L'Art de la persuasion en 2008

Chronique d'André Savard

Il y a trois semaines, je signais une chronique intitulée Faire de la Politique en Culture adolescente. La chronique traitait de Cultural Codes [[Clotaire Rapaille, Culture Codes, ed. JC Lattès, 2008]], un livre de Clotaire Rapaille, psychanalyste embauché autant par Nestlé que par Chrysler ou le Parti Républicain. Ses clients lui demandent comment faire convenir un produit et un message conformément aux archétypes collectifs de la nation à laquelle le client veut s’adresser.
Dans notre société capitaliste, on doit persuader sans arrêt pour vendre. Il s’est donc développé tout un cartel d’experts et de spécialistes embauchés par des compagnies. Ces compagnies leur demandent : Comment vendre du café aux Japonais alors qu’ils sont habitués au thé? Ou, comment vendre une grosse cylindrée de fabrication américaine aux Français? Ou même, comment faire accepter l’image de George W. Bush? Les spécialistes de la persuasion leur répondent qu’ils doivent composer leur message en fonction des codes culturels du pays ciblé.
Bien que les analyses de Clotaire Rapaille aient porté principalement sur quelques nations européennes, le Japon et les Etats-Unis, Clotaire Rapaille livre ce commentaire sur le code culturel qui dominerait au Canada : «Les Canadiens, par exemple, recherchent des leaders capables de préserver leur culture. Le Code pour le Canada est : PRÉSERVER. Ce Code trouve son origine dans les rudes hivers canadiens. Depuis toujours, les Canadiens utilisent ce qu’ils appellent « l’énergie hivernale» pour conserver autant d’énergie que possible. Ils ne recherchent pas des leaders ayant une vision, capables de grands progrès, ils préfèrent élire un premier ministre qui fasse office de gardien et qui, selon les électeurs, offrira la meilleure chance à leur pays de préserver la culture.»
À la lecture de ce commentaire plutôt court, on reste perplexe. D’abord, ce rapport de causalité exclusivement climatique paraît insuffisant pour donner les bases d’un code culturel. Ensuite, on ne peut que se demander où est le distinguo entre le code culturel de la nation québécoise et celui de la nation canadienne.
Est-ce possible que le code culturel canadien de même que le code culturel soient axés sur la préservation? Si on lève les yeux un moment, on voit en effet partout chez les Canadiens les signes d’une culture préservatrice, très attachée aux signes de la monarchie et qui, pour l’avenir, envisage une réforme du Sénat! Vraiment pas le symptôme d’une nation révolutionnaire.
Que le Canada soit axé sur la préservation, cela s’expliquerait aussi par le contexte historique. Dès sa fondation anglaise, le Canada a senti l’hégémonie anglaise menacée. Les francos, vus comme beaucoup moins civilisés qu’eux, étaient en outre affectés d’une faculté de surpeupler comme des rats. Les Britishs appréhendaient le débordement. Et ils ne pouvaient prendre de front les francos autant qu’ils le voulaient, menacés qu’ils étaient du côté de la frontière sud.
En ce qui concerne la nation québécoise, si vraiment elle a agit par un code culturel axé sur la préservation, il y a de quoi s’inquiéter. On veut préserver ce qui existe déjà. Claude Morin a déjà noté les succès du thème «préserver le pays» entretenu par les fédéralistes[[Claude Morin, Les Prophètes Désarmés, éd. Boréal, 2001]]. Le roman Maria Chapdelaine trace aussi le portrait d’un peuple qui ne «sait pas mourir» et dont la raison d’être est la préservation.
