il est à se construire lui-même, alors que c'est très mêlant.» Le fils: «On a eu des examens sur toutes les autres religions, puis je n'étais pas bien là-dedans, là.»
La cour, soucieuse de comprendre en quoi le nouveau cours brimait concrètement la liberté de religion de la mère et du fils, n'a de toute évidence pas trouvé dans ces confessions faiblardes la preuve qu'elle cherchait. Mêlantes, les autres religions? Pas «bien là-dedans»? Il en fallait davantage.
Cet affrontement, mené avec constance (il faut le reconnaître) par un groupe de parents, paraît reposer sur la peur de l'autre, la menace prenant l'allure d'un fourre-tout religieux. Il s'assoit en réalité sur une profonde méconnaissance des finalités de ce cours, qui n'ambitionne aucunement de produire de jeunes prosélytes, mais vise plutôt la compréhension de plusieurs religions, inscrites dans notre culture et celle du monde.
Les parents déboutés ont été choqués du parti du juge Dubois, qui cite d'abondants passages de la déclaration d'un témoin expert présenté par les défendeurs, l'abbé Gilles Routhier, de l'Université Laval. Se référant aux enseignements du pape Jean-Paul II, celui-ci rappelle qu'il revient aux parents et à l'Église de faire l'éducation à la foi, pas à l'école; impitoyable, il pointe en outre l'ouverture du défunt pape à cet enseignement prodigué à l'école, dans la mesure où il est offert de manière objective. Le juge boucle ce cycle catholique en rappelant l'accueil de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec fait au nouveau programme. Vlan!
On peut comprendre le dépit des parents catholiques, à qui l'on répond en faisant jouer les voix de l'Église. Cela ajoute à l'offense ressentie par le perdant. Même si la bataille n'est pas terminée et qu'elle connaîtra d'autres chapitres judiciaires, voilà un premier verdict qui donne le ton: le préjudice grave reste à démontrer.
***
machouinard@ledevoir.com
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé