Le ministre Bernard Drainville sonne la fin des salles de prière dans les écoles. Les directions d’établissements vont plus loin et plaident pour la fin des démonstrations publiques de dévotion religieuse en milieu scolaire.
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«L’école, ce n’est pas un lieu de prière, c’est pas compliqué, l’école ce n’est pas un lieu de prière!», a lancé mercredi le ministre de l’Éducation, qui fut jadis le père de la défunte Charte des valeurs du gouvernement péquiste de Pauline Marois.
Au moins deux écoles secondaires de Laval ont autorisé récemment l'ouverture temporaire d'un local de «ressourcement» pour permettre aux élèves de prier.
Le ministre Drainville a d’abord déclaré à notre Bureau parlementaire que les écoles ne doivent pas réserver de locaux de prières à une seule religion.
Mercredi, il a rectifié le tir. «Je vais émettre une directive pour interdire les salles de prière dans les salles de classe des écoles publiques du Québec. Ce n’est tout simplement pas compatible avec le principe de la laïcité, avec la Loi sur la laïcité», a-t-il insisté, en mêlée de presse à l’Assemblée nationale.
Prier en silence
Les élèves qui le souhaitent pourront continuer de se recueillir «silencieusement», mais pas dans des locaux dédiés à l’enseignement ou dans des gymnases. «Il y a toutes sortes de façons de prier, alors non, je ne peux pas interdire la prière», a-t-il soutenu.
Le centre de services scolaires de Laval a plaidé la sécurité pour expliquer qu’un local avait été rendu disponible au recueillement des élèves à l’école secondaire Mont-de-La Salle. En effet, plusieurs jeunes priaient dans aires communes, des stationnements ou des espaces réservés à des sorties de secours. L’organisation se conformera néanmoins aux directives du ministre Drainville.
À la Fédération des québécoise des directions d'établissement d'enseignement (FQDE), on accueille favorablement la décision du ministre de l’Éducation. Plus encore, les élèves qui veulent prier devraient le faire «de façon privée», «pas publique au vu et aux yeux de tous», selon la vice-présidente, Hélène Bossé.
«On doit sentir que nos établissements sont laïques», insiste-t-elle. Mais dans certaines religions, comme l’islam, les fidèles prient souvent agenouillés sur un tapis. Ça ne devrait plus être possible dans les écoles? «Ça n’a jamais été possible dans les écoles, ça devrait pas l’être du fait qu’on est non confessionnel», a-t-elle répondu à notre Bureau parlementaire.
Recours juridique?
Le Conseil national des musulmans Canadiens est pour sa part préoccupé par l’intervention de Bernard Drainville.
«On est en train d’évaluer la situation avec nos avocats, a déclaré à TVA Nouvelles le PDG, Stephan Brown. Prier ce serait un droit fondamental, se recueillir ce serait un droit fondamental si et seulement si c’est fait d’une façon qui est acceptable selon les directives du ministre de l’Éducation?».
Le Parti québécois réclamait depuis mardi un signal fort de Bernard Drainville au réseau de l’Éducation, pour éviter la multiplication des locaux de prières dans les écoles. Le député péquiste Pascal Bérubé craignait que le cas de Laval ne devienne un dangereux précédent.
«Dans les pauses, on peut se recueillir seul, on peut vivre une spiritualité, mais d'aménager un local à cette fin-là, voire un gymnase dans certains cas, ça ne va pas dans l'esprit de la Loi 21», a-t-il plaidé.
À son initiative, les élus du Parlement ont adopté mercredi à l’unanimité une motion précisant que «la mise en place de lieux de prière, peu importe la confession, dans les locaux d’une école publique va à l’encontre du principe de laïcité».