Dans une telle optique, Clotaire Rapaille, disant que les codes culturels changent avec une lenteur quasiment géologique, comment les indépendantistes peuvent-ils composer avec le code culturel des Québécois? En nationalisant l’Etat québécois et en donnant un contenu grandissant à ce qui est à préserver par les Québécois. Régime républicain (les Québécois ne cherchent pas à préserver la monarchie), instance de représentation internationale, citoyenneté, Constitution nationale proclamant la souveraineté populaire, le droit d’initiative, l’intégrité territoriale, le français langue de travail, sont autant de traits qui peuvent entrer dans le projet de préservation des Québécois.
Si ces initiatives conduisent à un conflit différentiel des nations québécoise et canadienne, cela se traduira probablement par une convocation à la barre émise pas la cour suprême. Les magistrats nommeront d’office un ami de la cour, comme ils le firent avec André Jolicoeur. Ce sont les affaires canadiennes. Pendant ce temps, les élus québécois doivent construire un «positif» québécois à préserver. Si le Canada veut se dresser en «négatif» par rapport à ce que le Québec veut préserver, il y aura collision des deux codes culturels qui ne veulent pas préserver la même chose.
Ceux qui sont dans le camp indépendantiste contre une Constitution Nationale du Québec disent que cela ne fera que détourner de l’effort de persuasion. On ferait ainsi croître un faux-semblant au sein de la société établie, renforçant cette dernière. L’argument paraît tiré mot pour mot des débats de la vieille gauche sur l’éclosion d’une vraie société socialiste. Les idéologues gauchistes disaient que la société socialiste ne pouvait croître, structurellement liée à l’état de fait capitaliste, comme le poulain dans le ventre d’une jument.
Puisque ces indépendantistes sont encore dans un cadre conceptuel si voisin de celui de «l’idéologie révolutionnaire», il faudrait leur rappeler ce qu’avait répondu le penseur Cornelius Castoriadis[[Cornelius Castoriadis, L’institution Imaginaire de la Société, éd. Seuil, 1975]] à ceux qui voulaient construire le « socialisme en soi » dissocié de la société présente, et enseigné comme un théorème dans des ateliers académiques. Ce penseur avait répondu à ceux qui voulaient démontrer par la persuasion l’excellence d’une société sur une autre et promettaient la génération spontanée de la nouvelle société sur l’ancienne : «Vous faites semblant d’ignorer qu’on a jamais à faire avec ce genre d’évidences dans aucune activité réelle, ni individuelle, ni collective, et que vous-mêmes vous laissez de côté ces exigences dès que vous entreprenez quelque chose».
C’est dès maintenant, par des initiatives étatiques qui étoffent l’appareil de la gouvernance nationale, que l’on doit poser le problème d’une autre organisation de la société. Certains diront que donner plus à préserver, ce n’est que prendre des précautions au sein du régime. Les autonomistes auront ce point de vue qui leur sera positif à leurs yeux. Les Libéraux accuseront les tenants d’une vraie Constitution Nationale de préparer secrètement l’indépendance.
Tel est le droit de chacun de penser ce qu’il veut. Pensez différemment du moment que les élus élargissent la base des légitimités québécoises, donnent une portée nationale à ses juridictions, affirment l’Etat national et ses droits intrinsèques pour l’avenir. Ce n’est pas une mission partisane, c’est un devoir d’Etat auquel doit souscrire tout élu à l’Assemblée Nationale.
À ceux qui prétendent qu’on ne doit pas agir de façon mitoyenne pour mieux persuader au préalable du but ultime, une autre réponse servie par Castoriadis aux idéologues s’applique :

