Le premier ministre François Legault ne comprend pas la situation de l'industrie pétrolière de l'Alberta, a affirmé le ministre des Finances de cette province, Joe Ceci, lundi en marge de la rencontre avec ses homologues fédéral, provinciaux et territoriaux. «Nous avons innové pour réduire l'empreinte carbone du baril de pétrole et nous allons continuer de le faire, a-t-il dit. Il y a un marché pour ce que l'Alberta produit et ça profiterait au Canada si nous pouvions acheminer [le pétrole] sur les marchés internationaux.» L'Alberta, la Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick veulent raviver le projet d'oléoduc Énergie Est, dont le tracé traverserait le Québec, mais François Legault a refusé cette «énergie sale» lors de la rencontre des premiers ministres vendredi tout en soulignant que le Québec pouvait vendre de «l'énergie propre à un prix compétitif». Mais l'Ontario produit déjà plus d'électricité qu'elle n'en a besoin, a indiqué le ministre des Finances, Vic Fedeli. Le gouvernement Legault tente de convaincre l'Ontario d'abandonner son projet de rénovation de centrales nucléaires pour qu'elle achète son hydroélectricité. Les revenus tirés de la vente d'énergie propre permettraient ainsi au Québec de réduire le montant de péréquation qu'il reçoit annuellement. La rencontre des ministres des Finances s'est poursuivie à Ottawa avec en toile de fond des désaccords sur la formule de péréquation, qui permet de redistribuer la richesse entre les provinces. Pour la première fois en 10 ans, l'Ontario ne recevra pas de transfert de péréquation d'Ottawa, ce qui a incité le ministre des Finances de la province à se joindre aux appels lancés pour que le gouvernement fédéral revoie la structure du programme. 20 milliards répartis entre cinq provinces Le gouvernement versera près de 20 milliards $ aux provinces et aux territoires en 2019-2020. La somme ne sera répartie qu'entre cinq provinces : le Québec, le Manitoba, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick. Le Québec, dont l'économie se porte bien, tire plus de 13 milliards $ du programme, ce qui représente une augmentation de près de 1,4 milliard $. Pour la première fois depuis la récession de 2008, l'Ontario figure sur la liste des provinces riches. L'Alberta, dont le secteur pétrolier connaît des difficultés, demande également que le programme soit revu. «Je pense que certains de mes collègues font face à des difficultés économiques cycliques, a réagi le ministre québécois des Finances, Éric Girard. Il y a d'autres programmes fédéraux pour faire face à ça.» «Le Québec a moins de richesses et on travaille là-dessus», a-t-il ajouté. Nous ce qu'on veut vraiment, c'est améliorer l'investissement, l'innovation au Québec, que l'économie soit plus forte et ça, c'est au bénéfice des Québécois, mais aussi des Canadiens.» Le gouvernement ontarien savait pertinemment qu'il ne serait pas admissible à la péréquation cette année, mais son ministre des Finances de l'Ontario, Vic Fedeli, a déclaré que cela était la preuve que le programme de la péréquation devait être revu. Son gouvernement se sent lésé. «Nous donnons 12,9 milliards $ au gouvernement fédéral de plus que nous recevons», a-t-il fait valoir tout en indiquant que l'ensemble des paiements du fédéral devraient être revus. «La péréquation ne fonctionne pas pour l'Alberta, a renchérit Joe Ceci. «Lorsque l'économie de certaines provinces se porte extrêmement bien, elles ne devraient pas recevoir de paiements plancher de péréquation», a-t-il continué. La Saskatchewan et Terre-Neuve ont également demandé des modifications à la formule qui a déjà été renouvelée plus tôt cette année pour une période de cinq ans. «À notre avis, avec l'accord pour les cinq prochaines années, on a une situation stable, mais on peut continuer d'avoir une discussion au sujet de ce qu'on va faire pour les prochains changements dans quatre ans», a commenté le ministre fédéral des Finances, Bill Morneau. La réunion des ministres des Finances du pays, qui a débuté dimanche soir, a lieu deux jours à peine après la réunion tendue des premiers ministres à Montréal. «Nous devons nous mettre à fonctionner comme un pays au lieu de provinces qui se préoccupent seulement de leurs intérêts particuliers», a livré M. Ceci comme message au Québec.