Hydro recommande de fermer Gentilly-2

Énergie nucléaire - Gentilly

(Québec) Les coûts de réfection de Gentilly-2 sont prohibitifs et Hydro-Québec recommande au gouvernement la fermeture définitive de la centrale nucléaire.
Dans un rapport confidentiel dont Le Devoir a pris connaissance des principaux éléments, Hydro-Québec, après avoir comparé le scénario de la réfection de Gentilly-2 avec celui de sa fermeture, conclut que le « projet de réfection n’est pas justifié au plan financier pour Hydro-Québec ».
« Il ressort de la comparaison de ces scénarios que la fermeture est préférable au niveau financier et donc recommandée par Hydro-Québec à son actionnaire le gouvernement », écrit la société d’État dans ce rapport de 37 pages qui vient d’être remis à la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet. Ce rapport préliminaire est daté du 26 septembre.
S’appuyant sur l’expérience de la réfection toujours en cours de la centrale jumelle de Pointe-Lepreau, au Nouveau-Brunswick, Hydro-Québec évalue à un pharaonique 4,3 milliards le coût de la réfection de Gentilly-2. C’est 2,4 milliards de plus que l’évaluation faite en 2008 par la société d’État.
Même soustrayant les dépenses déjà englouties dans la réfection de Gentilly-2 depuis 2009, soit 900 millions, la centrale s’avérerait un éléphant blanc si Hydro-Québec procédait à sa réfection.
À 4,3 milliards, le coût de l’électricité produite par une centrale Gentilly-2 retapée s’élèverait à 9,7cents le kilowattheure (¢/kWh). Si on refait le calcul avec les seules dépenses à venir sans tenir compte des sommes englouties, le coût descend à 8,3 ¢/kWh. C’est encore trop pour assurer la rentabilité de la centrale nucléaire.
À titre de comparaison, le coût prévu par kilowattheure du complexe de La Romaine, présentement en construction, est de 6,2cents. D’aucuns estiment d’ailleurs que ce coût unitaire est trop élevé pour assurer la rentabilité de ce projet.
Dans son rapport, Hydro-Québec estime que la centrale serait nettement déficitaire tout au long de son exploitation pendant 25ans. « Sur la base de ces données, la fermeture de Gentilly-2 conduit à une augmentation de l’ordre de 215 millions du bénéfice net annuel d’Hydro-Québec chaque année à compter de 2017, par rapport au scénario d’une réfection », lit-on dans le rapport. Autrement dit, continuer à exploiter la centrale entraînerait un déficit annuel de 215 millions qui viendrait diminuer le bénéfice d’Hydro-Québec d’autant. Chacun des 800 emplois de la centrale Gentilly-2 coûterait donc 268 750 $ par an à maintenir.
La société d’État note qu’il existe un écart de 4,3 ¢/kWh entre le coût de revient de la centrale rénovée – de 8,3 ¢/kWh – et le revenu marginal d’exportation, qui se situe à 4 ¢/kWh.
La comparaison entre les deux scénarios, et leur effet respectif sur le bénéfice, tient compte du fait qu’Hydro-Québec devra amorcer dès maintenant le déclassement de Gentilly-2 s’il procède à la fermeture définitive. « L’ensemble des coûts de fermeture de la centrale de Gentilly-2 sont pris en compte dans cette analyse, incluant les coûts associés à l’évacuation du combustible irradié vers le site d’entreposage définitif et les coûts du démantèlement complet », peut-on lire. Le coût du déclassement de la centrale s’élève à 1,075 milliard, coût auquel s’ajoutent 660 millions pour la disposition des déchets radioactifs, pour un total de 1,785 milliard. Le déclassement et le démantèlement s’étalent sur une très longue période, de 2013 à 2062, presque un demi-siècle.
Selon une source gouvernementale, le conseil d’administration d’Hydro-Québec détient depuis plus d’un an des données qui montrent que la réfection de Gentilly-2 est un gouffre financier. Ces informations ont dû être transmises au gouvernement libéral par la voie du ministre des Ressources naturelles, Clément Gignac, croit-on.
Pour Hydro-Québec, la décision de fermer Gentilly-2 est une volte-face. Jusqu’ici, seul le scénario de la réfection était envisagé, comme il est écrit dans son rapport annuel. La société d’État, qui a consacré près de 1 milliard à des travaux préparatoires, s’appuyait sur une évaluation qui établissait à 1,9 milliard le coût de la réfection de la centrale, 44 % seulement du coût réel, tel que le montre la laborieuse réfection de la centrale de Pointe-Lepreau.


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