«L’évolution des attitudes humaines dans la société capitaliste présentent des significations qui ne sont pas simples, qui ne sont même pas simplement contradictoires, des significations que l’on peut appeler, à défaut d’un autre terme, ambiguës. Mais l’ambigu, au sens où nous l’entendons ici, ce n’est pas l’indéterminé ou l’indéfini, le n’importe quoi. L’ambigu n’est ambigu que par la composition de plusieurs significations susceptibles d’être précisées, et dont aucune ne l’emporte pour l’instant».

Les indépendantistes auraient tort de s’opposer à toute fixation unilatérale du cadre institutionnel, toute nouvelle nomenclature. Ils s’abstiendraient ainsi d’avoir des effets tangibles Ce sont les effets tangibles qu’on a le goût de préserver.
Les sociétés sont nébuleuses. Dans les échanges quotidiens, elles sont dominées par les préoccupations instantanées. Les institutions agissent pour leur part sur le temps long. Elles constituent une idéologie invisible qui mobilise cette société nébuleuse sans que ça paraisse trop. Elles contiennent un pouvoir persuasif.
On peut bien parler de l’accès à l’indépendance par la persuasion en autant que l’on comprenne tous les registres possibles de la persuasion. Depuis les Grecs, on voyait la persuasion comme un dialogue entre deux consciences, deux raisons. À la Renaissance, on s’est mis à croire que les problèmes de l’humanité ne consistait finalement qu’en une carence du savoir et de la morale, carence à laquelle le progrès de la science et une discipline accrue devaient remédier sans problème.
C’était l’époque où on croyait au domaine séparé de l’esprit, posant un postulat, déduisant, ouvrant des enquêtes et une perspective historico-critique qui se transmettaient d’âme à âme. Avec le XX ième siècle, il a fallu réviser ce schéma. La politique, ça ne se fait pas de cortex à cortex, par une schématisation du savoir, en régulant le discours comme une catéchèse, en prévenant les militants contre les exutoires.
Et maintenant, on est rendu au XXI ième siècle. On ne se démontre plus seulement sur trente pages ou par la méthode du tableau noir. Les institutions portent en soi une structure persuasive si on les remodèle à notre image.
André Savard


Laissez un commentaire



11 commentaires

  • Michel Guay Répondre

    21 août 2008

    L'information et la désinformation sont les nerfs de la guerre .
    Nos ennemis mortels contrôlent quasi 100% des toutes les informations au Québec.
    Pour 8% d'anglophones Ottawa donc le CRTC nous impose 60% de médias unilingues anglais et l'autre 40% francophones sont quasi à 100% fédéralistes .
    L'art de la persuasion est en fait l'art du contrôle de l'information et de la désinformation
    Nous les indépendantistes nous passons notre temps à rétablir la véritable information face à la désinformation systématique que nous imposent les colonisateurs dividsisionnistes et leurs collabos .
    Ils violent nos lois grâce à ce contrôle de l'information
    Ils anglicisent le Québec grâce à ce contrôle de l'information
    ils nous ferment le monde grâce à ce contrôle de l'information
    Ils nous volent grâce à ce contrôle de l'information
    Ils falsifient notre histoire grâce à ce contrôle de l'information
    Ils colonisent les esprits grâce à ce contrôle de l'information
    Ils divisent nos partisans grâce à ce contrôle de l'information

  • Archives de Vigile Répondre

    11 août 2008

    10 août 2008, Parfondor
    L'étude du passé révèle que si une constante se dégage de l'histoire du Canada-Anglais depuis sa fondation en 1763, c'est bien son refus féroce de voir une majorité franco-québécoise souveraine exercer son emprise sur lui et notamment son acharnement à abroger toute mesure prise par nous qui porterait trop directement atteinte à la quiétude du Quebec anglais.
    Qu'on se remémore l'éviscération de la Loi 101 ou le peu de cas que fit le Canada-Anglais de l'objection de l'Assemblée nationale au rapatriement du BNA Act.
    Tout ce qu'entreprend le Québec-Français se voit ainsi défait ou vidé de sa substance par le Canada-Anglais. Le même sort attend les initiatives qu'a mentionnées M. Savard : il n'en restera que des loques. Pourquoi continuer ce jeu idiot ?
    Là ou il voit le conflit possible, je le vois certain -- dans l'hypothèse bien sûr que ces initiatives aient de la substance, qu'elles ne soient pas purement nominales comme le fut celle de rebaptiser '' nationale'' notre Assemblée législative et ''État'' ce qui demeure une simple province. Dans ce ''conflit différentiel'', je doute fort que l'idée ''de se dresser en négatif'' effarouche le Canada-Anglais... Nous inviter à bâtir sur un terrain que minent constamment des sapeurs, en escomptant que les retiendra la crainte de passer pour des malappris. Quelle naïveté ! Ne vaudrait-il pas mieux nous suggérer de creuser des contre-mines ?
    Pour conclure sur le chapitre du pouvoir de marquer d'infamie son adversaire, je rappelle que le Canada-Anglais est beaucoup plus riche que nous et donc mieux à même de se payer les outils de propagande pour nous calomnier devant l'opinion internationale ; sa richesse lui permet en outre de s'attacher aisément une clientèle parmi les nôtres au besoin. Et advenant que la conquête des esprits et l'achat des consciences ne suffiraient pas, il dispose de moyens plus grossiers sans doute, mais autrement plus efficaces que la persuasion. Silent leges, etc.

