La réalité parallèle de la politique

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Wilson-Raybould a plutôt été une ministre médiocre


Pour quiconque suit au quotidien le récit de la joute politique à Ottawa, l’impression sera que le Canada avait une grande ministre de la Justice, madame Wilson-Raybould, qui a été remplacée par une roue de secours, David Lametti. Expulsée du caucus cette semaine, madame Wilson-Raybould a maintenant le profil d’une personnalité plus grande que nature.


La réalité diffère pas mal de la perception. Dans n’importe quel autre milieu professionnel, aucune personne sérieuse n’oserait comparer le calibre de ces deux personnes. Madame Wilson-Raybould fut une ministre de la Justice peu qualifiée pour entrer en poste et assez ordinaire une fois en fonction. Alors qu’on reconnaît Lametti comme une sommité du droit.


Quelle performance ?


Si l’on fait fi de son rôle d’héroïne de la droiture et de la vérité, Jody Wilson-Raybould n’a ébloui personne en trois ans au ministère de la Justice. Après l’arrêt Jordan de la Cour suprême, c’est elle qui a tardé à nommer des juges pour accélérer le traitement des causes. Les provinces fulminaient alors que les délais maximaux établis permettaient de remettre dans la nature des criminels.


Certaines de ses réformes sont contestées devant les tribunaux ou dénoncées dans le milieu judiciaire. D’autres engagements pris par les libéraux en matière de justice ont été abandonnés sous sa gouverne.


La gestion de son bureau est apparue assez chaotique aussi. Elle a passé plus d’un directeur de cabinet par année. C’est souvent le propre des politiciens qui font plus de sautes d’humeur que de réformes réussies. Sans rien enlever à ses convictions personnelles, sa contribution aux dossiers autochtones semble aussi avoir été plus symbolique que fructueuse.


Son expérience concrète dans le monde du droit est minime. Elle fut procureure de la Couronne durant trois ans, au début des années 2000. Le reste de sa carrière fut consacré à l’action politique au service de la cause autochtone. Jusqu’à son élection comme libérale en 2015. Une bien mince expérience du droit pour occuper les fonctions de ministre de la Justice et procureure générale.


Même sa gestion de l’affaire SNC-Lavalin, marquée par un refus d’explorer à fond tous les scénarios, ne m’impressionne guère. J’aime encore moins le chantage qu’elle aurait exercé sur Justin Trudeau, selon le Toronto Star, mettant de l’avant ses conditions pour rester ministre. La ministre junior se perçoit au-dessus du premier ministre.


Le remplaçant, rôle ingrat


Celui qui passe pour le gadget de remplacement est un professeur de droit à l’université. David Lametti fut vice-doyen à l’Université McGill. Il est reconnu comme un conférencier recherché mondialement dans ses champs de spécialité. Mais politiquement, il est arrivé au mauvais moment. On ne regarde plus son CV. Il a l’air de ne pas arriver à la cheville de cette géante qu’est devenue madame Wilson-Raybould.


Frustrant ? Ceux parmi les libéraux qui se désolent de voir que les compétences réelles sont trop peu importantes en politique doivent néanmoins faire un exercice. Le curriculum vitæ de Justin Trudeau supportait-il qu’il devienne un premier ministre tant adulé ?