  • Archives de Vigile Répondre

    9 août 2008

    Monsieur Deshaies donne à son rôle un poids incroyable. La disproportion entre l'enseignement académique, enfin ce didactisme, nommez ça comme vous voudrez, comme cause, et l'effet attendu est spectaculaire. J'en viens à croire que monsieur Deshaies est mystifié. Si on regarde la cause qui va produire la conscientisation politique (une qualité que monsieur Deshaies ne met pas en doute chez lui) on voit des énoncés sur les deux Canadas, des définitions comme l'indépendance "agir par soi collectif", des méditations sur des paroles révélées comme celles d'un correspondant mystérieux nommés Parfondor.
    Le mot Académie ou Institut vient coiffer une mouvance souhaitée, dépassant la voie académique et que tout vrai indépendantiste devrait souhaiter. On voit quasiment l'académie comme la clef de voûte permettant à l'esprit enfin éclairé du militant de procéder à la fondation imaginaire de la société québécoise libre, prélude à sa fondation réelle. Monsieur Deshaies professant contre les mythes compensateurs, les conditions du saut révolutionnaire, il est bien aise de préparer la révolution des esprits. Libre aux malins de ne pas le comprendre.
    N'importe. Cela permet à monsieur Deshaies de dénoncer la faille pédagogique essentielle et de répéter plusieurs fois par année: A qui la faute? Monsieur Deshaies lie son projet éthéré d'académie à son sentiment hallucinatoire d'expansion du mouvement indépendantiste, l'un étant la précondition de l'autre.
    Monsieur Deshaies file d'un terme à l'autre de son équation et il dénonce les simplifications des esprits moins avertis. Il connaît les conditions historiques dit-il. Oui, il est homme de métier qui apporte à sa grammaire indépendantiste des méditations sur les conditions de l'action propre qui ne se situe pas dans le deuxième Canada. Et on se demande avec angoisse quelle lumière on pourra tirer de ces facilités nouvelles nées de son didactisme fécond. En tout cas, il nous l'assure: Bien suivi, ça mènera loin.
    Entre-temps, est-ce que ça passerait au moins comme chaire universitaire en sciences po ce précieux enseignement? Le test de la réalité... Ne serait pas mieux de commencer dans un milieu circonscrit et approprié aux essais? À moins que monsieur Deshaies aime mieux continuer de lier son projet à son idéal de surpuissance.
    Monsieur Deshaies dénonce la légitimité québécoise dans le Canada. Il désavoue l'affirmation québécoise intra-systémique. N'affirmons rien. Traquons le bébé lune plutôt en incorporant les rudiments du beau langage indépendantiste. Dans une chronique Parfondor va lui révéler qu'une fonction inutilisée décrépira si elle reste inutilisée mais lui, il construit les fonctions de la société fantôme, celle qui naît des esprits révolutionnaires bien fait sous les auspices d'un enseignement enfin libéré des impuretés conceptuelles.
    Déjà propulsé hors du sol canadien, sa société québécoise libérée, on la voit marcher au plafond, chez lui.
    Il enseigne qu'une législature provinciale reste une législature provinciale. Et il dit qu'il faut apprendre aux gens que c'est inadmissible, accroître la frustration, dans l'enceinte du reconditionnement intellectuel. Le décalage s'accentuera entre l'état de fait actuel inadmissible et l'esprit collectif enfin convenablement préparé sous les auspices des indépendantistes (dont l'intellect aura été rectifié par rapport aux impuretés des enseignements actuels).
    Le champ de l'action politique ce sera l'atelier, l'usine, avant ou après le 5 à 7, monsieur Deshaies voyant se répandre son action académique en cercles concentriques. Vraiment on appréciera le sens des conditions historiques de monsieur Deshaies et les amples volets qu'il rattache à son plan d'action à préférer à tous les autres.

  • Archives de Vigile Répondre

    8 août 2008

    Réponse à monsieur Savard

    8 août 2008, Bruno Deshaies [Tous les textes encadrés.]
    N.B. Cette version remplace la précédente qui est partie à la suite d'une erreur technique au moment de la révision. Nos excuses pour nos lecteurs.
    Monsieur Deshaies décrit l’indépendantisme comme un projet de la raison, une rationalité toute faite, transmise et précédant l’action éclairée.
    Savoir ce que peut signifier fondamentalement pour une nation d’être indépendante ne fait pas bêtement un projet de la raison, une rationalité de facto. Or, mieux comprendre l’indépendance pour une collectivité nationale peut permettre de lui faciliter l’action éclairée. Ce serait dommage d’agir à l’aveuglette ou à pile ou face.
    C’est assez bizarre de le voir se référer à FOucaut et Lacan avec de telles prémisses. D’abord FOucault ne fait pas dans la neurologie. Son apport multiple ne vise pas une thèse sur le rôle du cortex. Il faut aller dans une autre mouvance que la sienne à ce sujet. FOucault dit que ceux qui occupe le pouvoir confisque les beaux principes et exerce une certaine forme de rationalité. Cette rationalité se crée à mesure, en passant, du bric et du broc, souvent, rien de surcréée dans un ciel idéologique. Cela demanderait un développement trop long ici sur l’architecture du savoir d’après Foucault .
    Ne perdons pas notre temps à disséquer Foucault. Comme vous le dites ce serait un développement trop long. Mais une chose est certaine, le Pouvoir selon Foucault est très diffus. Sur ce, je n’ai pas de problème. La question n’est pas ici l’exercice du pouvoir dans la société, mais de l’accès au pouvoir étatique d’un État souverain pour une nation qui recherche d’abord son indépendance collective (qu’elle n’a pas), première étape qui conduit à l’indépendance politique.Même chez celui qui cherche à s’émanciper et donc à constituer sa propre rationalité de pouvoir, la rationalité opère dans le monde concret, les conditions historiques.
    J’ai suffisamment démontré dans mes chroniques que je tenais compte systématiquement du monde concret et des conditions historiques qui entourent ou le fédéralisme ou l’indépendance. Ce sont les faits qui sont éprouvants. Mais il y a des faits de longue durée et des forces profondes que nous ignorons trop facilement. Tel est le cas, par exemple, de l’ANNEXION d’une société par une autre plus forte et mieux nantie. Ce phénomène peut être étudié historiquement.
    Vous, vous vous dites, l’indépendantisme c’est une raison en soi et on va créer un cercle pour produire dans les esprits sa vérité tout entière.
    L’indépendance des nations peut être un sujet d’étude et de réflexion pour quiconque veut bien s’en donner la peine. Que les Québécois soient fédéralistes, c’est un fait. Qu’un certain nombre d’autres croient que l’indépendance collective peut être précieuse pour une nation, il va de soi que ce groupe visera à persuader ses concitoyens du bien fondé de sa pensée ou de son option. Vous perdez beaucoup de temps à me prêter des intentions.
    Pour être bien certain de votre affaire, vous traitez Séguin de façon canonique en faisant un découpage normatif.
    Je ne fais pas de découpage normatif comme vous le dites. Lorsqu’il en est question, il est régulièrement encadré dans un contexte historique. Et ceux qui ont lu Séguin savent très bien que cet historien travaille en présence des faits.
    Il y a d’ailleurs chez vous l’obsession des normes, grande condition pour vous afin que la raison ne perde pas son projet fondamental. À cet égard, vous faites vraiment penser aux idéologues que Castoriadis dénonçait.
    Rien à voir avec Costoriadis. Vous vous trompez. Le mal ne tient pas au fait qu’on peut utiliser des normes, le mal dépend principalement du fait qu’on ne cherche pas à les vérifier ou à en élaborer afin d’éclairer la pensée. Sur ce point, l’histoire peut nous aider à « contrôler » nos normes. Et des normes explicites valent mieux que des présupposés inavoués ou inconscients.
    J’invite les Québécois à travailler dans l’optique indépendantiste. Ils peuvent venir lire ou relire les 330 chroniques du jeudi sur le site de Vigile.net à leur guise. S’ils y trouvent un profit, tant mieux ; s’ils ne veulent rien comprendre, c’est leurs affaires ; mais, s’ils veulent approfondir la pensée indépendantiste, ils ont des matériaux à leur disposition.

  • Archives de Vigile Répondre

    8 août 2008

    Monsieur Deshaies décrit l’indépendantisme comme un projet de la raison, une rationalité toute faite, transmise et précédant l’action éclairée.
    Vouloir comprendre l'indépendance et s'expliquer sur le sujet n'implique pas qu'il s'agit bêtement d'un projet de la raison. Mais si l'objectif pousuivi est bien l'indépendance du Québec, alors l'action éclairée vaut mieux que l'ignorance ou le refus de comprendre.
    C’est assez bizarre de le voir se référer à FOucaut et Lacan avec de telles prémisses. D’abord FOucault ne fait pas dans la neurologie. Son apport multiple ne vise pas une thèse sur le rôle du cortex. Il faut aller dans une autre mouvance que la sienne à ce sujet. FOucault dit que ceux qui occupe le pouvoir confisque les beaux principes et exerce une certaine forme de rationalité. Cette rationalité se crée à mesure, en passant, du bric et du broc, souvent, rien de surcréée dans un ciel idéologique. Cela demanderait un développement trop long ici sur l’architecture du savoir d’après Foucault.
    Il n'est plus inutile discuter de Foucault ou de Lacan ou même d'Edgar Morin étant donné que votre opinion sur ce que je dis est fausse.
    Même chez celui qui cherche à s’émanciper et donc à constituer sa propre rationalité de pouvoir, la rationalité opère dans le monde concret, les conditions historiques.
    Quant au monde concret et aux conditions historiques, je crois avoir suffisamment démontré par l'histoire les difficultés pratiques de cette recherche de l'indépendance pour les Québécois. La question ne porte pas sur la pratique du pouvoir mais sur l'accès au statut d'État-Nation indépendant. Ce qui n'est pas le même problème.Vous, vous vous dites, l’indépendantisme c’est une raison en soi et on va créer un cercle pour produire dans les esprits sa vérité tout entière. Pour être bien certain de votre affaire, vous traitez Séguin de façon canonique en faisant un découpage normatif. Il y a d’ailleurs chez vous l’obsession des normes, grande condition pour vous afin que la raison ne perde pas son projet fondamental. À cet égard, vous faites vraiment penser aux idéologues que Castoriadis dénonçait.

  • Archives de Vigile Répondre

    7 août 2008

    7 août 2008 Bruno Deshaies
    Mea culpa, mea maxima culpa. J'ai oublié un « e » au mot « clair » dans la phrase suivante : « Votre dernier commentaire ne rend pas plus clairE votre pensée.
    Je profite de l'occasion pour ajouter un hyperlien.

  • Archives de Vigile Répondre

    7 août 2008

    7 août 2008 Bruno Deshaies
    Charles de Foucauld et Michel Foucault, ce sont deux personnes bien distinctes. L’auteur dont je parle est bien Michel Foucault (sauf qu’une erreur typographique vous lance comme un cheval à l’épouvante). Ne perdez pas votre temps avec ce détail pour faire de la prose et surtout chercher à prêter des intentions aux autres. Votre dernier commentaire ne rend pas plus clair votre pensée.
    Pour le cortex, il était bien évident qu’il s’agissait de cette partie qui traite l’information. Vu sous l’angle de la connaissance (ce qui nous intéresse ici), il était inutile de se perdre dans le mésencéphale ou le « paléoencéphale », etc.

  • Archives de Vigile Répondre

    7 août 2008

    Je crois qu'il y a énormément de choses intéressantes dans la voie dite académique de monsieur Deshaies. Ne serait-ce que le défi qu"il pose à la question du fondement de la réalité par rapport au droit invincible de l'académie. Par exemple Foucauld, monsieur Deshaies semble hésiter sur l'orthographe, qui y devient neurologue, probablement pour donner une nouvelle vocation au Foucault réel à mille lieux des thèses sur le rôle du cortex, du mésoencéphale et du paléoencéphale. On appréciera aussi son plan d'action en deça des institutions mais qui vise un point donné, l'indépendance, grâce à l'incandescence d'une science indépentantiste enfin épurée et bien administrée.
    Il sera intéressant de le voir professer si jamais il ouvre les portes de son académie pour y délivrer des diplômes. donner à l'indépendantisme un statut de science et à la cause de vrais spécialistes comme lui. Y apprendra-t-on que l'indépendance c'est l'agir par soi collectif? Y méditera-t-on la parole d'un certain Parfondor, personnage enrobé de mystère comme il le fait dans ses leçons sur Internet? Y reprochera-t-on à Rapaille d'opérer en anglais même s'il vit aux U.S.A.
    Dans son programme académique, sûrement aussi appétissant qu'une tartine, comptera-t-il susciter le reconditionnement intellectuel chez ceux qui auront le plaisir de l'écouter par une méditation sur les deux Canadas? Ce serait, nul doute, une vraie pièce de résistance. Voilà le travail.

  • Archives de Vigile Répondre

    7 août 2008

    Le docteur Rapaille a une idée et il la défend, c’est le « Culture codes » (le titre du livre est le même en anglais et en français).
    7 août 2008 Bruno Deshaies
    Le docteur Clotaire Rapaille a créé un Institut Rapaille (en anglais) !!! Il est un défenseur du marketing.
    Culture codes. Comment déchiffrer les rites de la vie quotidienne à travers le monde. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Jean-Sébastien Stehli. Éd. JC Lattès, 2008. http://www.editions-jclattes.fr/livre/jc-lattes-276519-Cultures-codes-hachette.html et http://www.decitre.fr/livres/Culture-codes.aspx/9782709629034
    Information publicitaire sur l’ouvrage :
    « Chaque pays a ses propres empreintes culturelles qui déterminent des comportements : de la vie privée, de la vie sociale. Depuis des années, au service des plus grandes entreprises du monde et même de certains hommes politiques, Clotaire Rapaille a mis au point une méthode, une sorte de crible, qui permet de comprendre ce qui est sous jacent à nos gestes.
    « Pourquoi Américain et Français ont-ils une conception fondamentalement différente de l’amour entre les sexes et de la séduction ? Les codes correspondants à la nourriture et à l’alcool varient selon les pays pour des raisons plus psychologiques que physiologiques. Quant à ceux liés au travail et à l’argent, ils sont viscéralement anciens dans l’histoire de chaque nation. L’usage de cette grille a permis à Clotaire Rapaille d’obtenir de formidables succès dans le domaine du marketing et de la vente. Il a fait évoluer les designers de Chrysler pour concevoir le modèle singulier de la PT cruiser ; aidé Nestlé à pénétrer le marché japonais avec du café instantané… et aujourd’hui il conseille Match.com dans sa lutte contre Meetic.Com. Culture codes, à travers de nombreux exemples de la vie quotidienne et professionnelle, nous explique aussi pourquoi et comment les peuples de la planète sont profondément différents et il nous donne les clefs pour les comprendre plus intimement. »
    Notice biographique. Anthropologue et psychiatre de formation, Clotaire Rapaille est français d'origine. Il s'installe aux États-Unis en 1981 et crée à New York Archetypes Discoveries Worldwide qui s'impose rapidement comme une des toutes premières entreprises en conseil marketing.
    Clotaire Rapaille a été interviewé par Christiane Charrette en 2006 en présence de Robert Charlebois et de Jean-François Lisée. 18 min. Allez lire les commentaires transmis par deux québécois. http://www.radio-canada.ca/radio/christiane/modele-document.asp?docnumero=26917&numero=1880
    Le docteur Rapaille a une idée et il la défend, c’est le « Culture codes » (le titre du livre est le même en anglais et en français). Monsieur Savard ne voit aucune objection à ce mode de pensée. C’est bien correct. Et après ? Soit dit en passant qu’une société n’est pas qu’une culture et une langue. D’ailleurs, les Québécois s’en rendent bien compte au fur et à mesure où ils luttent pour leur indépendance collective.
    Quant à la notion d’académie qui effraie tellement le maître de l’intelligence sophistique, disons simplement que le Dictionnaire des synonymes d’Henri Bénac renvoie le mot académie à trois termes : assemblée, école et université. On est loin de la pastorale, de la théologie et des catéchètes.
    Une Académie de l’indépendance du Québec n’étudierait pas le sujet collectif ou national de la même manière que l’Institut du Nouveau Monde de Michel Venne et certainement pas comme le CÉRIUM présidé par Raymond Chrétien. Quant à l’Institut Rapaille, il va de soi que l’analyse des « cultures codes » (en français) qui vise principalement le marketing nous permettra de vendre l’indépendance du Québec aux Canadiens-Anglais, aux Eskimos et aussi aux Inuits. Bravo !
    Malheureusement, cette digression nous fait trop facilement oublier l’essentiel de l’indépendance du Québec. Il serait important de revenir à l’histoire des deux Canadas pour saisir l’ampleur de la tâche collective qui attend les indépendantistes trop divisés, subdivisés et même opposés. Cherchons plutôt dans notre histoire les raisons de nos divisions afin d’aplanir les malentendus.

  • Archives de Vigile Répondre

    5 août 2008

    Plusieurs détenteurs de la décision publique aujourd'hui recourent aux spécialistes des codes culturels. C'est écrit dans l'article et le parti Républicain a embauché Clotaire Rapaille. C'est écrit dans l'article. C'est qu'il faut tout lire en caressant l'hypothèse que même un fondateur d'académie peut avoir à apprendre.
    On sort du domaine de la persuasion quand on parle d'académie qui enseigne des clauses sous forme catéchétique. Pareille idée ressemble au projet de rééducation et de reconditionnement intellectuel.
    À partir du moment où on se cantonne dans des académies, on est dans une démarche purement pastorale. Un tel projet ressemble à une révolution des catéchètes.
    C'est un univers parallèle. Évidemment cela permet d'enseigner, à l'académie, que l'institution, la techno-structure, l'adversaire c'est tout cela à la fois. Le reconditionnement intellectuel, grand foyer d'expérience politique et de refonte institutionnelle. Monsieur Deshaies vient même de découvrir que mille penseurs pensent comme lui.

  • Archives de Vigile Répondre

    1 août 2008

    L’INTELLIGENCE SOPHISTIQUE
    1er août 2008 Bruno Deshaies
    « Dans notre société capitaliste,on doit persuader sans arrêt pour vendre. »
    (André Savard)

    En revanche :
    « Ceux qui sont dans le camp indépendantiste
    contre une Constitution Nationale du Québec
    disent que cela ne fera que détourner
    de l’effort de persuasion. »

    (André Savard)

    Nous répondons : S’éparpiller dans nos efforts de persuasion n’est certainement pas le meilleur chemin à suivre.
    Dans sa longue dissertation sur les valeurs de la persuasion, M. Savard s’envole dans des sphères complexes qui ne sont pas toujours évidentes entre elles. De la vente de produits à la vente d’idées, il y a énormément de nuances à apporter. Un produit se vend-t-il de la même manière qu’une idée ? De quel produit s’agit-il et de quelles idées est-il question dans son texte ? Il me se semble que les choses sont assez mêlées, c'est le moins que l'on puisse dire.
    Ensuite, on passe au problème du code culturel de la nation québécoise et de celui de la nation canadienne. Encore une fois, le seul mot de « code » est polysémique et quant à celui de « culturel », nous savons tous que son champ de définition est très large.
    Vient après un appel à « l’appareil de la gouvernance nationale » où se poserait « le problème d’une autre organisation de la société ». Nous savons tous que ce mot de « gouvernance » est justement utilisé par les États indépendants pour satisfaire leurs intérêts en confiant la gestion d’un état régional ou local à des personnes qui se chargeront de faire la gestion d’une situation, comme le fait en ce moment Jean Charest – rien de plus. Il est ce nouveau « gouverneur-général-premier-ministre » du Québec délégué par les instances décisionnelles du Canada-Anglais parmi lesquelles se trouve un certain Paul Desmarais, ce bon monsieur Paul du domaine de Sagard, dont le fils gère maintenant les avoirs de plusieurs milliards de Power Corporation.
    On broute enfin sur la notion de « cadre institutionnel ». « Les institutions, lit-on, portent en soi une structure persuasive si on les remodèle à notre image. » Philosophie politique ou sociologie, il faudrait être misérable (au sens de tout à fait insignifiant) pour s’imaginer que les institutions n’ont pas de poids. Cette évidence crève les yeux. Edgar Morin comme Michel Foucauld avaient très bien compris ce fait. Même que Foucault, dans son travail sur l’étude de la logique de la pensée, pousse très loin la poussée du cortex sur les modes d’action. Jacques Lacan n’en pensait pas moins, tout comme Freud qui n’était pas un behavioriste. Une pensée affirmée est déjà dans l’action ! (Voilà le véritable phénomène de persuasion, car à ce point il arrive souvent que la morale cède la place à la force dominatrice sinon à la prépondérance de la plus grande force.)